Comment Sigfox s'organise pour faire entrer sa technologie dans les moeurs
Le spécialiste toulousain de l'IoT a recruté Raouti Chehih pour populariser son réseau auprès des étudiants, des start-up, des développeurs et des grandes entreprises.
Non, Sigfox ne fonce pas droit dans le mur. Le groupe, qui présentera ses résultats 2017 en janvier prochain, affirme d'ores et déjà que son chiffre d'affaires a "augmenté significativementF cette année par rapport à 2016", contrairement à ce qui avait été annoncé en octobre par le média Light Reading, qui parlait d'un CA de 30 millions en 2017 équivalant à celui de l'année précédente. Il n'empêche, le PDG du groupe Ludovic Le Moan est loin d'être en terrain conquis. Pour ne pas se faire dépasser par ses concurrents membres de l'alliance LoRa, il a décidé de muscler sa stratégie de communication inspirée du soft power.
"Nous tisseront d'ici fin 2018 des partenariats formels avec une quarantaine d'établissements dans le monde, triés sur le volet"
Le spécialiste toulousain de l'IoT a intérêt à ce que les étudiants, les start-up, les développeurs du secteur, ainsi que les équipes dirigeantes des grands groupes qui veulent basculer vers l'Internet des objets, entendent parler le plus tôt possible de Sigfox et puissent tester facilement le réseau à petite échelle. Pour cela, le patron a recruté une pointure pour orchestrer cette stratégie de communication "molle", en la personne de Raouti Chehih, le président du parc d'activité EuraTechnologies de Lille qui a fait de cet espace créé en 2006 le plus gros incubateur tech d'Europe. Il a pris la tête du département adoption et évangélisation technologique de Sigfox en juin 2017, tout en gardant ses fonctions non exécutives à Lille.
Le nouveau missionnaire de la technologie IoT développée par la compagnie toulousaine a choisi avec soin la quinzaine de collaborateurs qui composent son équipe rapprochée. Cette escouade d'évangélistes, qui devrait encore être renforcée en 2018, a construit une stratégie ciblant quatre publics différents, déployée sur le terrain depuis mois octobre dernier.
La société veut tout d'abord permettre aux étudiants des facs technologiques de se familiariser avec sa technologie. "Nous tisseront d'ici fin 2018 des partenariats formels avec une quarantaine d'établissements dans le monde, triés sur le volet. Nous ciblons en particulier les Etats-Unis et l'Asie. Nous avons par exemple signé avec l'Université de Buffalo, aux USA, et avec la Mahanakorn University of Technology de Bangkok, en Thaïlande", détaille Raouti Chehih. Concrètement, lorsque les facs ne sont pas situées dans une zone couverte par son réseau, le groupe leur fournit des antennes Sigfox ainsi que des kits de développement pour permettre aux étudiants de fabriquer des objets connectés et de les tester.
"Nous allons lancer en 2018 un bootcamp en ligne pour enseigner aux développeurs les bases de Sigfox en plus d'un maker tour physique tout autour du monde"
Pour que les entreprises qui basculent vers l'IoT aient envie de choisir sa technologie, Sigfox a intérêt à ce qu'un maximum d'applications fonctionnant avec son réseau soient développées. Le groupe pousse donc les développeurs à apprendre à utiliser son système. "Nous allons lancer en 2018 un bootcamp en ligne pour leur enseigner les bases en plus d'un maker tour physique tout autour du monde. Les start-up et autres développeurs peuvent venir poser des questions à nos équipes pendant ces rendez-vous en face à face et expérimenter notre technologie", indique Raouti Chehih. Des événements sont pour l'instant prévus dans 17 villes, comme Berlin, Londres, New York, San Francisco, Mexico, Rio de Janeiro ou encore Singapour et Taipei. La société a également formé ses partenaires opérateurs, avec lesquels elle a pour l'instant installé ses antennes dans 36 pays, pour qu'ils puissent à leur tour former des développeurs localement, sans forcément en informer Sigfox. "Nous essayons de favoriser au maximum la capillarité", note le directeur de l'évangélisation.
Sigfox tisse également des partenariats avec des incubateurs de start-up où ses équipes forment les entrepreneurs aux principales caractéristiques de son réseau. Cette politique était déjà en place avant l'arrivée de Raouti Chehih, mais l'évangéliste l'a systématisée et fait passer à l'échelle internationale. Ludovic Le Moan est par exemple la locomotive de l'IoT Valley, un écosystème de start-up situé à Toulouse, où travaille notamment le Connected Camp, un accélérateur dont il est le principal mentor. Il est toujours président d'honneur de cette structure. Sigfox est également partenaire d'EuraTechnologies depuis 2015.
Sigfox veut enfin favoriser l'adoption de sa technologie dans les grands groupes. En réalisant leurs missions, les membres de l'équipe de Raouti Chehih repèrent des solutions technologiques intéressantes développées par des start-up et des développeurs, basées sur le réseau Sigfox. Ils transmettent leurs découvertes à l'IoT Agency. Ce groupe de dix personnes travaille directement avec les clients des opérateurs qui déploient le réseau de Sigfox et essaye de trouver des solutions technologiques adaptées à leurs demandes commerciales. Les opérateurs signent ainsi plus facilement de gros contrats avec leurs clients et Sigfox gagne plus d'argent.