Entrepreneurs : les 10 illusions qui peuvent s'avérer fatales
Les entrepreneurs débutants ont vite fait de penser que ce qu’ils pensent ou ont cru avoir appris sur la réalité de la conduite des affaires correspond à la réalité. Voici 10 illusions qui font déchanter les entrepreneurs euphoriques.
1. « J’ai enfin réalisé mon rêve »
Ce n’est pas être un rabat-joie
que de dire que c’est maintenant que le plus difficile commence. En effet, il y
a une différence fondamentale entre le fait d’enregistrer son entreprise,
d’ouvrir boutique et de connaître les premières ventes et le fait de connaître
le succès en affaires. A moins que votre rêve se limite à juste créer votre
propre entreprise et de vous voir aux commandes, le simple fait d’avoir lancé
votre propre affaire ne correspond pas encore à la réalisation de votre rêve
d’entrepreneur. Une chose est de monter, l’autre est de pouvoir rester et
prospérer. La plupart des entrepreneurs qui réussissent à passer le cap du
lancement pensent en général que le plus difficile est déjà fait. Oui, si on
doit regarder le nombre de personnes qui n’arrivent pas franchir le cap du
lancement.
Non, si on doit considérer le pourcentage de gens qui ont réussi à
se lancer mais qui n’ont pas vu leur première anniversaire. Réussir à se lancer
est un cap de la réalisation du rêve. Briller, performer, se démarquer,
exceller, se développer et conquérir le monde sont bien d’autres caps…Pourquoi
ne pas regarder un peu au-delà du nez, éviter de dormir sur ses lauriers afin de ne pas tomber dans le piège que ceux qui prennent le débarquement pour le
couronnement de la victoire et finissent par déchanter trop tôt?
2. « Maintenant que je suis à mon propre compte, je ne dépendrai plus de personnes »
Si vous devenez entrepreneur, vous gagnez l’autonomie
de vos décisions en même temps que la
responsabilité de vos résultats. Et ce n’est qu’un début. Quant à penser un
instant que vous ne dépendrez plus de personne, c’est une illusion fréquente
chez les entrepreneurs débutants. Vous serez libre d’opérer les choix que vous
voulez mais l’efficacité de vos choix dépendent de plusieurs facteurs qui pour
la plupart sont externes. Vous dépendez de la performance de vos collaborateurs
même si vous pouvez fortement les influencer.
Vous pouvez influencer le banquier
par la qualité de vos projets et vos capacités de connexion et d’influence mais
votre banquier décidera en dernier ressort. Un entrepreneur qui pense qu’il ne
dépend en rien du système bancaire et du marché financier est tout aussi dans l’illusion. Vous pouvez
prendre les dispositions pour limiter les dégâts mais le monde des affaires est
d’abord fait d’interdépendance ; votre seul engagement et vos seules
dispositions ne suffisent pas toujours à vous mettre à l’abri des défis
systémiques.
Ne manquez pas de prendre des dispositions pour vous tirer
d’affaires, mais sortez de l’illusion assez tôt pour savoir que bien qu'indispensables, vos efforts peuvent ne pas suffire. Ce que vous devez savoir c’est
que vous pouvez être secoué à tout moment par les facteurs externes.
L’essentiel est de savoir tenir bon sachant que malgré la crise, tenir bon reste votre responsabilité à 100%.
3. « Je suis maintenant libre de faire ce que je veux »
Rappelez-vous ! Vous êtes libre de prendre les
décisions que vous voulez mais vous devrez assumer les résultats des décisions
que vous prenez. Souvent, on a vite fait de constater que la liberté est
vraiment un poids. La plupart des entrepreneurs débutants qui pensent qu’ils
peuvent tout se permettre comprennent trop tard qu’être entrepreneur c’est
assumer la responsabilité à 100% de ses résultats. Une fois qu’ils gagnent en
maturité (souvent une fois qu’ils ont dû fermer), ils témoignent :
« Si je devrais reprendre, il y a des erreurs que je ne commettrai
plus ». En effet, on n’a jamais la seconde chance d’éviter une erreur pour
la première fois. Une fois que vous la commettez, vous ne pouvez que l’éviter
la deuxième fois si vous êtes vigilant. Sachez qu’en matière de gestion
d’entreprise, il y a des règles dites "meilleures pratiques de gestion".
Elles ne
s’enseignent pas toujours à l’école mais vous pouvez les découvrir en prenant conseil,
en intégrant des communautés de partage de savoir, en lisant des livres
d’entrepreneurs et d’experts...Et parfois en apprenant sur le tas. N’oubliez
surtout pas que « toutes les erreurs ont été déjà commises, vous
n’avez pas besoin de les
recommencer » (Robin Sharma). Ne dites pas que vous allez échouer d’abord
avant de savoir comment réussir. Si vous pouvez apprendre à ne pas échouer et
vous réussirez à coup sûr.
4. « Une chose est sûre, je ne commettrai pas les mêmes erreurs que mon patron »
Si votre objectif est juste de ne pas commettre les mêmes
erreurs que votre patron, vous en commettrez bien d’autres qu’il n’a pas
commises. Pourquoi ? Justement parce qu’en matière de précautions à
prendre, celles qu’il n’a pas su prendre sont celles qui dominent votre
conscience. Pire, tout ce que vous
pensiez qu’il faisait de bien devient votre référence de comportement même si
ce sont des pratiques peu recommandables qui, remises dans votre contexte,
peuvent être pour vous des sources de défis. Vous venez juste d’atterrir. Vous
ne vivez peut-être pas encore les réalités auxquelles il a dû faire face. Quand vous les vivrez, il y a de fortes
chances que vous compreniez la complexité de ses
choix.
Personne ne choisit délibérément de prendre de mauvaises
décisions de gestion. On pense toujours être entrain de prendre la bonne
décision. Il n’y a que les résultats qui confirment si c’était une bonne ou une
mauvaise décision. Par ailleurs, ce que vous prenez pour la décision
alternative meilleure pourrait ne pas connaître de meilleurs résultats que les
choix de votre ancien patron. De grâce, libérez-vous de votre patron et voyez
les principes universels de gestion que vous devriez respecter au lieu de
continuer de vous laisser hanter par le défi de faire mieux que lui. Comme le
dit une sagesse orientale, "il n’y a rien de noble à vouloir mieux faire que
quelqu’un. La vraie noblesse, c’est de réussir à chaque fois à faire mieux
aujourd’hui qu’on n’en a fait hier".
5. « J’ai enfin intégré la classe des entrepreneurs »
Soyez le bienvenu (ou la bienvenue) ! Connaissez-vous
vraiment les conditions pour être un entrepreneur ? Pensez-vous vraiment
avoir rempli ces conditions ou vous prétendez plutôt les avoir remplies ?
J’ai rencontré la dernière fois un ancien entrepreneur qui a fait faillite et
qui a dû aller prendre un emploi(Rien d'anormal). « Je croyais que tu avais définitivement
intégré la classe des entrepreneurs ? Comment se fait-il que tu te
retrouves à nouveau employé? ».
J’étais plutôt trop naturel en lui posant
une question pareille mais il n’était pas choqué. Voici ce qu’il m’a
répondu : « C’est ce qu’on se dit une fois qu’on a réussi à créer sa
propre entreprise. Vous pouvez même intégrer les associations d’hommes
d’affaires, recevoir des trophées pour vos performances d’entrepreneurs... Mais
rien de tout ceci ne vous garantit que vous continuerez de rester dans la
classe des entrepreneurs… C’est une identité dont le droit s’acquiert plus
facilement qu’il ne se conserve. La bonne nouvelle c’est que vous pouvez
revenir à tout moment. Peut-être que je reviendrai bientôt ».
Devenir un entrepreneur n’est pas un cap qu’on atteint.
C’est un mode de vie, c’est un état d’esprit, c’est un engagement à prendre et
à respecter tant que vous le pouvez et le voulez… ce sont des performances… Le statut n’a
pas d’importance. Je connais beaucoup de gens jouissant du statut
d’entrepreneur qui n’entreprennent plus. Quoi donc ? Je connais des
entrepreneurs qui n’entreprennent plus rien. Alors ne confondez pas la coquille
avec le contenu. Si vous devenez entrepreneur, n’oubliez pas de continuer
d’entreprendre pour le rester avec toutes les contraintes et toutes les
facilités que cela suppose.
6. « Nous avons connu de bons débuts et nous espérons que ça se poursuivra »
Vos débuts peuvent parfois être très euphoriques. Le
principe est simple : tout s’explique en gestion. Si vous avez
d’excellents résultats, vous devez pouvoir savoir pourquoi vous connaissez un
tel succès. Est-ce lié à l’effet de mode ou de la nouveauté ? Avez-vous
vraiment réussi à apporter la solution que les gens attendaient depuis
longtemps et qu’ils n’espéraient pas pouvoir obtenir ? Êtes-vous entrain
de damer le pion à vos concurrents et définitivement ? Pensez-vous
vraiment que vos concurrents vont rester tranquilles sans rien faire ?
J’ai déjà entendu un jeune entrepreneur dire qu’il donnait de l’insomnie à ses
concurrents. « Vous ne pouvez pas imaginer. Pour un coup d’essai, c’est un
vrai coup de maitre. Mêmes les clients de leader du marché achètent désormais
chez nous ».
Quelques mois plus tard, il cherchait vainement des concepts
pour contrer la contre-offensive de ses concurrents. En réalité ce n’est pas la
lune de miel avec les clients qui aura été de courte durée, c’est sa capacité à
les tenir en haleine grâce à l’innovation constance qui lui a enlevé ses
clients. Ces derniers se sont lassés tout simplement de ses vieilleries
exactement comme ils se sont lassés précédemment des vieilleries de ses
concurrents au moment de son arrivée sur le marché.
Si vous avez un bon accueil, un grand défi vient de vous
être lancé. Vous devez refaire à chaque fois votre demande en mariage avec à
chaque fois une nouvelle offre de dot (innovation) pour être l’heureux élu (la
préférence de la clientèle) et faire durer la lune de miel (la satisfaction et
la rétention de la clientèle).
7. « Comme je suis au début, j’en aurai pas besoin »
« Vous savez, nous venons juste de nous lancer, nous
n’aurons pas besoin de formation du personnel pour le moment. Et puis, ils
viennent d’être recrutés ça ne fait même pas six mois. Nous allons voir les
résultats qu’ils vont produire et ensuite nous verrons s’ils ont besoin de
formation ». J’étais encore stagiaire dans un cabinet de formation quand
un entrepreneur qu’un chargé de clientèle en banque m’avait recommandé me
donnait cette réponse. J’avais pris mon mal en patience attendant le temps
qu’il sente le besoin de faire former ses collaborateurs. Trois ans plus
tard, alors que j’avais lancé moi aussi ma propre entreprise, je retrouvai
l’entrepreneur lors d’un diner de gala. « Alors, vous êtes prêt maintenant
pour former vos collaborateurs ? », lui avais-je demandé.
« Pardon ? » répondit-il.
« En effet, je suis Hermann H.
CAKPO. Je vous avais contacté huit mois après le lancement de votre entreprise
en 2004, vous m’aviez dit que c’était trop tôt. Alors, savez-vous maintenant
si vos collaborateurs sont performants ou non et s’ils ont besoin de formation ?»,
avais-je poursuivi. « Ah ! Vous savez, la plupart d’entre eux n’ont
pas fait un an. Vous savez les gens prétendent avoir des masters mais ils ne
sont pas capables de produire du résultat lorsque vous leur confiez des
responsabilités ». Sans commentairer!
Une entreprise doit être une entreprise en bonne et due forme même à son lancement. On vous recommandera de commencer petit mais ce ne sera que dans la taille. Cela ne voudra pas dire commencer sans un personnel bien formé, sans un entrepreneur informé, sans une comptabilité et avec une gestion informelle et improvisée,.. S’il vous plait, la norme ISO, ce n’est pas après que plusieurs clients ont été déçus ou que les premiers dommages (hygiène et sécurité) ont été causés. C’est avant ! C’est surtout pour les prévenir.
8. « On m’a dit que c’est comme ça que ça se passe »
Si les gens perdent en général trop de temps dans les
formalités administratives, ce n’est souvent pas parce que l’information
n’existerait pas ou ne serait pas accessible. C’est parce qu’au lieu de
s’adresser aux bonnes sources, ils préfèrent en général s’adresser non à des
gens qui auront effectué facilement ces formalités parce qu’ils disposaient de
l’information à jour mais à des gens qui ont eu toute la peine du monde à
trouver le bon filon sans jamais savoir quelle est la démarche exacte et officielle
à suivre. La débrouille fait partie des recours pratiques de
l’entrepreneur mais seulement lorsque la voie officielle est caduque.
En tant qu’entrepreneur, il va nous être difficile de bâtir
nos stratégies sur des suppositions, des « ont dit » ou des « Il
parait que… ». Nous avons la possibilité mais surtout le devoir d’aller
chercher, trouver et utiliser l’information, la formation et les outils à jour
et les plus efficaces au lieu de supposer. Il est plus facile de gagner du
temps de cette façon. Beaucoup de mauvaises pratiques se passent ainsi
entre les entrepreneurs alors qu’elles sont loin d’être celles qui permettent
de produire du résultat durable. Demandez et on vous dira, c’est comme cela que
ça marche. Selon qui donc ? Et personne ne saura vous répondre. Pas assez
crédible pour servir de base de décision. Enfin, je pense !
9. « Une fois que j’aurai tout l’équipement en place, je démarrerai vraiment mon offensive commerciale »
Les entrepreneurs iconoclastes n’attendent pas un certain
meilleur moment pour déclencher la réalisation de leurs ambitions. Ils se
comportent comme si et ils obtiennent les moyens de la réalisation de leurs
ambitions et finissent par les réaliser.
En tant qu’entrepreneur, vous serez disculpé pour avoir été prétentieux
pourvu que vous compreniez que cela puisse conduire à l’échec. Mais si vous
n’êtes pas suffisamment ambitieux pour prétendre à ce que vous
« méritez », vous ne saurez jamais si cela conduit à l’échec ou à
l’exploit. Lorsque vous démarrez votre entreprise, sachez qu’il n’existe pas un
certain meilleur moment pour réaliser le meilleur niveau de chiffre d’affaires
que vous puissiez réaliser. Nous sommes maintenant habitués aux premières
journées de vente aux 1 million d’unités sorties avec les fabricants de
tablettes et de Smartphones. Vous aussi vous pouvez prétendre à de tels exploits…Juste en étant un peu plus ambitieux et en agissant sans attendre...
Que font ces fabricants ? Ils démarrent la campagne
d’envoutement et d’endoctrinement avant d’avoir la première version d’essai du
produit. Ils l’annoncent comme s’ils l’avaient déjà testé avec succès. Ils nous
le font aimer comme si nous l’avions déjà essayé… Nous vivons satisfaits comme
si nous avions déjà bénéficié des avantages… Et lorsqu’il sort, nous avons comme
le sentiment d’avoir un devoir de nous l’offrir. Il est temps de taper dans ce
potentiel magique et d’arrêter d’attendre un certain meilleur moment pour
lancer sa machine commerciale. Vous le savez, face à une version beta
affreusement critiquée par le marché et un concept sur papier, l’investisseur
vous demandera toujours comment vous comptez prendre en compte les remarques
des experts et des utilisateurs pour faire de la version définitive un succès
commercial et financier. Si vous lui donnez la bonne réponse, il vous finance. Alors
n’hésitez pas à lancer votre machine d’envoutement du marché le plus tôt
possible. Les gens aiment ceux qui le prétendent et sont présents au détriment
de ceux qui hésitent et attendent. Vous avez votre entreprise, alors vous n’avez
plus rien à craindre. Le corridor des exploits est en face de vous.
Concentrez-vous sur ce qui va marcher et non ce qui risque de mal tourner. Entrez
dans le corridor. Quoi qu’il arrive on apprend plus à l’intérieur qu’à l’extérieur!
10. « J’ai pris toutes mes dispositions, tout ira bien »
Même moi je me suis dit la même chose lorsque j’avais
réussi à mobiliser le financement, avais recruté les meilleures employés que je
me suis attelé à former et avais pris les dispositions pour disposer d’une
autonomie financière me permettant de couvrir les charges sur six (6) mois…Une
fois que j’ai vu qu’aucune de ces précautions ne m’aura prémuni contre la crise
classique de la trésorerie, je m’étais donné un nouveau principe de gestion à
respecter en matière de prévision. « Il faut savoir prévoir également les
imprévues prévisibles mais surtout les imprévues imprévisibles ». Je
faisais toujours rire mes collègues entrepreneurs lorsque j’énonce ce principe.
Mais tout le monde devient toujours sérieux juste après. La question suivante suit
presque toujours ces interrogations silencieuses « Que faire alors que
certaines imprévues sont imprévisibles ? ». Quand j’ai la possibilité
de répondre, je reprends toujours : « Vous n’aurez jamais pris assez
de dispositions. Autant rester humble et continuer de prendre toutes les
dispositions que vous pouvez prendre ».
Si vous dites à un entrepreneur expérimenté que tout ira
bien et qu’il veut vous aider, il vous dira : « Et comment le
savez-vous ? » ou « Je vous comprends. Vous venez d’intégrer
notre univers. Mais laissez-moi vous dire que les choses ne se passent pas
toujours comme on le veut. Quelles dispositions concrètes allez-vous
prendre ? ». A peine, vous aurez répondu qu’il vous dira « Et
comment savez-vous que vos dispositions suffiront à garantir les résultats que
vous promettez ? ». Pas d’inquiétude. Il vous donnera le contrat mais
ce qu’il vous demande, c’est de rester un peu plus humble et de continuer de
prendre avant et au fur et à mesure autant de dispositions que possible en vue
du résultat.
Il y a un privilège à être un entrepreneur. Profitez-en toute humilité, continuez de rêver, continuez d'apprendre...
Et ne vous arrêtez jusqu'à que vous exploitiez totalement votre potentiel.