"Tague un pote qui…" : Facebook veut mettre un terme à l'"engagement bait"

"Tague un pote qui…" : Facebook veut mettre un terme à l'"engagement bait" Buzzfeed, Sarcasm Lol et l'ensemble des pages spécialisées dans l'infotainment ne pourront plus recourir à cette astuce qui leur permet de booster la visibilité de leur posts sans avoir à apporter de valeur ajoutée éditoriale.

La nouvelle a sans mis le monde du community management en émoi. Facebook vient d'annoncer qu'il allait s'attaquer à ce qu'il appelle l'"engagement bait". En clair, toutes les recettes qui permettent aux administrateurs de pages Facebook de booster facilement leur engagement. Des astuces comme "Aime ce post si tu es du signe poisson" ou encore "Tague un ami dont le prénom commence par un S, il devra te…" qui ont fini par inonder les fils d'actualité des utilisateurs.

En identifiant un ami dans un commentaire, l'utilisateur attire son attention sur le post (et sur la marque qui l'a publié). L'ami tagué, en interagissant avec le post, lui donnera à son tour de la visibilité auprès d'une partie de sa communauté et ainsi de suite. En langage Facebook, c'est ce qu'on appelle du "earned media" et cela permet à une page d'augmenter la visibilité de son post (son reach) et de gagner des fans sans débourser un centime. L'opération est d'autant plus rentable que ces pages peuvent ensuite monétiser cette audience enrichie en la redirigeant vers un site qui a de la publicité display ou en lui diffusant des opérations de brand content natives.

Tous les médias d'infotainment y ont recours

Pas un média spécialisé dans l'infotainement n'y échappe. Depuis Aufeminin qui génère 22 000 commentaires grâce ce post (largement plus que le reste de ses publications) à Buzzfeed France, en passant par des pages natives de Facebook comme les FDP du Net dont une grande partie des 2,7 millions de fans ont été conquis grâce à cette astuce.

Ce dernier est représentatif de ces nombreuses communautés "semi-professionnelles" qui se sont construites au sein de la plateforme. Beaucoup (au contraire des FDP du Net) n'ont souvent pas de site Web et encore moins de mentions légales. Certaines sont créées par des "amateurs" débrouillards qui en profitent après pour les revendre à des médias plus établis qui pourront les fusionner avec leurs propres pages comme le font des Melty, Minutebuzz et Cerise. D'autres s'assurent une rente grâce à la publicité que les visites générées vers leur site ou des sites partenaires leur apportent.

Le leader mondial de la pratique, Sarcasm Lol, compte 37 millions de fans sur Facebook

Parmi elles, le leader mondial du "Tague un ami" : Sarcasm Lol, une page méconnue en France mais qui a réussi à attirer près de 37 millions de fans en l'espace de deux ans, en postant entre 30 et 40 contenus de ce type par jour. Parfois dans un anglais approximatif, toujours avec un taux d'engagement incroyable. Le business model est rudimentaire : des publicités Google sur le site dédié.

Les fondateurs de cette page, tous trois basés en Inde, sont aussi discrets qu'elle est populaire. Aucun n'a répondu aux sollicitations du JDN. La seule trace de leur existence se trouve en fait sur le site Archive.org qui permet d'accéder à un article du Huffington Post indien qui a été dépublié. On y apprend que l'un d'entre eux a lancé une page baptisée "O_0" en 2011, que les deux autres l'ont rejoint en cours de route et que l'audience de la page a commencé à décoller en 2015. En mai 2016, elle comptait 2,6 millions de fans. L'explosion a eu lieu ensuite.

On peut douter que des "succès" tels que Sarcasm Lol se reproduisent de sitôt avec l'annonce de Facebook. "Cette tactique vise à prendre avantage de l'algorithme de notre News Feed en boostant l'engagement d'une publication pour augmenter son reach. A compter de cette semaine, nous allons prendre des mesures pour que les pages qui y ont recours voient leur reach diminuer fortement", annonce la plateforme. Ne sont concernées pour le moment que les pages éditées en langue anglaise. Mais il ne fait guère de toute que les autres marchés, dont la France, suivront bientôt.

"Les administrateurs devraient concentrer leurs efforts sur le partage de contenus inspirants et de qualité", estime Facebook. Cette annonce s'inscrit dans une démarche plus globale pour favoriser l'authenticité des contenus sur la plateforme, avec la volonté de réduire les liens vers les pages web de faible qualité et les titres qui ont recours au clickbait.