Tout ce que nous pensons savoir sur l’engagement des employés est faux (ou presque)
Ce n’est pas seulement en créant de la relation, voire de l’empathie entre managers et employés qu’on rendra ces derniers engagés dans leurs missions. Les ingrédients indispensables sont la confiance, les valeurs et le sens que donne la compréhension de la mission de l’entreprise.
Les ingrédients indispensables sont la confiance, les valeurs et le sens que donne la compréhension de la mission de l’entreprise. L’approche du monde des affaires visant à gérer l’engagement des employés suit une mauvaise recette depuis
des années.
« Mauvaise recette », dans le sens où les cadres dirigeants
demandent aux managers d’«améliorer l’engagement» de leurs employés en les conviant
plus souvent à des déjeuners d’affaires.
Les statistiques des enquêtes
confirment notre ignorance sur l’engagement. Pendant plusieurs années, le taux
d’engagement des employés a diminué malgré les millions de dollars investis par
les entreprises pour remonter le moral défaillant du personnel. Les experts et
spécialistes en matière d’engagement poursuivent leurs efforts louables et
sensés visant à encourager les entreprises à se concentrer davantage sur leur
engagement et à l’améliorer. La plupart de ces professionnels ont fait preuve
de beaucoup de sérieux dans leurs approches.
Ceci étant dit, les résultats ne
devraient-ils pas s’améliorer ? Malheureusement, une récente enquête menée par
Towers Watson a indiqué que près de deux tiers des employés américains ne
s’impliquent pas totalement dans leur travail, ce qui entraîne une baisse de
leur productivité. En réponse aux résultats d’enquêtes de ce type, les cadres
supérieurs exhortent les directeurs à passer encore plus de temps avec leurs
employés.
Mais qu’arrive-t-il si le déjeuner
qu’ils partagent s’avère hypocrite, ennuyeux, banal, voire désagréable? Et si
ce moment supplémentaire que les employés passent avec leurs managers se révèle
tortueux et mondain au lieu d’être une source de motivation, de coopération et
de travail constructif? Nous ne connaissons que trop bien la suite: l’engagement
des employés continue à chuter, comme c’est le cas depuis des années. Une fois
de plus, nous avons appliqué une solution de « How much» (combien) à un
problème de « HOW» (comment).
La fréquence
des déjeuners, des analyses de performance, des sorties dans le cadre du
programme de bénévolat et des exercices de cohésion d’équipe n’améliore pas le
niveau d’engagement des employés. L’engagement des employés dépend de la qualité et du sens de ces interactions, et du projet que les dirigeants
proposent à leurs employés.
Grâce à une analyse statistique
beaucoup plus approfondie portant sur plus de deux millions d’observations effectuées
sur le lieu de travail auprès d’employés du monde entier, nous avons appris
deux choses :
A) Des qualités organisationnelles
spécifiques doivent être présentes en grande quantité et véritablement animer
le leadership, la prise de décisions et le comportement dans l’ensemble de
l’entreprise afin de créer des employés « super-engagés »,
B) Comparativement aux autres
employés, les employés super-engagés démontrent de nombreux « traits d’engagement »
plus spécifiques. Notamment le désir d’effectuer une plus grande part de
travail, plus de loyauté, une plus grande volonté à recommander leur société en
tant qu’employeur de qualité, des efforts pour aider et encourager d’autres
personnes au sein de l’entreprise par le biais d’actions et de commentaires
concrets, etc ...
Il s’agit d’un moment historique dans
le domaine de l’engagement des employés: nous avons découvert ce qui encourage
réellement les employés. La source de cet engagement ne dépend pas des
déjeuners partagés, mais plutôt de la façon dont la confiance, les valeurs et
la mission inspirent et dirigent réellement les activités et les interactions au
quotidien.
Ces facteurs représentent des leviers
beaucoup plus subtils et beaucoup plus complexes. Ils sont cependant aussi quantifiables
et valides d’un point de vue statistique. Ma société, LRN, a mené une analyse statistique
indépendante sur le fonctionnement réel du travail au sein d’entreprises de
petites et grandes tailles, à partir d’une longue et rigoureuse étude empirique
d’observation de 36 000 employés dans 18 pays, dirigée par le
Boston Research Group, The Center for Effective Organizations de l’université
de Californie du Sud et Research Data Technology, Inc.
Lorsque ces observations
ont été soumises à des analyses multivariées (en résumé, l’observation et
l’analyse simultanée d’un très grand nombre de résultats), les mêmes résultats
ont chaque fois été obtenus.
Quand la confiance, les valeurs et une mission
ciblée sont présentes à un niveau statistique significatif, et qu’elles guident
le leadership, la prise de décisions et le comportement, ces « composants »
créent des groupes extrêmement motivés d’employés super-engagés.
Cette analyse révèle également que si
la confiance, les valeurs et une mission ciblée n’encouragent pas le
comportement au sein d’une entreprise, ces traits d’engagement sont nettement
moins présents. Pire encore, des niveaux extrêmement faibles de ces sources
d’engagement produisent des groupes d’employés « déconnectés », qui
travaillent contre les objectifs de l’entreprise, voire les sabotent.
Chaque
organisation possède une certaine réserve de confiance, de valeurs et de
mission. Cependant, la recherche montre que les entreprises comptant des
employés super-engagés traitent ces facilitateurs de base comme des réacteurs. Quand
ces réacteurs « chauffent », ils produisent des employés vraiment
inspirés, qui veulent construire des cathédrales au lieu de se contenter de
poser des briques.
Notre approche actuelle envers
l’engagement des employés ne produit que des poseurs de briques: des
personnes qui effectuent des tâches pour l’argent ; des personnes qui
peuvent se montrer plus productives sur une courte durée dans leurs tâches
grâce à des récompenses exceptionnelles, des bonus ou d’autres motivations
(dont les effets positifs ne durent pas) ; et des personnes qui se sentent
coincées dans des postes peu
satisfaisants et sans perspectives alors que ce qu’elles recherchent est une carrière.
En fait, nous sommes confrontés à ce
que j’appellerais une « crise des carrières » déclarée, mais dont on
parle peu. Étant donné qu’autant de travailleurs demeurent insatisfaits, non
productifs et, pire encore, déconnectés dans des postes non motivants et basés
sur des tâches, qui ne favorisent ni l’innovation, ni la prise de risques bien
informée qui stimule la croissance et crée des emplois plus constructifs et
plus significatifs ; des emplois dont notre pays a besoin.Il est temps de
passer des postes basés sur les tâches à des missions basées sur les valeurs.
Une mauvaise compréhension, une mauvaise
gestion et une mauvaise mesure de l’engagement des employés ne permettent pas
de donner un signal clair aux ressources les plus importantes de notre
pays: les jeunes travailleurs. Ces personnes doivent savoir où investir
leur énergie, leur talent, leurs compétences, leur caractère et leur
créativité. Elles cherchent des carrières, mais nous n’avons que des postes à
leur proposer.
En comprenant la véritable source des travailleurs super-engagés, nos
entreprises et leurs dirigeants pourront prendre leur déjeuner d’affaires tout
en savourant ce qu’ils mangent, au cours de sessions qui seront également
collaboratives, inspirantes et productives.
De plus, en utilisant la confiance, les valeurs et une mission ciblée comme
principaux moteurs pour toutes les activités, interactions et décisions
d’affaires, les entreprises peuvent transformer une main-d’œuvre de poseurs de
briques en une équipe motivée et coordonnée de bâtisseurs de cathédrales, dont
le travail inspiré génère à la fois réussite et sens pour les entreprises, et
plus généralement pour l'ensemble du monde.
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Cet article a initialement été publié sur www.forbes.com