50 millions d'euros : en France, Michel-Jack détient la cave à vin la plus chère du monde
Deux bouteilles du Titanic, le vin préféré de Napoléon, des bouteilles à 500 000 euros, un Château Yquem 1811, la bouteille de vin blanc la plus chère au monde… Michel-Jack Chasseuil vit au-dessus d'un trésor qu'il a bâti.
A 83 ans, cet ancien dessinateur industriel chez Dassault vit à La Chapelle-Bâton, village de 300 habitants dans les Deux-Sèvres. Sous sa maison, une cave de 400 mètres carrés, véritable cathédrale souterraine climatisée naturellement entre 10 et 15 degrés. Cette construction abrite 50 000 bouteilles provenant des 140 meilleurs vignerons mondiaux, le tout estimé à 50 millions d'euros par un milliardaire chinois.
Cette cave représente bien plus qu'une simple collection. Michel-Jack Chasseuil la considère comme "le patrimoine de l'humanité", regroupant tous les Pétrus depuis 1914 et les plus grands vins. Son travail méticuleux de trente ans consiste à traquer les bouteilles les plus rares, documentant l'histoire de chaque vin, son origine et son vinificateur. Il a transformé sa passion en véritable conservatoire du patrimoine viticole mondial.

Fils de facteur, il a débuté sa collection en 1975 sur les conseils de Marcel Dassault : "N'achetez que ce qui, un jour, ne se trouvera plus". Avec sa prime de 10 000 francs en 1982 (l'équivalent de 3 900 euros en 2024), il achète quatre caisses de Pétrus, aujourd'hui vendues jusqu'à 6 000 euros la bouteille. Fort négociateur, il voyage jusqu'en Ukraine pour acheter des bouteilles des caves du tsar Nicolas II, qu'il ramène secrètement en France.
Aujourd'hui, son travail de conservateur est plus difficile. Il déplorait lors d'une conférence la prolifération de fausses bouteilles, on dit que "70% des grands bordeaux circulant en Chine sont contrefaits". En France, des fraudes ont été repérées chez 30% des producteurs contrôlés par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Pour éviter la contrefaçon, Michel-Jack Chasseuil achète désormais exclusivement auprès des producteurs et refuse les ventes aux enchères.
L'envolée des prix constitue son autre préoccupation majeure. Internet et l'émergence de nouveaux riches ont transformé le marché. "Une caisse de Pétrus vaut aujourd'hui 30 000 euros", déplore-t-il. Cette spéculation transforme les grands crus en "œuvres d'art qu'on regarde et qu'on ne boit plus", regrettant que le vin devienne inaccessible aux véritables amateurs.
Aujourd'hui, il transmet son savoir à son petit-fils Adrien, 24 ans, avec qui il s'est associé. Cette transmission familiale assure la pérennité d'une collection unique, qu'il souhaite transformer en musée du vin, "Louvre viticole" destiné aux générations futures.