Formation des professionnels de la sécurité : miser sur la réalité virtuelle ?

En France, la priorité va au déploiement de policiers sur le terrain et la formation dure moins d'un an. Or ils auraient beaucoup à gagner à suivre d'une formation plus longue afin d'être mieux préparés.

La protection commence par l’analyse et l’apaisement

Protéger la vie et les citoyens consistent avant tout à apaiser les situations conflictuelles. Le dialogue est la première étape, ensuite les équipements (caméras-piétons, gilets, pistolets ou armes) et leur bonne utilisation s’avèrent indispensables. Être formé permet d’acquérir les bons réflexes en fonction du type de personne en face de laquelle se retrouve l’agent. Selon une étude*, chaque mois plus de 90 % des officiers en patrouille rencontre en moyenne 6 personnes atteinte d’un trouble cognitif ou en état de crise.

Cette personne est-elle autiste ? Est-elle dépressive ? Risque-t-elle de se mettre en danger volontairement ou de le faire avec autrui ? Comment réagir ? Le métier prend de plus en plus une dimension sociale et les forces de l’ordre sont souvent appelées pour gérer ce type de crise. Ce sont autant de rencontres auxquelles il faut être préparé.

L’agent doit agir en rempart pour protéger la vie humaine, ainsi, tous ses actes et ses paroles doivent aller dans ce sens. Appréhender l’environnement, être attentif aux détails pour analyser la situation et adapter sa posture sont des actions primordiales pour un agent sur le terrain et font partie intégrante de sa formation initiale. Faire face à un collègue qui « joue le jeu » ou face à un personnage qui reproduit exactement l’attitude d’une personne en crise sont des situations différentes. Autant privilégier la mise en situation réelle afin d’avoir une formation optimale, faire preuve d’empathie et réagir en conséquence.

Faire de la formation une expérience marquante

Aujourd’hui, les casques de réalité virtuelle (RV) sont associés à des jeux vidéo. D’aucun pourrait penser que les utiliser dans le cadre d’une formation avec des agents des forces de l’ordre revient à céder à la tentation de la « gamification » désormais très tendance dans les entreprises. Toutefois, des études** ont montré qu'au bout d'un an, les policiers retiennent jusqu'à 80 % de ce qui leur est enseigné dans une formation en réalité virtuelle, contre 20 % avec les méthodes d'enseignement traditionnelles. La sécurité est un enjeu de taille, pourquoi se priver de la technologie quand on sait l’importance de la formation des agents chargés de protéger la population ?

Proposer une véritable immersion dans divers scénarios, dispensée en vidéo à 360° avec un casque de RV, est une méthode innovante qui s’avère efficace aussi bien dans le cadre de la formation initiale que de la formation continue. Si elle est déjà utilisé par des équipementiers pour former les agents à l’utilisation du matériel, on peut (et devrait) imaginer une généralisation pour la formation de tous les professionnels de la sécurité afin de développer davantage les compétences dont ils ont besoin pour apaiser ou maitriser les situations délicates.

Une méthode d’apprentissage validée par les neurosciences

Le métier est en évolution permanente et l’absence de monotonie participe à son attractivité mais aussi à sa difficulté. La société change au rythme des nouvelles technologies, ainsi se les approprier va dans le sens de l’histoire pour en tirer tous les avantages notamment pour améliorer le quotidien et les outils de travail. La neuroscience a prouvé que l'activité qui se produit dans le cerveau lors du visionnage d’une vidéo à 360° est le même type de réponse cérébrale que celle qui se produit lors de la découverte d’un nouvel endroit. C’est pourquoi la RV déclenche plus de zones d'écriture de mémoire du cerveau lors de l'interaction avec un nouvel environnement qu'elle ne le fait en observant simplement un environnement familier. Il en résulte que l’agent qui en fait l’expérience comprend et mémorise mieux le message dans l'expérience***.

Être préparé à tout type de situation permet aux agents d’être dans un état d’esprit plus serein, de se concentrer sur leur présence et les interventions sur le terrain avec moins de pression. C’est également une part intégrante de leur sécurité et un atout pour renforcer la fluidité des relations entre forces de l’ordre et citoyens.

*Cordner, 2006

** Source : Centre Masie pour l'apprentissage, la technologie et l'innovation

***Stanford News