Transformer la gestion des fournisseurs : une étape vers plus de sens au travail

Dans le modèle actuel de l’entreprise, la gestion de la relation avec les fournisseurs et prestataires externes peut accentuer le sentiment de "perte de sens au travail". Quelles réponses apporter quand la motivation des salariés est devenue essentielle à la compétitivité des organisations ?

Imaginez une entreprise dont la membrane soit perméable ; une entreprise qui puisse inviter régulièrement des experts, des spécialistes, des personnalités indépendantes (freelances, start-ups, TPE…) à participer à sa réflexion ou à sa production ; une entreprise dont les projets associent ponctuellement les talents, internes et externes, offrant ainsi un environnement plus stimulant pour ses salariés grâce à la variété (et au renouvellement) des rencontres et collaborations ; soit une entreprise dont la structure, cadrée et réglementée, puisse être régulièrement parcourue d’un souffle rafraîchissant, propre à favoriser l’engagement de ses collaborateurs. Une telle entreprise, "ouverte", est possible et, au regard des évolutions actuelles en termes de rapport au travail et à l’emploi, elle est même plus que souhaitable.

Un sentiment de "perte de sens au travail" dans l’entreprise

En effet, le taux d’engagement des salariés en France, serait, selon une étude américaine publiée en 2018[1], l’un des plus faibles au monde. Au-delà du chiffrage (toujours discutable) d’un sentiment tel que l’enthousiasme éprouvé au travail, il est manifeste que la motivation des collaborateurs est devenue un véritable enjeu. Dans un environnement concurrentiel aux évolutions toujours plus rapides, la compétitivité des entreprises dépend étroitement du sens que les employés trouvent à leur action. Il leur permet d’apporter de nouvelles idées et de faire preuve de créativité dans leurs missions. Or, 55% de salariés interrogés dans le cadre d’une étude sur le "sens au travail" déploraient une perte de sens dans leur activité ; 82% estimaient également ne pouvoir dissocier sens et performance au travail.[2] Les jeunes diplômés figurent à l’avant poste de cette quête de sens puisque 92% considèrent l’intérêt de leur activité comme un critère primordial, passant devant la rémunération.[3] Quelles réponses pertinentes les organisations peuvent-elles apporter à cette demande tout en satisfaisant à des impératifs d’efficacité, de rentabilité et de compétitivité ?

Des freins procéduraux à l’autonomie et à l’innovation

On aborde aujourd’hui la question du sens au travail sous l’angle du "bien-être" (ainsi qu’en atteste la création récente du rôle de Chief Happiness Officer) ; ou bien encore, sous l’angle managérial (nouvelles méthodes, management bienveillant, etc.). Pourtant, si l’on souhaite lutter contre le phénomène de perte de sens au travail, il est devenu tout aussi nécessaire d’envisager les difficultés diverses que génère la gestion des relations avec les entités extérieures à l’entreprise. En effet, on ne peut à la fois encourager l’autonomie des salariés, leur force de proposition et leur créativité pour, ensuite, leur mettre des bâtons dans les roues s’ils souhaitent innover en s’associant à de nouveaux partenaires ! Si un collaborateur ou un chef de service détermine qu’il a besoin d’un ou de plusieurs intervenants extérieurs pour mener à terme un projet , si des collaborations indispensables sont freinées par des processus internes, comment peut-il rester motivé, voire simplement… atteindre son objectif ? Quel sens trouver à sa fonction si on lui refuse les ressources qui lui permettraient d’être efficace ?

Un volume de collaborations extérieures qui doit pouvoir augmenter sans entraves

Les systèmes de production actuels s’appuient sur une multitude de compétences et de savoir-faire portés par une myriade d’acteurs indépendants (prestataires, experts, free-lances, etc.). Cette évolution entraîne un accroissement sensible du volume des collaborations externes et ce, sans que la gestion de ces collaborations, c’est-à-dire, de la relation avec les prestataires et fournisseurs, n’ait évolué, ni ne se soit simplifiée. Rappelons qu’aujourd’hui, et particulièrement dans les grandes entreprises, le référencement d’un nouveau prestataire peut être un processus extrêmement long (chaque fournisseur demandant à être qualifié, sa valeur ajoutée mesurée, de même que ses compétences, sa réputation, sa solvabilité, etc.). Les délais actuels de collecte et de traitement des données affectent la réactivité des organisations autant qu’ils affectent la motivation de leurs équipes. Il est temps de réaliser qu’être en mesure de collaborer avec qui l’on souhaite, lorsque cela est nécessaire et dans de bonnes conditions, fait partie des prérequis propres à favoriser l’"engagement" des salariés.

Transformer la gestion des fournisseurs : une étape déterminante

Cette problématique de gestion fournisseur ne doit pas être négligée dans un contexte de quête de "sens au travail". Si l’on imagine qu’une grande entreprise ait besoin, à un moment clef, de faire appel à des centaines, (voire des milliers) de collaborateurs, fournisseurs et prestataires externes, quels outils et quels processus adopter pour maintenir une communication fiable et des échanges sans heurts, avec autant d’entités différentes ?

Transformer les outils et processus de gestion de la relation entre l’entreprise, ses fournisseurs et ses prestataires est une étape déterminante. Elle ouvre la porte à un modèle d’entreprise plus adapté à l’environnement et aux enjeux actuels : une entreprise véritablement "ouverte" dans laquelle fournisseurs et prestataires seront envisagés, non plus comme des sources de problèmes à gérer, mais comme de véritables partenaires. Une telle entreprise est possible et en mesure d’apporter à tous plus de satisfaction au travail, soit aussi… plus de sens.

[1] Etude Gallup – State of the global workplace, 2017.

[2] Sens au travail ou sens interdit, étude Deloitte-Viadéo, Décembre 2017.

[3] Baromètre "Talents, ce qu’ils attendent de leur emploi", IPSOS BCG-CGE, janvier 2018