Les Axies, ces NFT qui révolutionnent les codes du gaming

Les Axies, ces NFT qui révolutionnent les codes du gaming Un studio vietnamien a imaginé un jeu qui combine gameplay à la Pokémon et NFT pour permettre à ses utilisateurs de gagner un peu d'argent.

Leur arrivée sur Game Boy en 1996 avait donné naissance à toute une génération de dresseurs de Pokémons... En 2021, l'envol des NFT nous faitt découvrir les dresseurs d'Axies. Les Axies, ce sont les animaux digitaux d'un jeu adossé à la blockchain Ethereum, baptisé Axie Infinity. Des animaux digitaux labellisés par un NFT, que chaque joueur doit élever, faire combattre ou échanger. Axie Infinity, qui a été lancé courant 2017 par une équipe de développeurs basée au Vietnam, réunit aujourd'hui près de 18 millions de joueurs mensuels selon la plateforme Steam.

Ses revenus proviennent des frais que le jeu prélève sur les ventes et sur l'élevage d'Axies, pratique qui consiste à accoupler deux Axies pour en créer un nouveau. Cet accouplement n'est possible que si le joueur a accumulé suffisamment de tokens SLP, pour Smooth Love Potion, au cours de ses quêtes. Ces jetons sont libellés en Ethereum et sont, au même titre que les jetons de gouvernance AXS (pour Axie Infinity Shards), la clé de voûte d'une économie plutôt florissante.

Sur Axie Infinity, vous commencez avec trois Axies que vous devrez élever et faire combattre. © Capture d'écran

Axie Infinity a, à ce jour, réalisé plus de 750 millions de dollars de revenus, dont 90% l'ont été au cours des deux derniers mois. Le groupe devrait selon les prédictions du cabinet Delphi Digital clôturer l'année avec des revenus annuels de plus de 1,1 milliard de dollars et un total de 50 millions de joueurs quotidiens. Il faut dire qu'Axie semble réunir tous les ingrédients nécessaires au succès d'un environnement crypto : une expérience utilisateur simple et ludique (c'est un jeu vidéo qui s'adresse à tous) et un usage concret des NFT, décorrélé de la spéculation que l'on observe sur le marché de l'art. Il ne s'agit pas d'acheter un actif numérique comme les CryptoKitties pour le simple plaisir de le contempler, ou de le laisser prendre la poussière (digitale) dans un coin, en attendant que sa valeur s'envole. Il s'agit d'investir dans un actif qui, à terme, deviendra une source de revenus parce qu'on l'accouple à d'autres Axies, pour faire des petits que l'on pourra vendre. On parle, dans le jargon, de play-to-earn.

"Des revenus de 1,1 milliard de dollars et un total de 50 millions de joueurs quotidiens d'ici la fin de l'année"

Aux Philippines et au Vietnam, deux de ses principaux marchés, ils sont de plus en plus nombreux à quitter leur emploi pour se consacrer au dressage virtuel à plein temps. Capables de payer leurs factures et leurs courses une fois leurs gains en SLP convertis en monnaie fiat. "Des gens qui gagnaient 5 dollars par jour se font maintenant 20 dollars par jour", assure l'analyste Packy McCormick.

Du play to earn

Pour se lancer dans le jeu, un nouvel arrivant a besoin de trois Axies, qu'il n'achète pas aux fondateurs du jeu… mais aux autres joueurs qui ont pris le temps de les faire grandir. Le jeu prélève simplement une commission sur chaque transaction, dans une logique de marketplace. Un modèle à rebours de ce qui se fait  sur Fortnite, où l'on paie le développeur pour rendre son personnage plus à notre goût (l'économie du skin pèse plusieurs milliards de dollars) ou sur Fifa, où acquérir auprès d'EA Sports des joueurs devient à un certain stade indispensable pour gagner (du pay to win).

75 programmes ont vu le jour pour financer l'investissement de départ de joueurs du monde entier

Sur Axie Infinity, l'essentiel des revenus générés retournent dans les poches de la communauté. Une communauté qui a en plus le sens de l'entraide. Et c'est peut-être l'un des aspects les plus innovants d'Axies Infinity. Des programmes de bourse ont vu le jour à travers le monde (le site CoinGecko en dénombre plus de 75 à ce jour) pour fournir aux aspirants joueurs les moyens de constituer leur propre équipe d'Axies. Charge à ces derniers de rembourser la somme, en reversant une partie de leurs gains en SLP. On comprend mieux pourquoi dans leur livre blanc, les fondateurs de Sky Mavis, la société derrière le jeu Axie Infinity, déclarent : "Vous pouvez considérer Axie comme une nation dotée d'une économie réelle."

L'une des raisons du succès d'Axie Infinity est sans doute d'avoir pu se lancer dans une indifférence relative. Le livre blanc a certes été publié en pleine bulle crypto, courant 2017, mais la vente des tous premiers personnages d'Axie en tant que NFT n'a eu lieu que quelques mois plus tard, en février 2018, une fois le marché effondré. De quoi permettre aux équipes de développer le produit en s'appuyant sur les retours des quelques passionnés qui sont restés à bord. Et, surtout, prendre son temps pour enrichir l'expérience de jeu. La possibilité d'échanger ses Axies est arrivée en mars 2018, celle de les élever, en mai et de les faire combattre, en octobre. Ces combats, automatiques au début, ont peu à peu laissé plus de place au facteur humain. Le dresseur est ainsi amené à choisir les compétences à utiliser durant le feu de l'action. En janvier 2019, les fondateurs d'Axies Infinity ont même levé 3 200 ethereum (environ 600 000 dollars) en vendant des terres de Lunacia, "un monde ouvert, détenu, exploité et contrôlé par des joueurs". Un bout du metaverse avant l'heure.

"Ce qui rend Axie Infinity unique, c'est que cette croissance sauvage n'est que la première étape d'un plan beaucoup plus vaste qui comprend l'intégration verticale, l'agrégation, la décentralisation et la construction d'un nouveau monde", écrit Packy McCormick. Et c'est peut-être aussi ce qui le rend si difficile à copier alors que la bulle NFT est depuis passée par là. "Si vous créez un concurrent maintenant, vous allez attirer le genre de personnes qui veulent trouver le prochain Axie, pas le genre de personnes qui sont réellement intéressées à faire avancer le jeu", estime l'un des cofondateurs, Jeff Zirlin.

Le succès d'Axie est d'autant plus impressionnant que l'onboarding s'annonce autrement plus rude que celui des jeux freemiums classiques, entre la nécessité d'ouvrir un compte sur Metamask, d'y transférer quelques ethers, de transférer ces derniers sur un wallet baptisé Ronin, pour pouvoir mettre la main sur les 3 Axies nécessaires au lancement du jeu (compter au moins 200 dollars pour les moins chers d'entre eux). Ce n'est qu'une fois toutes ces étapes réalisées que vous pourrez télécharger l'application. Evidemment pas de quoi rebuter les personnes familières de l'univers crypto mais suffisant pour détourner une partie du grand public. Du moins, c'est ce qu'on aurait pu penser.