Structurer ses données en fonds d'investissement : les 5 erreurs à éviter

Dans la vie d'un fonds d'investissement, chaque décision s'appuie désormais sur des flux de données variées : appels de fonds, reportings ESG, suivis de valorisations, courriels d'entrepreneurs…

Autant d’informations qui façonnent le rendement final. Pourtant, dans bien des gestions, ces données restent gérées comme des actifs dormants et non comme des atouts stratégiques. Résultat : perte de temps, risques réglementaires et difficulté à innover. Voici cinq pièges courants, observés dans des fonds de toutes tailles, et quelques stratégies pour les éviter.

Erreur n°1 : empiler des tableurs comme des briques

Dans nombre de fonds d’investissement, la première impasse consiste à empiler des tableurs comme on monterait un mur de briques : un contrôleur financier actualise « Valo_final_v12(1) » tandis qu’un analyste planche sur « PIPE_mars_clean_V34 ». Au fil des versions, les chiffres divergent insensiblement et finissent par remonter, bancals, jusqu’au comité d’investissement. Or, tant que chaque équipe détient sa « bonne » copie locale, on consacre plus d’énergie à réconcilier les données qu’à les analyser. La seule issue passe par un référentiel unique (base SQL robuste sur un serveur partagé en local ou entrepôt cloud souverain) où les droits d’accès remplacent la circulation frénétique de pièces jointes. Le tableur redevient alors un outil de simulation ponctuelle, plus le socle officiel.

Erreur n°2 : ignorer la traçabilité (data lineage)

Lorsqu’un LP réclame l’historique complet des cash-flows d’une participation, la chasse aux onglets et aux courriels s’ouvre, révélant l’absence de suivi. Sans fil d’Ariane, prouver l’origine d’un chiffre devient périlleux face à l’AMF ou à un auditeur. À l’inverse, un catalogue de données (open source ou propriétaire, hébergé sur un serveur français) conserve chaque transformation, identifie le propriétaire de chaque champ et apporte enfin la sérénité qu’exigent investisseurs et régulateurs.

Erreur n°3 : externaliser aveuglément son infrastructure hors Europe

Pour aller vite, certaines équipes déploient CRM, GED ou dataroom sur un cloud extra-européen « plug and play ». En apparence, tout fonctionne ; pourtant, le Cloud Act américain plane sur ces données confidentielles. Pour un fonds positionné sur des secteurs stratégiques, céder ainsi sa souveraineté revient à laisser une porte ouverte sur ses deals. Choisir un fournisseur européen certifié, chiffrer les données au repos comme en transit et contractualiser une localisation stricte sont les garde-fous minimum.

Erreur n°4 : croire que la gouvernance relève du seul CTO

On croit souvent que la gouvernance des données relève du seul CTO ou de la société d’infogérance. Une politique RGPD écrite noir sur blanc ne vaut rien si personne ne sait qui est réellement propriétaire de la donnée concernée. Les processus s’érodentlorsque les talents tournent et la conformité devient cosmétique. Réunir, chaque trimestre, Front Office, Middle, Compliance et IT autour d’un comité Data change la donne : les indicateurs de complétude, de fraîcheur ou de qualité ne sont plus des abstractions techniques mais des objectifs partagés.

Erreur n°5 : se lancer dans l’IA avant de fiabiliser la base

Enfin, nombreux sont les GPs qui se lancent dans l’intelligence artificielle sans avoir fiabilisé leur socle. Ils rêvent d’un chatbot qui rédige la note du comité d’investissement ou répond au LP sans hallucinations. Mais le modèle se trompe parce qu’il interroge des PDF mal structurés. Une IA mal nourrie amplifie les incohérences et menace la réputation du fonds. Le remède commence par un contrôle qualité rigoureux couplé à une classification claire des données sensibles. Une fois ce socle posé, un LLM encapsulé dans une couche de vérification factuelle devient un allié, non un risque.

La souveraineté comme levier de performance

En évitant ces cinq faux pas, un fonds transforme ses données d’actifs dormants en véritable levier de performance tout en préservant sa souveraineté et la confiance de ses investisseurs. Structurer ses données n’est pas qu’une obligation réglementaire : c’est un avantage concurrentiel. Un fonds capable de tracer l’origine de chaque KPI, d’assurer la localisation souveraine de ses données et de déployer une IA fiable crée un climat de confiance avec ses LPs. À l’heure où l’Europe pousse l’AI Act pour l’été 2026 et plus de souveraineté numérique, éviter ces erreurs revient à faire de la data un moteur, et non un frein, dans la création de valeur