Avec Toosla et Virtuo, l'autopartage monte en gamme

Avec Toosla et Virtuo, l'autopartage monte en gamme Ces deux plateformes françaises louent des voitures allemandes haut de gamme qui peuvent être ouvertes depuis un smartphone sans intervention humaine, et à des prix compétitifs.

Si l'autopartage sert principalement à rouler d'un point A à un point B, il peut aussi permettre de conduire une voiture que l'on aurait jamais les moyens de se payer. C'est sur cette idée de lier l'utile à l'agréable que sont nées les plateformes d'autopartage Virtuo et Toosla, qui proposent de louer pour des trajets longue distance de rutilantes Mercedes et BMW (acquises en leasing par les deux start-up).

Virtuo est la plus ancienne et la plus développée des deux. Elle a débuté sa commercialisation en 2016 à Paris et s'est depuis étendue à 15 villes ailleurs en France (Lyon, Marseille, Aix, Nice Toulouse…) ainsi que dans trois autres pays (Royaume-Uni, Espagne, Belgique), avec une flotte de 3 000 véhicules. Le tout alimenté par presque 30 millions d'euros levés depuis 2015 (dont une dernière opération à 20 millions en février 2019). De son côté, Toosla est disponible depuis 2017 à Paris et Neuilly et prévoit d'ouvrir une station à Londres en 2020 pour passer de 300 à entre 600 et 1 000 véhicules. La start-up rémoise a levé 8 millions d'euros en septembre. Elle revendique "quelques dizaines de milliers" de locations par an, tandis que Virtuo ne communique aucun chiffre sur le sujet.

Les deux start-up mettent en avant le côté pratique de leur service. Leurs véhicules, disposés dans dans les gares ou d'autres points névralgiques des villes, peuvent être déverrouillés depuis leur appli sans intervention humaine. L'état des lieux se fait également depuis l'appli. A la clé : beaucoup moins de paperasse et de temps perdu que chez un loueur traditionnel.

De 30 à 130 euros

Elles assurent également que leurs prix sont plus bas, à catégorie de véhicules équivalents.  "Nous sommes entre 30 et 40% moins chers, car nous n'avons pas les coûts humains et logistiques d'une agence physique", promet Eric Poncin, cofondateur de Toosla. Chez lui, le prix d'appel pour des petites voitures haut de gamme (Mercedes Classe A, BMW Serie 1) est autour de 30 euros par jour, tandis que la facture peut grimper jusqu'à 130 euros la journée pour des SUV (BMW X4, Mercedes GLA). Les prix sont aussi plus prévisibles, d'après Thibault Chassagne, cofondateur de Virtuo. "Ils oscillent de plus ou moins 25% selon les périodes de l'année, alors que c'est bien plus chez les loueurs, qui y ajoutent de nombreux frais additionnels".

Par ailleurs, les deux plateformes sont en mesure de garantir un véhicule précis, quand les agences fonctionnent par catégories de véhicules (entrée de gamme, premium etc.) similaires. Un argument important pour Toosla, qui revendique un côté "plaisir", avec une partie de son public qui souhaite tester des véhicules précis. Les voitures de la start-up sont dotées de toutes les options les plus onéreuses pour renforcer cette fugace expérience de luxe. "Chacune de ces options coûte plusieurs milliers d'euros. Même s'ils le voulaient, nos clients n'auraient pas les moyens de se les payer", lâche Eric Poncin.

Opportunités B2B

Le plaisir, mais aussi le business. Virtuo réalise 40% de son chiffre d'affaires durant les jours de semaine, "ce qui correspond à des trajets à vocation professionnelle", analyse Thibault Chassagne. La start-up a développé une offre B2B, qui permet notamment une facturation en fin de mois, des rabais allant jusqu'à 20% pour les plus gros volumes et une protection contre les prix dynamiques. Toosla réfléchit à faire de même.

L'activité de ces start-up semble complémentaire de celles des plateformes d'autopartage comme Ubeeqo ou Communauto, plutôt adaptées à des trajets interurbains, alors que Toosla et Virtuo sont plutôt destinées à des clients qui sortent de leur agglomération pour des voyages d'au moins 100 kilomètres. Par ailleurs, le leader de l'autopartage entre particuliers Getaround (issu du rachat de la start-up française Drivy), historiquement centré sur les longs voyages, se tourne de plus en plus vers les applications urbaines via des flottes de loueurs professionnels, avec des facturations à l'heure plutôt qu'à la journée. Ce qui laisse davantage le champ libre à Virtuo et Toosla. Les deux start-up souffrent tout de même d'un défaut pour ces longs voyages : le véhicule doit être ramené exactement là où il a été pris. Impossible de déposer à Toulouse un véhicule loué à Paris, ni même dans une station différente dans la même ville, ce que permettent les loueurs traditionnels.

"Le haut de gamme était une manière d'entrer sur le marché"

Côté modèle économique, les sociétés ne sont pas des plateformes de mise en relation entre particuliers ou loueurs professionnels et clients. Elles gèrent et entretiennent leur propre flotte, acquises en leasing.  C'est d'ailleurs l'une des raisons de cette offre haut de gamme, explique Thibault Chassagne. "Les véhicules premium allemands ont une très bonne valeur résiduelle une fois qu'ils ne sont plus neufs. Si l'on raisonne en termes de loyer, ils ne sont pas tellement plus chers que des véhicules de gammes inférieures. Et leur standing nous donne un certain pouvoir en termes de prix." Pour augmenter leur prix et leurs marges, les start-up peuvent par ailleurs compter sur la tarification dynamique en périodes de forte demande et sur un nombre de kilomètres journalier prédéfini, au-delà duquel il faut remettre au pot.

Mais les services de mobilités haut de gamme connaissent tous la même limite : l'échelle. Il leur faudra se démocratiser pour grandir et devenir rentables. Virtuo a par exemple commencé à proposer des fiat 500 X (un crossover disponible à partir de 21 000 euros). "Le haut de gamme était une manière d'entrer sur le marché, avec un côté rassurant pour les clients qui découvraient un nouveau service", reconnaît Thibault Chassagne. "A présent, il est temps d'élargir l'offre." Qui se souvient encore qu'Uber a démarré comme un luxueux service de chauffeur privé ?