A Toulouse, les lampadaires éclairent aussi les décisions des élus

A Toulouse, les lampadaires éclairent aussi les décisions des élus La ville réutilise l'architecture électronique et la position surélevée de ses lampadaires pour collecter des données de trafic et de fréquentation à l'aide de capteurs vidéo. 

Comme de nombreuses villes en France, Toulouse a déployé de l'éclairage intelligent. Il permet, grâce aux LED, de moduler l'intensité des lampadaires en fonction de l'horaire ou de la fréquentation, engendrant des économies d'énergie. Mais quelque chose tracassait Joël Lavergne, responsable de l'éclairage public de la ville rose. "L'éclairage public ne sert que la nuit. C'est un peu dommage de dépenser autant d'argent, de casser des trottoirs, tirer des câbles et installer des mâts seulement pour la moitié de la journée". Or depuis que l'éclairage est devenu intelligent, les lampadaires sont équipés de puces électroniques, qui pourraient tout à fait remplir d'autres missions, se dit-il. D'autant que l'éclairage jouit d'une position idéale : "Les lampadaires culminent à 7 ou 8 mètres, c'est juste assez pour observer l'activité humaine de haut sans être trop éloigné", remarque Joël Lavergne. L'agent s'est donc mis en tête de trouver de nouveaux usages à ces lampadaires qui dorment le jour.

Dans le cadre d'une première expérimentation débutée en 2016 et pleinement effective en 2018, Toulouse a installé sur des lampadaires situés à des points névralgiques de la ville des caméras un peu particulières de la société Kawantech. Leurs images de mauvaise qualité ne sont pas enregistrées et leur flux n'est pas non plus accessible en direct. Elles se contentent de prélever des données sur les objets qu'elles ont été entraînées à détecter en fonction de leur vitesse : les piétons et les voitures. Puisqu'un lampadaire y est déjà installé, avec un mat raccordé à l'électricité, les économies sont substantielles pour la ville. "Avec cette première version, nous avons été capables de créer des cartes de chaleur montrant la fréquentation des trottoirs et des routes", explique Joël Lavergne.

Comprendre l'utilisation de l'espace public

Afin de gagner en précision, Toulouse a lancé en octobre une nouvelle expérimentation, cette fois-ci avec des caméras de Bosch, qui fonctionnement toujours uniquement comme des capteurs de données. Elles sont plus précises que celles de Kawantech, permettant ainsi de discerner non seulement les voitures et les piétons, mais aussi les vélos, les scooters, les bus avec ou sans accordéon ainsi que les places de stationnement libres ou occupées. A terme, si un déploiement plus massif était décidé, l'idée serait de mélanger ces deux types de capteurs : le moins performant pour les grands axes routiers et le plus précis (et plus onéreux) pour les endroits où se mêlent de nombreux modes de déplacement.

Ces données permettent à la ville de découvrir certaines incohérences : ici une piste cyclable mal adaptée, là deux stations de métro proches avec des fréquentations radicalement différentes selon l'heure... et même un parking totalement détourné de son esprit. "L'un de ces capteurs est disposé à l'entrée d'un parking-relais permettant de se garer pour ensuite prendre le bus. Nous nous sommes rendu compte que la moitié des gens qui s'y garaient ne prenaient pas le bus", raconte Joël Lavergne. Sur le long terme, il aimerait brancher d'autres services à l'éclairage public. "Le lampadaire, c'est comme les appels des smartphones : aujourd'hui ils servent surtout à produire de la lumière, mais demain ce ne sera qu'une option parmi d'autres." Restera à payer le forfait.