Hygiène de l'invisible : la qualité d'air intérieur, un pilier de la sécurité sanitaire encore trop négligé ?

La crise sanitaire traversée ces deux dernières années a mis en lumière le manque de pratiques partagées vis-à-vis d'un aspect spécifique de l'hygiène : celui de l'air que nous respirons.

Or cet air peut être vicié par la pollution, les contaminants et bien d’autres éléments que ceux liés à la précédente crise sanitaire (virus, bactérie…) : ce pilier de la sécurité sanitaire reste encore trop négligé et représente un enjeu majeur de santé publique.

28% des AVC et de nombreux cancers sont directement liés à la présence de polluants intérieurs selon l’OMS

Nous sommes conscients depuis longtemps de l’importance et de l’impact de l’environnement sur notre santé. Les premières politiques dites « hygiénistes » ont été mises en œuvre avec l’apparition de système d’évacuation des déchets et une plus grande attention à la qualité de l’eau et des denrées consommées. De grands principes de santé publique sont alors apparus, mais l’attention portée à l’air ambiant est restée faible.

Malgré la prise de conscience plus récente des méfaits de la pollution atmosphérique, ou la prise en compte de certaines allergies liées à l’air, les chiffres des problèmes de santé liés à l’air ambiant restent effarants lorsqu’ils sont rapportés aux actions engagées pour les combattre. En effet, si la pollution extérieure amène à des mesures directes, comme l’alternance de la circulation automobile les jours de grande pollution, la réduction de la part du chauffage au bois ou encore la fin des usines au charbon, la pollution intérieure reste bien moins connue, tant par les citoyens que les pouvoirs publics. La pollution est pourtant beaucoup plus élevée en intérieur qu’en extérieur, alors même que nous y passons plus de temps.

Selon plusieurs rapports, dont celui de Jean-François Husson et Leïla Aïchi au Sénat, de l’OMS, du rapport Blandin ou des chiffres de l’ANSES, les troubles liés à la qualité de l’air intérieur sont inquiétants et massifs. L’Organisation Mondiale de la santé estime ainsi que 28% des AVC et de nombreux cancers sont directement liés à la présence de polluants intérieurs (pour environ 20 000 décès prématurés par an)[1]. En France, près d’un Français sur trois souffre d'allergie et on estime que 50% de la population mondiale sera allergique en 2050. Une explosion des allergies respiratoires qui gagnent l’intérieur en raison d’une mauvaise aération et qui pourrait être largement amélioré via des systèmes de purification d’air. L’impact socio-économique annuel total de ces pathologies est même estimé à plusieurs milliards d’euros !

Faire de l’hygiène de l’invisible et de la qualité de l’air un enjeu clé de la sécurité sanitaire

Après l’alimentation, l’eau, les déchets, les vaccinations, l’hygiène de l’invisible en espace clos doit donc devenir un enjeu majeur par une double réponse réglementaire et technologique. Tous ces éléments doivent en effet nous amener collectivement à prendre les mesures nécessaires pour diminuer les risques d’une mauvaise qualité de l’air intérieur. Les pouvoirs publics ont par ailleurs commencé à se saisir du sujet puisque la surveillance de la qualité de l’air intérieur (QAI) est désormais obligatoire dans les établissements recevant du public mineur. Sont notamment concernés depuis le 1er janvier 2020 les établissements d’enseignements primaires et secondaires, ainsi que les centres de loisirs ou les crèches.

Mais des politiques publiques plus ambitieuses sont indispensables pour coordonner les actions et fixer un cap, notamment en termes de financements, de recommandations claires de la part des organismes responsables ainsi que l’amélioration du cadre législatif existant. L’extension de normes QAI à d’autres publics ainsi qu’une meilleure communication visant à promouvoir des recommandations pensées en amont sont des pistes à envisager de concert pour éviter la mise en place d’équipements défaillants et assurer une harmonisation des normes comme des installations.

Les industriels français sont d’ores et déjà au rendez-vous, avec un savoir-faire à la fois reconnu du milieu mais méconnu par le grand public. Grâce à un tissu d’universités et d’entreprises compétentes soutenues par des acteurs publics, nous avons déjà commencé à exporter cette marque de fabrique chez nos voisins européens et internationaux.

C’est à la fois un enjeu d’emploi et de croissance, mais surtout d’autonomie stratégique sanitaire. Nous avons les ressources pour produire à grande échelle des solutions françaises efficaces et éviter ainsi d’importer des produits inutiles, mal contrôlés et de mauvaise qualité, voire dangereux. Incluons donc les industriels de la filière « air » dans la boucle des prises de décisions et promouvons nos entreprises nationales pour faire face à un problème sanitaire d’aussi grande ampleur.

Que ce soit à court terme, dans la relance de notre économie, ou au long cours, sur les impacts systémiques de la pollution, se concentrer sur la qualité de l’air intérieur devrait figurer en priorité dans nos inquiétudes de santé publique. Des solutions existent et la filière air française est prête : repoussons cette ultime frontière et sécurisons notre indépendance sanitaire.