Instagram est-il le nouveau martyr de l’Influence ?

A lire cet été le volume d’articles de presse rédigés à charge contre Instagram, et manifestement sans véritable effort d’investigation, il m’a paru légitime de prendre le temps ici de rétablir quelques vérités sur un réseau social qui devrait atteindre le milliard d’utilisateurs actifs dans quelques mois.

En effet, je suis de ceux que l’on appelle les « Influenceurs ». Pire encore, je suis de l’espèce des « Influenceurs Voyage ». Qu’est-ce donc ? Et bien selon Télérama, ce sont ceux dont « La logique est purement commerciale : ces travel bloggers sont financés par des agences de voyage, et un seul post peut rapporter jusqu'à plusieurs milliers d'euros ». Car oui, et cela semble donc confiner à l’abject, je suis enfin de ceux qui ont choisi de quitter leur douillet CDI pour entreprendre, mettant à profit leurs expériences du voyage, leurs compétences en photographies, et leurs audiences, pour créer une agence de conseil en communication Instagram dédiée aux acteurs du tourisme.

Mais malheureusement, je suis aussi de ceux que toutes celles et ceux qui tirent à boulet rouge sur Instagram et ses adeptes, n’ont pas choisi d’interroger avant de charger…

Concernant les ambitions…  

D’Influenceur à Imposteur, il n'y a bien souvent malheureusement que de polis guillemets dans tous ces articles, et c’est ce que je condamne. La plupart des reportages effectués sur le sujet mettent en effet en lumière des Instagrammers repentis (toujours les mêmes, soit dit en passant), devenus les victimes d’un écosystème parfois même qualifié de véritable « mafia ». Mais est-ce vraiment suffisant pour stigmatiser ainsi sur toute une communauté ? 

Si les raccourcis sont faciles, autour d’un écosystème à l’Influence récente, et à la professionnalisation balbutiante, ils sont dévastateurs en ce qu’ils salissent une grande majorité d’Instagrammers foncièrement passionnés par leurs sujets et métiers. Ce sont par ailleurs bien souvent ceux-là même qui ont investi le réseau social à une époque pas si lointaine où personne, absolument personne, ne pouvait imaginer en vivre. Nos seules ambitions alors : partager des savoir-faire, demander des conseils, ou bien faire quelques-unes des rencontres parfois les plus importantes de nos vies, à l’instar de celle que j’ai faite avec celui qui est devenu il y a quelques mois mon associé.

Concernant la monétisation…  

Dès 2016, l’audience sur Instagram allant croissant, certains parmi nous ont eu le privilège d’être contactés par divers annonceurs, logiquement des acteurs du tourisme pour les Instagrammers Voyage. Le deal semblait honnête : des séjours partiellement ou intégralement pris en charge en contrepartie de la production et parfois de la publication de photos de la destination en question. 

Il est important ici, au regard de ce qui a pu être écrit, de redéfinir cette contrepartie, qui ne consiste pas qu’ « à documenter en photos leurs excursions aux quatre coins du globe. Quitter à limiter l'exploration touristique », n’en déplaise à Télérama. Pour réaliser ces photographies, il s’agit en effet d’investiguer sur les meilleurs spots (les incontournables, mais aussi les moins attendus, qui ravissent plus souvent notre public), sur l’heure à laquelle ils disposeront de la meilleure luminosité et seront les moins fréquentés, de se documenter sur les conditions d’accès et les activités alentours pour conseiller celles et ceux qui seraient tentés d’y aller, et enfin de retravailler (et non retoucher) ces visuels, comme le font l’intégralité des médias traditionnels, pour accentuer des contrastes ou rendre le monument photographié plus net… 

En bref, ceci est bel et bien un travail, avec ses indéniables avantages, mais également ses naturelles contraintes, qui mérite rémunération.

 Concernant la professionnalisation…  

Petit à petit, à mesure que les audiences croissent sur le réseau et que, naturellement, les enchères grimpent autour du moindre post, de la moindre photo, nous avons découvert les rouages d’un monde de l’information/communication aux fines frontières, et avons du apprendre par nous mêmes à nous imposer la seule limite de l’honnêteté intellectuelle. 

A savoir prévenir notre audience lorsque les productions émanaient d’invitations, et ne promouvoir que les destinations auxquelles nous croyions. Une rigueur qui n’est encore imposée par aucun texte de loi, et je suis le premier à le regretter, en ce que ces opportunités incroyables de vivre de nos passions ont malheureusement attiré des personnalités uniquement animées par la monétisation de leur compte.

Aussi, le monde d’Instagram, comme tout milieu ayant le privilège de l’Influence, compte désormais ses tricheurs (achats d’abonnés…), ses mauvaises pratiques (photos grossièrement retouchées, discours mensongers…), ou simplement ses amateurismes (non distinction des contenus sponsorisés…). Mais dans cet écosystème extrêmement codifié, certainement plus violemment que dans bien d’autres, ces comptes sont très vite rejetés par leurs pairs, avant de perdre une partie de leur public en 1 clic. Instagram a lui même décidé de les sanctionner directement il y a quelques mois. Aucun de ces articles ne l’a précisé.

Instagram va-t-il donc vraiment vous « pourrir les vacances » ?

Je ne suis pas sociologue et serais donc bien mal placé pour décrypter un phénomène de société accusé au mieux de nous abrutir, au pire de nous arnaquer. En revanche, je suis de ceux qui ont fait le pari de mettre ma connaissance du réseau, mon expérience du voyage, ainsi que ma capacité à fédérer une audience, au service des acteurs du tourisme comme une source nouvelle de conseils et de bonnes pratiques sur Instagram. 

Conscients des limites atteintes par la simple monétisation d’audiences, nous avons choisi de contribuer modestement à l’incitation au tourisme, un pan fondamental de notre économie au sein duquel Instagram joue un rôle plus que positif : si 50% des moins de 35 ans s’inspirent des réseaux sociaux pour trouver une destination (OpinionWay pour Voyages-sncf – Mars 2017), 67% des utilisateurs d’Instagram y trouvent même leurs idées de destinations (Facebook IQ – Octobre 2016).

Nous sommes ainsi nombreux à souhaiter que des raccourcis provoqués par une inextinguible mais néanmoins universelle peur de la nouveauté ne « pourrissent » pas, eux, la naissance de ces nouveaux métiers, plus souvent emprunts de passions que d’ambitions. Nous le condamnons non seulement au nom de tous les Instagrammers honnêtes qui ont pu se sentir insultés dans ces lignes, mais aussi et surtout au nom des quelques 700 Millions d’abonnés dans le Monde, qui méritent mieux que d’être considérés comme une masse fragile et si facilement… influençable !