Cross The Ages, le jeu Web3 français qui défie le bear market

Cross The Ages, le jeu Web3 français qui défie le bear market Si le modèle des jeux play-to-earn à la Axis Infinity semble définitivement dépassé, l'entrepreneur marseillais Sami Chlagou revendique une croissance constante pour son jeu de cartes reposant sur un univers de Fantasy.

"Chez nous, il n'y a pas de vacances", déclare d'emblée Sami Chlagou, répondant aux questions du JDN depuis ses bureaux marseillais, en plein cœur du mois d'août. L'entrepreneur français, cofondateur du jeu vidéo sur blockchain Cross The Ages, se veut fidèle à un adage partagé par de nombreux acteurs du Web3 : c'est dans les périodes difficiles qu'il faut redoubler d'efforts pour construire. Alors que l'euphorie qui s'était emparée du secteur de jeu vidéo sur blockchain lors du dernier bull market est retombée depuis longtemps, Sami Chlagou affirme être plus optimiste que jamais pour Cross The Ages, sur lequel il travaille depuis 2020 avec son studio PixelHeart, fondé en 2019.

Un enthousiasme qui semble soutenu par les chiffres qu'il s'empresse de détailler. "Nous avons près de 14 000 utilisateurs quotidiens, entre 70 000 et 80 000 joueurs mensuels, et comptabilisons plus de 220 000 téléchargements", explique-t-il. "Et la rétention est plutôt bonne, parce que nous conservons une très grande partie des gens et nous avons un temps de jeu moyen de 48 minutes, avec six sessions par jour, ce qui est très élevé".

Un univers développé par des écrivains

Pour développer Cross The Ages, un jeu de cartes reposant sur un univers fantasy, Sami Chlagou, qui travaille avec son associé Richard Estève, s'appuie sur son expérience dans le secteur du jeu vidéo traditionnel. Après avoir passé quelques années dans le domaine de la production audiovisuelle, il a fondé sept studios de jeux dans différents pays, en Angleterre, Japon, ou encore en Corée. "Nous avons sorti plus de 60 jeux vidéo sur Nintendo, Playstation, Xbox, Steam et Android, et développé plus de 200 licences", détaille-t-il. "Donc nous savons, je pense, comment faire un bon jeu".

Lorsque la blockchain et les NFT ont commencé à prendre leur essor, Sami Chlagou a rapidement compris le potentiel de ces technologies si on les appliquait à son domaine de prédilection. "En tant que grand geek et fan de jeux de cartes comme Magic The Gathering, j'étais fasciné par le potentiel de la technologie blockchain", se rappelle-t-il. "La possibilité de créer un portefeuille grâce auquel vous pouvez acheter, vendre ou louer des actifs m'est tout de suite apparue comme un changement de paradigme".

Mais comme il l'explique, la stratégie choisie au départ diffère de ce qui se fait habituellement. Plutôt que de lancer directement le jeu, les cofondateurs ont choisi de créer au préalable l'univers sur lequel il reposerait. Pour cela, ils ont fait appel à sept écrivains, dont Alain Damiaso et Arnaud Dollen, ainsi qu'à des graphistes renommés, dont Joshua Cairos (Game of Thrones) et Josu Salano (Le Seigneur des Anneaux), qui se sont engagés pour dix ans. "Nous avons rapidement publié le premier livre, qui a été très bien accueilli, avec un million de téléchargements en moins d'un an", explique Sami Chlagou.

Selon lui, cette approche permet de créer un lien affectif avec les joueurs. "Si vous commencez avec une histoire forte, vous pouvez tout faire", explique-t-il. "Certaines personnes viendront pour le jeu lui-même, tandis que d'autres viendront pour les personnages et l'histoire". À l'heure actuelle, deux ouvrages ont été publiés, traduits en six langues.

Afin d'attirer des joueurs, le choix a été fait de rendre la technologie blockchain invisible, en facilitant par exemple l'achat de cartes sans avoir besoin de passer par un wallet crypto. Les premiers chiffres semblent lui donner raison, puisque plus de 18 000 packs, qui permettent de se procurer les cartes pour jouer, ont déjà été vendus, générant plus de 4 millions d'euros de bénéfices. Et la valeur des différents types de packs disponibles sur le marché secondaire a explosé, de 230% pour les "Disciple" et à 33 600% pour les "Legacy". Récemment, une carte rare, le "Golden Mint Pass" a même trouvé acquéreur pour plus de 120 000 euros. Des chiffres encourageants, alors que comme l'explique Sami Chlagou le jeu n'en est pas encore à sa version définitive, et que deux autres jeux basés sur l'univers de Cross The Ages sont déjà prévus. 

Malgré les difficultés auxquelles il fait face en tant qu'entrepreneur Web3 évoluant en France, Sami Chlagou reste attaché à sa ville, Marseille, et ne compte pas déménager à Dubaï ou au Portugal, comme beaucoup. "Lorsqu'on est basé dans un pays, il y a des bons et des mauvais côtés", explique-t-il. "Il faut accepter ce qu'on nous donne. Nous sommes confrontés à certains obstacles en termes de régulation (une loi est notamment en préparation pour réguler les jeux Web3, menacés un temps d'être considérés comme des jeux d'argent, ndlr). Mais je ne me vois pas déménager dans un autre pays. Je suis d'accord pour payer des impôts et me conformer à ce que les autorités nous demandent. Et puis, je trouve beaucoup de soutien de la part de ma ville et du gouvernement".

Il peut également compter sur le soutien d'acteurs majeurs de l'écosystème français comme SandBox, parmi les 70 investisseurs impliqués dans l'aventure, dont des grands noms de l'industrie du jeu vidéo comme Ubisoft ou SquareEnix.