Injures, menaces, propos déplacés… Les salariés peuvent fournir des preuves plus facilement
Fournir des preuves de certains agissements au travail est facilité par une décision de la Cour de cassation.
En entreprise, il peut arriver que des paroles inappropriées soient prononcées. Injures, jugements de valeur, propos discriminants ou déplacés… peuvent venir de l'employeur ou du salarié. Certain propos peuvent aussi révéler une faut commise, là encore par l'employé comme par l'employeur. Malheureusement, obtenir une preuve des ces paroles n'est pas toujours aisé. Cependant, la législation évolue et facilite désormais la production de preuves.
Jusqu'à tout récemment, prouver des propos tenus uniquement à l'oral, aussi compromettant soient-ils, étaient tout bonnement impossible. Enregistrer son employeur à son insu était considéré comme un délit. Même si des arrêts de la Cour de Cassation, de 2006 et 2011, ne reconnaissaient plus l'enregistrement clandestin dans le cadre professionnel comme un délit, ils n'autorisaient pas non plus son utilisation comme preuve devant les juridictions civiles, dont le Conseil de Prud'hommes. Il était considéré comme une "preuve déloyale".
Toutefois, une décision récente de Cour de Cassation survenue le 22 décembre 2023 est venue modifier l'application de la loi. Devant le cas d'un responsable commercial "grands comptes" licencié pour faute grave, la Cour de Cassation a autorisé l'employeur à utiliser des enregistrements clandestins comme preuve devant les prud'hommes que ce dernier refusait de transmettre le suivi de son activité commerciale. Cet épisode a marqué un changement radical dans la façon dont les enregistrements audio sont traités.
Bien que ce traitement ait joué en faveur de l'employeur, il peut dorénavant aussi jouer en faveur du salarié. Néanmoins, il faut noter que la reconnaissance juridique de ce type de preuve n'est pas systématique. La jurisprudence européenne précise que l'atteinte à la vie privée doit être proportionnée au but poursuivi. Ainsi, la production d'enregistrements doit respecter cette notion de proportionnalité. A titre d'exemple, des propos injurieux au sujet de l'orientation sexuelle d'un salarié tenus par un de ses collègues, n'avaient récemment pas permis de justifier le licenciement pour faute grave ordonné par l'employeur. La Cour de Cassation avait rejeté les preuves car la conversation n'était pas destinée à être rendue publique et qu'elle ne constituait pas un manquement à ses missions au travail.
On retient néanmoins que l'enregistrement clandestin dans le cadre professionnel n'est plus un délit, et que même si la preuve est écartée, le juge risque malgré tout de garder son contenu en tête.