Décentralisation : et si la crise réussissait là où la France a toujours échoué ?

Suite aux mesures de confinement prises il y a plusieurs mois plus d'un million de franciliens ont quitté la région parisienne. Une question s'est rapidement posée : que fait-on dans un environnement aussi dense ?

Que nous apprend cette crise, aussi extraordinaire qu’inédite sur notre écosystème et sur la manière dont est organisé le territoire ? Cette décentralisation contrainte et forcée se poursuivra-t-elle dans le monde d’après ? La crise, accélérateur de la décentralisation ? Souhaitons que ce soit le cas !

C’est un fait établi depuis des siècles en France, le pouvoir est à Paris : politique, économique, scientifique, technologique et universitaire, tous les centres de décision sont à Paris et les plus aventuriers ont simplement eu l’audace de franchir le périphérique pour s’installer à quelques kilomètres. De cette situation découle de nombreuses problématiques : transport saturés, hausse des prix du logement, qualité de vie en baisse, rêve de départ pour de nombreux Parisiens - une étude Hellowork sortie il y a moins d’un an révélait que plus de 2/3 des Franciliens cherchaient un emploi dans une autre région. Le jacobinisme français entraîne par ailleurs une difficulté de développement pour les différents territoires et créé un cercle vicieux difficile à enrayer : l’emploi et les talents se concentrent en Île-de-France, les entreprises choisissent donc ce territoire pour s’implanter, ce qui concentre encore plus les talents, et ainsi de suite.

A l’image de l’Allemagne, qui a su développer une dizaine de villes d’envergure en dehors de sa capitale avec un territoire et une population comparables à la France,  l’Etat français tente tant bien que mal, depuis des décennies, de décentraliser le pouvoir, avec des réussites plus ou moins relatives. Parmi les succès on peut penser à la création des Métropoles, aux ITR (Instituts de Recherche Technologique), à la portée de la French Tech de Lille, Montpellier, Nantes ou encore Strasbourg. Malgré ces avancées la France reste à quasi tout point de vue très centralisée et centrée sur Paris. 

Et si la crise que nous connaissons depuis deux mois était l’occasion de changer tout ça ? Plus de 5,1 millions de personnes seraient en télétravail, avec 1 salarié sur 3 qui est issue de la région parisienne selon une étude Malakoff Médéric Humanis. Les entreprises même les plus réticentes n’ont pas eu d’autre choix que de se réorganiser pour continuer à opérer  et surprise… cela fonctionne ! De quoi, peut-être, faire prendre conscience à tous les acteurs qu’ils peuvent se lancer. Car si le télétravail permet une décentralisation des entreprises il faut que tout le monde soit en phase : les employeurs bien sûr, qui s’ils ont fait de nombreux progrès depuis quelques années, ont encore pour certains du chemin à faire sur de l’équipement bien sûr mais surtout de la confiance dans le management, les employés, qui ont pu constater durant cette période qu’il était possible de travailler et de maintenir un lien social avec ses collègues même à distance, et enfin l’Etat, qui pourrait montrer l’exemple - rêvons d’un déménagement de l’Elysée dans la Drôme!  

Le télétravail ayant pu être également source de stress pour certains, il faut, maintenant qu’on a été nombreux à être obligés de s’y mettre, garder le meilleur de cette crise : oui nous pouvons travailler à distance mais non l’avenir ne se fera pas sans bureau et sans lieu de rencontre pour les employés. L’innovation et la créativité seront donc primordiales pour réussir ce pari de la décentralisation : bureaux satellites en régions, télétravail partiel, équipement performant pour entretenir une collaboration efficace et meilleure prise en compte des aspirations personnelles de chacun. A nous, entreprises de la tech, et de tous les secteurs le permettant, d’ouvrir la voie, de nous montrer avant-gardistes et d’offrir à nos salariés, à notre pays et à nos régions, un pays moins centralisé.