Rapport Lescure et piratage : il faut conserver le dispositif d'amende !

Alors que le maintien de la riposte graduée mise en place par l'Hadopi semblait acquis après la remise du rapport Lescure, voilà que plusieurs voix s’élèvent, du CSA aux parlementaires, pour la remettre en question.

Une suppression qui pourrait aller à l'encontre de l'objectif visé par la mission Lescure, à savoir un soutien aux offres légales au détriment du piratage.

Les revenus de la musique en ligne qui ont chuté pour la première fois en 10 ans sont encore bien trop fragiles : une suppression pure et simple de l'amende pourrait donner le signe d'un cautionnement du téléchargement illégal. Un signal dont n'ont pas vraiment besoins les offres légales (téléchargement direct et streaming) toujours à la recherche d'un modèle économique viable ...

Soutenir les offres légales premium au détriment du freemium et du piratage

Est ce la fin d'une époque ? En tout cas la période où les offres low-cost ou freemium (gratuit illimité) étaient la normes semblent aller sur la fin : leur modèle économique ne satisfaisait persone : ni les plateformes musicales type Deezer ou Spotify, ni ples producteurs et encore moins les artistes.
Autre aspect majeur : les internautes sont désormais à payer un peu plus à la condition que le service rendu soit de meilleur qualité (écoute, visionnage …) : pour preuve les 4 millions d'abonnés payants de Deezer atteint fin mai ou encore les 31 millions d'abonnés payants de Netflix. Il n'empêche, la musique numérique a engendré au premier trimestre 2013 sa première baisse depuis 10 ans (-5,2 %) : une économie culturelle appliquée au numérique encore bien fragile qui nécessite un soutien maintenu.

Piratage : l'amende de 60 € proposée par Lescure paraît bien peu dissuasive

Pour lutter contre le piratage et soutenir les offres légales, Pierre Lescure propose ainsi dans son rapport rendu en mai 2013 de maintenir la riposte graduée mais en l’allégeant de son caractère pénal tout en maintenant les sanctions administratives, avertissements et amendes : difficile de lui donner tort tant le nombre de condamnations judiciaires (trois en 2 ans) n'a pas eu de réel impact. Si les précédentes amendes distribué par l'Hadopi pouvait atteindre les 1500 € et paraissaient clairement abusive, le montant proposé par Pierre Lescure paraît au contraire bien faible. Son rapport propose ainsi d'instaurer une amende de 60 €. Pourquoi 60€ ? "Cela correspond à un an d'abonnement au service de streaming musical Deezer" répond Pierre Lescure. Pas sûr qu'un montant si faible soit réellement dissuasif pour les adeptes du téléchargement illégal : le prix de 4 albums, 3 DVD ou encore des deux premières saisons de Games of Thrones …Le calcul est vite fait et risque de ne pas vraiment décourager. Un juste milieu entre l'amende initiale et la nouvelle proposition paraît plus crédible, aux alentours de 200€.

CSA, CNIL … qui va contrôler le Web ?

Pour prendre la relève de la riposte graduée, la mission Lescure proposait de faire basculer les pouvoirs de sanctions de l'Hadopi au CSA. Si la décision semblait plutôt bien acceptée lors de la remise du rapport, le CSA semble se défausser de sa futur mission. Devant l'Association des journalistes médias (AJM), Olivier Olivier Schrameck qui préside le CSA depuis janvier dernier déclarait « "Je n'arriverai pas avec un képi. Et je ne suis pas demandeur d'un pouvoir de sanction. Clairement, non. ». Pas sûr que ce genre d'intention soit suffisante pour enrayer le téléchargement illégal ... En définitive le CSA semble surtout ne pas vouloir devenir « le grand censeur du Web ». Un rôle qui pourrait finalement revenir à la CNIL comme l'a révélé Slate la semaine dernière. Même Patrick Bloche, Président de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée, à l'origine favorable aux propositions Lescure remet lui aussi désormais en question la riposte graduée : « Je suis sceptique sur l'applicabilité et la compréhension d'une amende. A partir de là, le dispositif de la réponse graduée pourrait être abandonné" révélait il sur BFM TV. Pas sur que ces déclarations très « politiquement correct » vont soutenir les offres légales. L'industrie musicale, en crise depuis l’émergence d'Internet mais qui engendre désormais ses premiers réels succès digitaux (330 000 téléchargement pour le dernier Daft Punk !), a réellement besoins qu'on maintienne ce soutien en cette période clés de mutation numérique.