Manager ses commerciaux en temps de crise
En période de crise, les managers peuvent être tentés par un certain repli sur soi, symbole compréhensible d'une volonté de sauver ses propres acquis dans la tourmente.
Pourtant, c'est plus que jamais dans ces moments de turbulences qu'il faut jouer la carte du collectif, et oser prendre des risques. Les entreprises qui sortiront gagnantes sont celles qui auront su sortir des sentiers battus.
Faire de la mauvaise conjoncture une opportunité de défi collectif.
Des clients réticents, des
carnets de commande qui peinent à se remplir, des objectifs impossibles à
atteindre : en période de récession, les commerciaux se retrouvent inévitablement
sur la ligne de front. Difficile, pourtant, de monter au combat quand
l’ambiance est morose et que les perspectives sont absentes. C’est un
fait : la crise génère angoisse et incertitude. Pire, elle exacerbe les
tensions et pousse les collaborateurs dans leurs retranchements les plus
individualistes : on s’imagine que des têtes vont tomber et l’on tente
avant tout de sauver la sienne.
Il arrive, il est vrai, que les têtes tombent,
surtout dans les entreprises qui n’ont pas su anticiper la crise. Certaines
entreprises en profitent pour réajuster leurs effectifs aux nouvelles
contraintes de leurs marchés. Pour d’autres, malheureusement, il est trop tard
pour corriger le tir et le réajustement n’est plus une réponse suffisante… Et
il existe une troisième catégorie : des entreprises certes menacées, mais
pour lesquelles la « guerre » n’est pas forcément perdue. Car, même
quand la bataille fait rage, il existe des portes de sortie.
Jouer le collectif pour surmonter la crise
Pour ces dernières, c’est le
facteur humain qui va faire la différence, les éléments du process de vente
étant, eux, considérés comme constants. Il s’agit, avant tout, de redonner
l’envie, l’énergie, ainsi que cette ouverture aux autres inhérente à la
fonction du commercial, qui est au service du client. L’égoïsme et le repli sur
soi, mécanismes de défense instinctifs en temps de crise, doivent laisser la
place à la générosité et à la solidarité. Les individualismes doivent être
gommés au profit du collectif. Il vaut mieux pousser le plus grand nombre à
gagner petit mais beaucoup, plutôt que rechercher quelques super-vendeurs.
A
charge, donc, pour les directeurs commerciaux, d’identifier et de mettre en
place les leviers de motivation qui boosteront leurs
troupes. En promouvant, par exemple, l’idée fédératrice de challenge : si
une personne baisse les bras, c’est l’ensemble de l’entreprise qui en
pâtira ; chacun doit donc se dépasser pour sauvegarder la communauté dans
son entier. En somme, il faut convaincre les vendeurs qu’ils peuvent être des
héros, en faisant peser sur leurs épaules une pression positive. Il s’agit là,
ni plus ni moins, de passer d’une logique de survie à une logique de conquête.
Cela suppose de sortir des sentiers battus : les leviers classiques (rémunération, avantages, primes d’objectif), n’ont plus lieu d’être. L’heure n’est pas non plus au consensus mou. Il faut oser, prendre des risques. Le binômage des équipes peut être une solution. Envoyer deux vendeurs au lieu d’un à un rendez-vous commercial représente un coût conséquent, mais le bénéfice induit peut être non négligeable : à deux, on se sent moins seul, on est plus fort, donc plus persuasif. Sans compter que le partage des best practices s’en trouve facilité.
Jouer la carte du changement
Autre
option : la fusion des équipes. Prenons le cas d’une PME spécialisée dans
la fabrication et la vente d’un produit en particulier, les échafaudages et les
échelles, par exemple, de toutes les marques et de tous les prix. En toute
logique, elle a pour clients des enseignes de bricolage et des grossistes
professionnels. Imaginons que sa force de vente soit divisée en deux équipes
différentes, l’une étant dédiée aux produits moyens de gamme, l’autre, aux produits
hauts de gamme.
Dans cette configuration, on peut dire que les vendeurs sont
mono-produits. Or, en période de crise, il pourrait être intéressant de passer
à un modèle de vendeurs multi-produits, de façon à ce que chaque vendeur puisse
vendre tous les types de produits au même client. Il suffirait, pour le
directeur commercial, d’organiser le transfert de compétences entre les deux
équipes. Ce qui permettrait à ses commerciaux, désormais capables de
représenter l’ensemble de la gamme, de gagner en crédibilité.
Évidemment,
ce type de réorganisation comporte des risques : ce fabricant d’échafaudages et
d’échelles pourrait ainsi se trouver confronté à des vendeurs incapables d’acquérir
la double compétence. Sa nouvelle organisation pourrait également déplaire à ses
clients dont les interlocuteurs avaient l’habitude de travailler avec un
commercial en particulier. Mais le changement pourrait, au contraire, s’avérer
payant.
Non seulement pour garder le cap dans la récession, mais aussi pour
améliorer la performance du dispositif global. Car, en rationalisant les données
du problème, la crise peut induire des effets positifs : en révélant certains
déficits du process de vente (techniques inefficaces, procédures trop longues,
produits inadaptés au marché…), il arrive qu’elle fasse ainsi émerger des axes
de progrès.
Là encore, cela reste une question de courage : il appartient
au directeur commercial d’oser d’explorer ces nouveaux axes. Y compris,
pourquoi pas, en mettant en place une école de vente : une école plus
pragmatique, adaptée aux difficultés rencontrées par les vendeurs et inspirée
de leurs initiatives les plus créatives. Pour préparer l’avenir, sans attendre
la prochaine crise.