Ludovic Francesconi (Wero) "Dans le paiement en ligne, Wero offre aux acquéreurs des tarifs inférieurs à ceux de la carte"
Interopérabilité, tarifs, euro numérique… Ludovic Francesconi, directeur stratégie et développement de l'EPI, décrypte les enjeux du lancement du paiement en ligne de Wero prévu en 2026.
JDN. Wero prévoit d'être opérationnel dans les paiements en ligne en Allemagne à la fin de l'année 2025, puis en France en 2026. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur les étapes prévues de ce déploiement ?

Ludovic Francesconi. Les premiers tests avec consommateurs vont être activés en Allemagne la semaine du 13 octobre. En France, les premiers e-commerçants proposeront Wero à l'été 2026. Il y aura déjà eu des tests en Allemagne et en Belgique donc le lancement français sera optimisé. On sait très bien que les attentes seront importantes et on ne veut pas décevoir. Dans le monde du paiement, beaucoup de solutions ont été lancées dans le passé et ne fonctionnaient pas très bien. On ne veut pas se précipiter pour s'assurer que notre solution sera fiable.
Comment s'effectuera concrètement une transaction en ligne via Wero ?
Sur ordinateur, il faudra scanner un QR code avec son téléphone et confirmer ensuite le paiement sur l'application bancaire. Pour un deuxième paiement chez le même commerçant, il ne sera pas nécessaire de scanner : le consommateur recevra une notification sur son téléphone pour valider la transaction. Sur mobile, on sera sur du app-to-app avec une redirection automatique vers l'application bancaire du consommateur.
Pour concurrencer les géants du paiement comme Visa ou Mastercard, atteindre une taille critique sera déterminant. Qu'en est-il de l'interopérabilité avec les autres solutions européennes comme Bizum ou MB Way ?
A court terme, ce n'est pas notre priorité. On veut d'abord se focaliser sur la France, la Belgique et l'Allemagne. Ensuite, les Pays-Bas et le Luxembourg vont migrer leur solution nationale vers Wero. Donc nos efforts vont d'abord se concentrer sur le lancement du paiement en ligne dans ces cinq marchés qui représentent 75% de tous les paiements de détail en valeur dans la zone euro. Pour l'interopérabilité, on doit prendre une décision d'ici la fin de l'année. En fonction de cette décision, on pourrait construire un hub d'interconnexion. Mais pour le moment, ce n'est pas notre premier objectif.
Croyez-vous encore à la possibilité que ces autres solutions se rallient à Wero plutôt que de poursuivre leur propre voie ?
On aimerait mais c'est un sujet très sensible. Dans le fond, on se ressemble beaucoup et on a les mêmes objectifs. C'est dommage d'avoir plusieurs solutions en parallèle au lieu de mutualiser nos efforts et investissements. Mais les marques ont grandi et sont désormais très fortes. Même si ce serait évidemment souhaitable, c'est presque impossible de penser aujourd'hui que Wero deviendra la solution européenne unique et que les autres initiatives disparaîtront. Tout ce qu'on peut faire, c'est trouver des axes de synergie et discuter pour d'éventuelles collaborations.
"C'est presque impossible de penser aujourd'hui que Wero deviendra la solution européenne unique"
Avec l'euro numérique, les solutions européennes risquent de devenir encore plus fragmentées. Que pensez-vous de ce projet ?
On n'est pas opposé par principe à l'euro numérique, mais on s'interroge sur sa valeur ajoutée pour le consommateur. Le projet vise à permettre des paiements de compte à compte, or cette fonctionnalité existera déjà avec Wero, qui permettra à un consommateur de régler directement un commerçant en utilisant son compte bancaire. Par ailleurs, la mise en place de l'euro numérique représentera un investissement conséquent pour les banques, ce qui mobilisera des ressources qui auraient pu être consacrées au développement de Wero.
Pouvez-vous nous en dire davantage sur les tarifs qu'appliquera Wero pour le paiement en ligne ?
Notre modèle ne prévoit pas de commission pour les marchands, mais uniquement pour les établissements acquéreurs. Dans le paiement en ligne, Wero offre aux acquéreurs des tarifs inférieurs à ceux de la carte. On n'a pas le choix car l'usage de la carte est très bien ancré chez les commerçants. En plus d'un tarif compétitif, il faudra aussi proposer une expérience utilisateur fluide car il n'y a pas que le prix qui compte.
Comme vous le soulignez, la carte bancaire est déjà bien implantée et il sera difficile de la concurrencer. Pourtant, la communication de l'EPI pour le paiement en ligne est encore timide…
Pour le moment, on concentre nos efforts en communication sur la partie peer-to-peer car c'est notre porte d'entrée vers le paiement en ligne et le paiement de proximité. En France, on communiquera auprès du grand public après notre lancement donc le marketing et la publicité auront plutôt lieu fin 2026 ou début 2027. De toute manière, c'est inutile de communiquer si on n'a que trois commerçants. Il faut d'abord une base d'utilisateurs et de marchands suffisante.
Est-ce que Wero proposera du BNPL ? Et si oui, avez-vous déjà contacté des prestataires comme Klarna, Alma ou d'autres spécialistes ?
Oui, nous allons bien intégrer un service de paiement fractionné à notre solution. A priori, ce sera pour 2027. Mais cette offre de BNPL ne sera pas portée par les acteurs que vous avez cités mais par les banques qui font partie de l'EPI et qui intègreront elles-mêmes un service de paiement fractionné dans le parcours Wero.