La mobilité verte : une utopie ?

La COP26 de Glasgow s'est achevée avec notamment l'engagement de réduire les émissions de gaz à effet de serre provenant des véhicules à moteur. Cette promesse faisait partie des quatre priorités de la conférence de 2021.

Néanmoins, les accords ne sont pas, pour beaucoup, à la hauteur de l’enjeu, et ce malgré l’engagement des collectivités locales et des gestionnaires de flottes de véhicules de cesser de construire et d’utiliser des véhicules thermiques à l’horizon 2035-2040. Cependant, peu de constructeurs ont pris part à cet accord. En parallèle, des initiatives se mettent en place dans les métropoles du monde entier pour enrayer ce fléau qui menace notre écosystème. En effet, l’urbanisation croissante dans le monde appelle à revoir nos comportements, mais quels changements concrets pour des résultats probants ?

La ville intelligente : par où commencer ?

La maturité des territoires varie selon les pays. Il est indéniable qu’une ville comme Singapour a un train d’avance, de la simple volonté de ses dirigeants d’utiliser les technologies les plus modernes pour rendre toujours meilleures les conditions de vie de leurs concitoyens. A contrario, une grande partie des pays européens, et plus particulièrement la France sont en retard, et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord le débat autour des actions à déployer peut prendre beaucoup de temps. Ensuite, une fois les décisions adoptées, on se heurte à des processus administratifs lourds avant de mettre en œuvre des projets d’envergure. Mais d’autres obstacles peuvent apparaître puisque l’application de politiques en faveur de la ville intelligente ne se jouent pas seulement au niveau des territoires eux-mêmes. C’est avec les citoyens, qui doivent adopter de nouveaux comportements, que tout se joue. Les villes sont aujourd’hui accusées de faire la guerre à la voiture, avec la mise en place de politiques dissuasives et de plus en plus restrictives, mais que se passe-t-il si les comportements ne changent pas ?

La circulation dans des villes comme Paris ou Lyon reste congestionnée sur de nombreux axes et selon certaines études, la fermeture des voies sur berges de la Seine dans la capitale, aurait déplacé la pollution ou l’aurait augmentée. Nous pourrions demain changer toute la flotte de véhicules en passant de l’énergie thermique à l’électrique, mais si les comportements restent les mêmes, les embouteillages ne disparaîtront pas pour autant.

Plutôt que des mesures punitives, encourager l’effort collectif pour promouvoir des évolutions concrètes

Si les discours sont perçus comme alarmistes, les solutions proposées sont ressenties comme trop radicales, avec le danger de voir naître des frustrations plus profondes. L’émergence des gilets jaunes en 2018 est survenue à la suite des annonces du Gouvernement. La ténacité de l’exécutif sur cette question s’est heurtée à la colère et l’incompréhension d’un grand nombre de Français qui ont vu cette mesure comme trop abrupte, et surtout comme la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, alors que les restrictions rythmaient leur quotidien.

Bien souvent, les changements sont vus comme contraignants, sans que les bénéfices ne soient bien expliqués. S’il est important de continuer à faire changer les habitudes, les citoyens doivent ressentir que l’effort est collectif et qu’il est partagé par les dirigeants. A Londres, l’initiative EBP permet de sensibiliser les conducteurs sur l’impact environnemental de leurs véhicules ou encore les alternatives à leur disposition pour se déplacer (transports en commun, vélo, trajet à pied,…). En quelques mois, ce sont 10% de véhicules très polluants en moins qui ne circulaient plus dans l’hyper-centre.

Le 100% écologique est-il réaliste ?

On évoque souvent les énergies renouvelables et durables, le solaire et l’éolien en tête, comme des solutions d’avenir pour la planète, mais cela suffit-il pour réussir des projets écologiques viables ? En effet, c’est une chose d’arriver, à terme, à faire adopter en majorité des véhicules zéro carbone, mais vouloir tendre à tout prix vers l’utilisation de ce type de véhicules engendrerait d’autres problématiques. En effet, les batteries des véhicules électriques pour le marché européen sont par exemple majoritairement fabriquées en Pologne, un pays dont l’électricité dépend à 80 % du charbon. Les matériaux utilisés pour la fabrication de ces batteries électriques sont d’ailleurs rares (cobalt, nickel, lithium…) et provoquent des dégâts écologiques conséquents (pollutions des sols ou des cours d’eau). Bien que le recyclage de ces batteries s’améliore, il reste du chemin à parcourir. 

Les nouvelles mesures urbaines sont-elles le modèle à suivre à tout prix ?

Les initiatives mises en place font souvent débat. Elles sont, d’un côté, saluées par certains pour leur audace, et décriées par d’autres pour leur inefficacité.

Qu’il s’agisse des voies sur berge, de la piétonisation de l’hyper centre dans de nombreuses villes comme Strasbourg ou encore la tendance générale pour faire de la place aux mobilités plus douces.

Parmi les villes de France qui ont des initiatives concrètes, on retrouve bien sûr la capitale, mais aussi Toulouse, Lyon, Montpellier, Bordeaux ou encore Angers et Reims. Bien que cela soit encourageant, la France reste à la traîne en comparaison aux États-Unis, au Royaume-Uni ou encore l’Allemagne sur l’adoption auprès des riverains, des politiques publics, mais aussi des innovations dans la santé et l’éducation, la mobilité en général et la mise en place d’infrastructures technologiques audacieuses. Pour rattraper ce retard, les villes doivent peser le pour et le contre de chaque mesure, qu’elles soient justifiées ou non. On perd beaucoup plus de temps à ne pas voir une mesure être adoptée largement, plutôt que de la mettre en place progressivement pour avoir des résultats efficaces sur le long terme.

La collaboration pour de meilleures mobilités entre les villes, les citadins et les entreprises doit être fortement renforcée. Trouver des solutions viables qui passeraient par une meilleure communication entre le secteur public et le secteur privé serait plus efficace pour apporter des solutions concrètes.

Récemment, le concept de la ville du quart d’heure a trouvé un auditoire. Cependant, il ne concerne que les métropoles. Pour les habitants vivant dans des territoires plus éloignés des centres urbains, qu’allons-nous leur proposer pour améliorer leur quotidien ?

L’avenir de la mobilité est plus complexe que des annonces et des projets décidés à l’échelle des territoires. L’urbanisation croissante des décennies à venir va nous amener à revoir totalement nos paradigmes, et il est difficile de savoir si nous serons prêts à temps pour sortir gagnants face à ces enjeux. La « méthode verte » comme appliquée aujourd’hui ne porte pas encore ses fruits. Est-ce que des initiatives plus pragmatiques ne seraient-elles pas préférables ?