Énergie : chefs d'entreprise, directeurs financiers, comités exécutifs, tous mobilisés pour le futur de notre industrie

Crise énergétique  : quatre réflexions stratégiques à avoir dans vos entreprises afin de retrouver une certaine sérénité, nécessaire au pilotage d'une activité et à la mobilisation des collaborateurs.

Pas de doute, la crise énergétique que traverse l’Europe est la plus dévastatrice des 50 dernières années. Elle remet en question notre compétitivité au cœur de l’échiquier économique mondialisé. Pour contrer cette vague puissante, les PME et PMI françaises commencent à s’organiser. Mais le manque de visibilité budgétaire, induit par la structure et la volatilité des marchés libéralisés de l’énergie, représente une menace contre laquelle il est difficile de se prémunir. 

Pourtant, sur le front de l’approvisionnement en énergie, quatre chantiers prioritaires peuvent être menés rapidement afin de retrouver une certaine sérénité, nécessaire au pilotage d’une activité et à la mobilisation des collaborateurs. 

Développer la flexibilité pour limiter sa dépendance 

Les politiques énergétiques nationales ont bien changé en 30 ans. À l’époque, les contrats d’approvisionnement entre états se négociaient sur le long terme (20 ans). Aujourd’hui, ils sont négociés pour deux ou trois ans. Ce changement a complexifié la tâche des acteurs du secteur et des acheteurs dans les entreprises. En effet, ce temps court n’est pas compatible avec la conception de plans industriels d’envergure, d’investissements dans des programmes de développement de fond ou de reconversion.   

Heureusement, des solutions techniques pour se prémunir de la volatilité des marchés et réduire sa dépendance : bivalence des machines, stockage sur site d’hydrocarbures liquides, réorganisation et flexibilisation de la chaîne de production, investissement dans la production électrique in situ. Il s’agit de solutions sur le long terme qu’il est nécessaire d’évaluer, de quantifier et de prioriser. 

Du côté de la fourniture d’énergie, la priorité doit être donnée à la compatibilité des mesures techniques prises avec les engagements contractuels imposés par le fournisseur. Par exemple, nombre de contrats de fourniture de gaz ou d’électricité impose des volumes minimaux ou maximaux afin de limiter les coûts. Ceci est la garantie d’un prix stable, ce qui permet de lisser la part énergie dans la gestion de la trésorerie, malgré une variation de consommation d’un mois sur l’autre. A contrario, ce mode de fonctionnement présente de nombreuses limites : comment organiser la conversion momentanée d’une machine du gaz naturel vers le fioul, si le contrat de fourniture de gaz naturel pénalise ce comportement  ? Pourquoi réduire de 2°C le chauffage des bureaux en journée aux heures de prix bas si le prix ne change pas  ? Un changement de paradigme est donc à opérer côté décideurs : stabilité et verrouillage du prix versus valorisation économique directe des comportements vertueux.

Anticiper, très en amont, les changements de contrat 

Nombre de PME et PMI n’ont peu ou pas évolué dans leur politique de renouvellement de contrat de fourniture. Souvent poussées par des impératifs de budgétisation et donc essentiellement liées à des processus internes, les négociations avec les fournisseurs d’énergie ne sont entamées parfois que quelques mois seulement avant la livraison du premier kWh.  

Pourtant, la composante temps est essentielle pour la sécurisation d’un prix attractif. Le processus de contractualisation s’envisage dans la durée. Il est recommandé d’utiliser tout l’horizon disponible, souvent 3 ans, pour commencer à mettre le marché en observation et définir la meilleure stratégie à adopter.  Pour les clients de plus de 5 GWh annuels en particulier, cette veille continue est essentielle afin de capter les périodes attractives et répartir judicieusement leurs interventions. Que les petits consommateurs se rassurent : il existe des solutions d’achats groupés en délégation afin de faire jouer l’effet volume tout en diversifiant le timing des opérations de marché.

Diversifier son portefeuille d’approvisionnement 

Dans une optique de diversification d’un portefeuille d’approvisionnement, le Power Purchase Agreement (PPA) ou contrat de vente directe d’électricité entre producteur et consommateur, est souvent prisé par les grands industriels. Ces contrats peuvent en effet être des atouts pour certaines organisations, car ils offrent une sécurité d’un point de vue budgétaire. Conclus à prix fixes, ils donnent une visibilité à long terme, en général sur 5 ans a minima.  

Si, le plus souvent, ils ne suffisent pas à couvrir intégralement les besoins, ils permettent cependant de lisser une partie du budget sur un horizon bien supérieur à ce qu’offrent les marchés actuellement. Constructeurs et exploitants d’installations de production, notamment d’origine renouvelable, sont de plus en plus friands de ces mécanismes, car ils représentent un nouveau débouché leur permettant d’accélérer le déploiement de leurs solutions.  

Aujourd’hui, les décideurs ont tout intérêt à se demander si une part de l’énergie à un prix fixé de 100 €/MWh sur 5 ou 10 ans (complétée par le recours au marché lorsque nécessaire) ne possède plus d’attrait qu’un pilotage à trois ans soumis aux aléas des prix de l’énergie…  

Suivre avec attention la réglementation et les mécanismes de soutien 

L’ARENH, tant décriée depuis son introduction, représente aujourd’hui une bouée de secours quasiment incontournable pour bon nombre d’entreprises. Mais sa mise en œuvre et ses multiples modifications ont largement complexifié son utilisation et sa déclinaison opérationnelle. Ce mécanisme, voué à disparaitre originellement dans les 3 ans, pourrait cependant se pérenniser avec l’incursion du politique dans les mécanismes des marchés de l’énergie. La mobilisation à bon escient des clauses contractuelles du fournisseur représente donc un levier économique de taille pour améliorer son budget. 

De même, les propositions récentes de l’Europe pour répondre à la crise actuelle sont techniques. Les mécanismes de soutien ne ruissellent pas immédiatement jusqu’aux premiers concernés… Un effort administratif conséquent doit être effectué pour faciliter l’accès à ces fonds, pourtant souvent critiques pour le maintien de l’activité des bénéficiaires.  

Une veille consciencieuse, le décryptage circonstancié et l’étude au cas par cas permettront sur le court-terme de mobiliser les moyens nécessaires. Plus que jamais, l’accès à l’information est urgent, sa bonne interprétation essentielle et ses modalités d’application stratégiques !