Diaa Elyaacoubi (Présidente d'Esprits d'entreprises) "Il faut prendre conscience que les entreprises, ce n'est pas que le Cac"

Où en est la santé des PME françaises ? Quelles mesures seraient nécessaires pour les soutenir ? La présidente du think tank Esprits d'entreprises dresse l'état des lieux. Un mot d'ordre : la sérénité.

Un mois et demi après l'annonce du plan de relance, comment se porte le tissu des petites et moyennes entreprises françaises ? C'est ce qu'examine de près le club d'entrepreneurs Esprits d'entreprises, qui essaie de faire entendre la voix des plus petits auprès du ministère de l'Economie. Pour cela, ce think tank a mis en place un observatoire du financement des PME durant la crise. Les premiers résultats seront connus en mars. Sa présidente, Diaa Elyaacoubi, par ailleurs présidente de Streamcore System, livre son bilan de mi-parcours.

Le think tank que vous présidez a remis fin novembre une liste de dix propositions concrètes pour aider les PME à faire face à la crise. Où en est-on aujourd'hui, sur le terrain ?

"La loi TEPA est une très bonne initiative qu'il faut renforcer. Encore faut-il que l'argent arrive jusqu'aux entreprises"

Diaa Elyaacoubi. Le plan de soutien va dans le bon sens et Hervé Novelli joue un rôle moteur. Les PME sont un maillon fragile de l'économie et nous sommes ravis que quatre de nos propositions aient été reprises. Les entreprises sont confrontées à deux problèmes principaux : des difficultés de trésorerie et un déficit de fonds propres. Le plan de relance s'attaque efficacement aux premiers avec le fonds de garantie de la trésorerie d'Oséo ou le remboursement anticipé du crédit d'impôt recherche et de la TVA. Mais il reste encore beaucoup à faire en matière de fonds propres.

Quelles mesures préconisez-vous sur cette question ?

La loi TEPA (ndlr : qui prévoit une réduction de l'ISF si les montants sont investis dans des PME  non cotées, directement ou via des fonds) est une très bonne initiative qu'il faut renforcer. Encore faut-il que l'argent arrive jusqu'aux entreprises. On constate ainsi qu'il y a trois fois plus d'argent collecté par les fonds sur le premier semestre 2008 par rapport à la même période en 2007 et 20 % d'investissements en moins. Ils préfèrent accompagner les PME déjà dans leur portefeuille et, face au manque de visibilité, ils font preuve de beaucoup de prudence. Mais ne pas prendre de risques, c'est ne pas aider la relance.

Quand tout vacille, on a plutôt envie de se réfugier dans ce que l'on connaît bien...

Attendre, c'est laisser la situation empirer. Il faut que les entreprises continuent d'entreprendre, les banques d'accorder des crédits, l'Etat de financer des projets d'infrastructures... Il faut créer un cercle vertueux en continuant de faire chacun son métier.

"Il faut soutenir les acteurs en difficulté mais aussi pouvoir investir dans les voies d'avenir"

Cette crise est aussi une aubaine pour remettre les entreprises et les travailleurs au cœur de l'économie. Avec des salaires de traders complètement déconnectés de ceux des patrons de PME, forces vives de l'économie, on marchait sur la tête. Il faut prendre conscience que les entreprises, ce n'est pas que le Cac. Mais je suis sereine : l'esprit entrepreneurial est présent en France. Les très bons chiffres de la création d'entreprise en 2008 le prouvent. Et ces entrepreneurs savent prendre des risques et n'ont pas peur de faire face à l'adversité.

Qu'attendez-vous des pouvoirs publics aujourd'hui ?

Aujourd'hui, on va au plus urgent mais il faut penser à la reprise. Elle arrivera peut-être plus vite qu'on ne le pense. Les Etats-Unis ont des actifs solides. Il faut donc bien entendu soutenir les acteurs en difficulté mais aussi pouvoir investir dans les voies d'avenir, dans l'innovation. Ce sera plus efficace que de saupoudrer tous les secteurs.

Quels conseils donneriez-vous à un dirigeant de PME ?

De maintenir son mental et celui de ses équipes. C'est essentiel. Les périodes de crise sont souvent source d'opportunités et la chance sourit aux audacieux. Ensuite, il faut aller à l'essentiel, prendre des décisions sans tergiverser. En temps de crise, on n'a plus droit aux hésitations. Les PME ont d'ailleurs un avantage sur les grands groupes, celui d'être plus agiles, de pouvoir prendre des décisions plus rapidement. Eux n'ont souvent qu'un seul choix : élaguer.

En savoir plus : les 10 propositions pour un soutien aux PME