Pour innover, sachez être libre

Innover demande une indépendance d’action, la volonté d’oser et une innocence généreuse pour transgresser certaines règles établies. Lorsque les trois sont réunies, le résultat est magique.

Un jeune ingénieur me racontait que lors de son stage de deuxième année, alors qu’il traversait un couloir de la société, il a été attiré par une porte entr'ouverte. Il est entré et a commencé à discuter avec la personne présente, plutôt sympathique. À la fin de cette conversation animée sur l’entreprise, le jeune stagiaire a demandé à son interlocuteur qui il était. «Je suis le PDG.» Un an plus tard, il était embauché. Il ne s’agit pas de culot, mais d’une curiosité créative alliée à de la naïveté qui permet de transgresser les tabous sociaux d’autant plus qu’à un certain âge, on ne les connaît pas encore.

Autre exemple. Prenez deux jeunes ingénieurs du même bureau d’études d’une PME. L’un est donneur d’ordre, l’autre est sous-traitant pour une société de services. Bien qu’ils travaillent ensemble, aient le même salaire et la même fonction, on confie au premier le soin de concevoir et d'initier, alors que le second n'a qu'un rôle d’exécutant. Ces deux ingénieurs peuvent échanger. Pourtant, dans la pratique, le second va vite tourner en rond et se démobiliser. Quelle porte peut-il pousser ? Avec qui peut-il parler sans frein ni limite de ses impressions, de ses idées. Le premier, au contraire, en tant que donneur d’ordre participe à des réunions de prospective, réfléchit aux caractéristiques du produit de 2020, écoute les attentes du marché. 90 % de ses idées n’aboutiront pas, mais les autres 10 % verront le jour à travers la création d’un avion, d’une carte à puce ou d’un nouveau service.
La différence de destin, d’efficacité et de satisfaction de nos trois ingénieurs repose sur les trois degrés de liberté dont ils jouissent. Le premier a la liberté de penser, d’échanger avec les personnes que les hasards de la vie font croiser son chemin. C’est la «liberté du symbolique» qui permet de comprendre l’inconnu : comment ça marche, et surtout pourquoi ça ne marche pas. 

Suivez votre intuition

Le second a la liberté de concevoir, de créer, de se projeter dans l’avenir, de trouver des solutions : c’est la «liberté de l’imaginaire». Il a du temps, il peut essayer, recommencer. Il a droit à une marge d’erreur. Le troisième n’a que trop peu de liberté d’agir et est enfermé dans des normes plutôt que de pouvoir les utiliser. Au contraire, lorsque le premier pousse la porte, il s’autorise une transgression inspirée par le désir de savoir. C’est la «liberté du réel». Celle qui permet d’attraper quelque chose de solide et de nouveau, d’imprévu, d’inattendu surtout, même si c’est au prix de devoir déranger.

Quand ces trois libertés sont réunies, le résultat est magique : alors advient l’innovation. Comme l’écrivait Léonard de Vinci : «Concevoir est l’œuvre du maître, exécuter, l’acte du serviteur.» Alors n’hésitez pas à pousser la porte. Suivez l’intuition qui vous rendra heureux.