Réforme de la formation professionnelle : les principales mesures
Le 6 septembre 2018, le texte de la réforme de la formation professionnelle a été publié au Journal Officiel. Le fonctionnement du CPF et des OPCA est profondément modifié.
La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel est entrée en vigueur au 1er janvier 2019. Elle modifie la gouvernance du système de formation et les relations entre les acteurs.
Synthèse des principales mesures de la réforme de la formation professionnelle
- Le compte personnel de formation (CPF) a été modifié. Le CPF, qui a remplacé le droit individuel à la formation DIF en 2015, n'est plus alimenté en nombre d'heures mais en euros, et tous les professionnels en bénéficient, qu'ils soient salariés ou indépendants. Ce compte est abondé de 500 euros par an pour un travailleur indépendant ou un salarié à temps complet, 800 euros pour les personnes sans qualifications. De plus, par accord d'entreprise, les employeurs peuvent verser un supplément financier au compte. Par ailleurs, il a été créé une application mobile pour la gestion de son CPF, et un CPF de transition, pour les professionnels qui ont un projet de formation longue mais n'ont pas de crédits suffisants sur leur compte pour le financer. Les salariés peuvent en outre directement s'adresser aux organismes de formation, ce qui revient à supprimer le rôle d'intermédiation des OPCA (organismes paritaires collecteurs agréés)
- Les OPCA se voient attribuer de nouveaux rôles, n'ayant plus de fonction d'intermédiaires entre les salariés et les organismes de formation. Ils sont désormais en charge de la collecte toutes les cotisations obligatoires, conventionnelles ou volontaires ; du financement du compte personnel de formation (sauf en cas d'accord d'entreprise) pour les salariés ; de la vérification de la qualité des formations financées - ils peuvent à ce titre exiger que les organismes de formation fournissent différents éléments. Ils contribuent également au financement des formations des salariés, et sont présentés comme un interlocuteur privilégié des employeurs sur tous les sujets concernant la formation professionnelle
- L'offre de formation a été élargie, avec entre autres une plus grande prise en compte de la formation à distance
- Il a été créé des opérateurs de conseil en évolution professionnelle, pour aider à la constitution de son projet d'évolution professionnelle et à l'accès à la qualification et à la formation. Sur l'ensemble du territoire, les opérateurs désignés sont : Pôle emploi, Missions locales, Cap emploi, Opacif, Apec et les opérateurs désignés directement par les régions
- Il a été créé un mécanisme dédié à la reconversion par l'alternance appelé PRO-A, qui remplace les périodes de professionnalisation
- Une place prépondérante est accordée à l'apprentissage, et ce marché est désormais ouvert à l'ensemble des organismes de formation qui souhaitent dispenser des actions de formation par apprentissage. L'apprentissage est par ailleurs désormais ouvert jusqu'à l'âge de 29 ans révolus
- Il a été créé la contribution unique à la formation professionnelle, remplaçant la contribution à la formation professionnelle et la taxe d'apprentissage. En pratique, les caractéristiques restent globalement les mêmes. Son montant dépend du nombre de salariés. Par ailleurs, l'Urssaf collectera cette taxe au plus tard le 1er janvier 2022.
- Le plan de formation a été simplifié. Notamment, il est désormais sous la responsabilité de l'employeur qui, pour les entreprises de plus de 10 salariés, décide librement des montants affectés. Une contribution unique réduite est collectée chaque année auprès de l'ensemble des employeurs pour financer des formations qualifiantes au bénéfice des salariés. Chaque employeur est ensuite libre de mettre en place les plans de formation qu'il estime les plus adéquats pour son entreprise.
- L'agence France Compétences a été créée. Elle est gérée par l'Etat, les régions et les partenaires sociaux. Son rôle est notamment de réguler les prix et la qualité des formations, répartir les fonds mutualisés aux acteurs de la formation professionnelle et de l'apprentissage, émettre des recommandations sur les coûts, les règles de prise en charge et l'accès à la formation, veiller à la bonne exécution de la réforme sur la formation professionnelle et l'apprentissage.
La loi régit différentes actions qui permettent le développement de compétence des travailleurs : actions de formation, bilan de compétence, validation des acquis de l'expérience, apprentissage. Elles doivent s'inscrire dans un parcours pédagogique dans le but d'atteindre un objectif professionnel.
Une entreprise peut organiser la formation de ses salariés ou recourir à un prestataire externe.
Quelles modalités de formation pour les salariés ?
Les salariés peuvent se former dans trois cadres :
- A l'initiative de l'employeur, éventuellement dans le cadre d'un plan de développement des compétences.
- A l'initiative du salarié, qui peut mobiliser son CPF, pour mener un projet de transition professionnelle, effectuer un bilan de compétences, recourir à la VAE. Il peut aussi se former sur ses fonds propres dans le cadre d'un contrat de formation professionnelle.
- Dans le cadre de l'alternance, avec les contrats de professionnalisation et les contrats d'apprentissage.
Dans tous les cas, les salariés peuvent se former en partie ou complètement durant leur temps de travail. Les formations obligatoires sont considérées comme du temps de travail effectifs et sont rémunérées comme telles. L'accord du salarié est indispensable et doit être formalisé par écrit.
Quelles sont les obligations pour les employeurs ?
Selon l'article L. 6321-1 du Code du travail, l'employeur doit organiser la formation de ses salariés dans les cas suivants :
- Tout au long de l'exécution des contrats de travail : l'employeur a l'obligation de faire en sorte que les salariés s'adaptent à leur poste de travail. Il doit aussi s'assurer qu'ils gardent leur capacité à occuper un emploi, et soient formés quant à l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Lors de suppression d'emplois, l'employeur a l'obligation de reclasser les salariés et de faire en sorte qu'ils s'adaptent à leur nouvel emploi, via une formation adéquate et suffisante.
- Suite à une embauche en contrat en alternance : l'organisation de la formation s'impose à l'employeur, qui doit laisser le salarié suivre les actions de formation prévues
- Lorsqu'un accord ou la convention collective applicable à l'entreprise prévoit des périodes de formation obligatoires (après une mutation, un congé de longue durée…)
- Si le contrat de travail d'un salarié contient l'engagement de l'employeur de le former.
L'obligation de l'employeur en matière de formation s'accompagne dans ces cas de l'obligation du salarié de suivre la formation.
Par ailleurs, les entreprises ont l'obligation de contribuer au financement de la formation professionnelle et de l'apprentissage, par une contribution financière devenue unique, calculée sur leur masse salariale. Elle est versée à des organismes spécialisés : les opérateurs de compétences organisés par branches d'activité. À partir de 2022, cette contribution sera versée à l'Urssaf.
Ces fonds assurent la prise en charge des coûts de formation des salariés des TPE (moins de 50 salariés) et des coûts des formations en alternance (professionnalisation et apprentissage).
Contrôle de la qualité des organismes de formation
Tout organisme de formation professionnelle doit disposer d'un numéro d'enregistrement attribué par l'administration. De plus, la qualité des organismes de formation doit être assurée. Les OPCA peuvent vérifier qu'une formation est d'une qualité suffisante et remplit bien son rôle. Par ailleurs, au 1er janvier 2022, tous les organismes de formation souhaitant que ses prestations de formation soient éligibles au versement de fonds publics ou mutualisés (à l'exception des établissements d'enseignement supérieur) devront obtenir la certification qualité Qualiopi. Les organismes de certification doivent avoir accrédités par le Comité français d'accréditation ou par France Compétences.
Les organismes de formation doivent satisfaire sept critères pour être certifiés Qualiopi :
- Information du public sur les prestations, les conditions et les résultats
- Identification des objectifs et l'adaptation aux besoins des bénéficiaires
- Adaptation aux bénéficiaires de l'accompagnement
- Adéquation des moyens aux prestations
- Qualification et développement des compétences et connaissances des personnels
- Investissement dans son environnement professionnel
- Recueil et la prise en compte des remarques des parties prenantes.
Ces sept critères se déclinent en 32 indicateurs spécifiques qui composent le référentiel national.
Retour sur le calendrier de la réforme de la formation professionnelle
Lors d'un discours sur la formation professionnelle prononcé à Angers le mardi 28 février 2017, le président de la République avait déclaré : "De nouveaux métiers vont être en crise, vont se transformer. Il ne faut pas dire qu'il faut préserver les emplois d'hier, il faut dire que l'on va vous réarmer pour traverser ces changements et vous former pour aller vers de nouveaux métiers". Au cours de la campagne électorale, l'actuel chef de l'Etat avait promis d'investir 15 milliards d'euros en cinq ans dans la formation professionnelle.
Le 14 juin 2017, la ministre du Travail Muriel Pénicaud a annoncé que le plan d'investissement serait lancé à l'automne 2017 lorsque la réforme du Code du travail serait effectivement promulguée. Le mercredi 23 août 2017 lors d'un déplacement en Autriche, Emmanuel Macron a confirmé la mise en place de cet investissement : "Nous allons investir massivement sur les qualifications pour sortir d'une économie qui subventionne l'emploi précaire pour rentrer dans une économie qui va reformer tout au long de la vie les individus. Nous allons effectivement dépenser durant le quinquennat près de quinze milliards d'euros dans la formation des travailleurs peu qualifiés et des jeunes qui sont loin de l'emploi". De son côté, Muriel Pénicaud, ministre du Travail a confirmé le 19 septembre sur France info, que le gouvernement allait "augmenter nettement le budget de la formation professionnelle pour lutter contre la précarité et créer des emplois. On va faire un vaste plan d'investissement dans les compétences".
Les partenaires sociaux ont fait des propositions au gouvernement dans un accord national interbranche (ANI) dévoilé le 22 février 2018. La ministre du Travail Muriel Pénicaud a jugé que sur plusieurs points, l'accord n'allait pas assez loin. Selon elle, c'est un "big bang de la formation" qu'il fallait mettre en place. La ministre a dévoilé les annonces et le calendrier lors d'une conférence de presse le lundi 5 mars 2018.
Le projet de loi a été présenté en Conseil des ministres le 27 avril 2018. Il a été discuté par le Parlement à partir de juin 2018, adopté à l'Assemblée Nationale le 19 juin 2018, au Sénat le 16 juillet 2018, puis en dernière lecture à l'Assemblée Nationale le 1er août 2018. La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a été promulguée le 5 septembre 2018. Elle traite également de l'apprentissage et de l'assurance chômage.