Abonnement et synergies, le nouveau virage d'Uber pour rentabiliser ses 100 millions de clients
Uber annonce ce 28 avril une foule de nouvelles fonctionnalités qui doivent permettre de fidéliser ses clients et d'améliorer sa rentabilité en leur proposant davantage de services.
Pour que ses utilisateurs ne quittent plus jamais l'appli, Uber met les VTC et la livraison à toutes les sauces. L'entreprise annonce ce 28 avril une myriade de nouvelles fonctionnalités qui doivent permettre de fidéliser ses clients et d'améliorer sa rentabilité. D'abord avec le lancement en France d'Uber Pass, un abonnement mensuel à 10 euros qui offre d'une part des réductions de 10 à 15% sur les courses en VTC et d'autre part des livraisons gratuites sur Uber Eats pour toute commande supérieure à 12 euros (l'entreprise prélève toujours une commission, mais ne facture plus de frais de livraison). Les abonnés jouiront en sus d'un accès prioritaire au service client.
L'entreprise va également ajouter en France l'option Reserve, qui permet de commander une course plusieurs heures ou jours à l'avance avec un prix fixe, en échange d'un surcoût de 7 euros. Le chauffeur se présentera 15 minutes avant chez le client, et l'attendra quinze minutes après l'heure de rendez-vous (contre quelques minutes normalement). Une option de réservation existait déjà, mais elle ne faisait qu'appeler un chauffeur quelques minutes avant l'heure du rendez-vous et ne protégeait pas des variations de prix en fonction de l'offre et de la demande. En France, l'option Reserve sera uniquement disponible avec les catégories Berline (premium) et Van. Elle arrivera à terme aussi sur Uber X (la catégorie la moins chère), précise Uber au JDN. Autre nouveauté annoncée dans quelques pays européens, mais pas en France : Uber Hourly permettra de réserver un VTC à l'heure et d'effectuer autant de trajets que souhaités avec le même chauffeur.
Le mariage du VTC et de la livraison
Uber réalise une vraie fusion de services entre son offre livraison et VTC. Un coup double, car sur ces deux marchés, l'entreprise a le plus souvent des concurrents différents, qui proposent rarement à la fois livraison et VTC, mais tentent eux aussi de fidéliser les clients avec des abonnements. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle Uber Eats proposait déjà en France un abonnement supprimant les frais de livraison. A présent, Uber est en mesure de proposer un abonnement bien plus rentable que ses concurrents, puisqu'il mélange des avantages sur la livraison et le VTC.
Toujours au rayon des synergies, Uber va ajouter la possibilité d'afficher pendant une course en VTC les restaurants se trouvant sur son trajet, afin d'y commander un plat puis d'ajouter un arrêt pendant le voyage pour aller le récupérer. Autre mélange entre VTC et livraison, Uber annonce le lancement d'Uber Connect, un service de coursier permettant de faire livrer n'importe quoi à l'adresse de son choix. Les livraisons seront assurées en Europe par des chauffeurs VTC, avec la même grille tarifaire que lorsqu'ils transportent des personnes. La date de lancement d'Uber Connect en France n'est pas encore connue.
C'est une nouvelle phase du développement d'Uber et finalement un retour aux sources. Car à l'origine, l'entreprise s'était développée sur un segment très premium, avec une qualité de service élevée dans les véhicules. Puis, face à la concurrence low-cost de son rival américain Lyft, l'entreprise avait sorti l'option discount Uber X, devenue aujourd'hui l'offre standard, ainsi que les trajets partagés Uber Pool (en sommeil en ce moment, coronavirus oblige). Cette stratégie de croissance massive du nombre d'utilisateurs s'est poursuivie avec l'ajout de nouveaux modes de transport, comme les trottinettes, vélos électriques et scooters. Puis à partir de l'année dernière, Uber s'est lancé dans un recentrage sur ses activités de VTC et livraison, afin d'atteindre la rentabilité qui lui fait toujours défaut douze ans après sa création. Exit le business de nouvelles mobilités, exit les investissements sur le véhicule autonome, exit la R&D sur la mobilité aérienne (Uber conserve des parts minoritaires dans le business des entreprises auxquelles elle a vendu ces activités).
Pour continuer dans cette lancée vers la rentabilité, Uber se tourne donc vers la fidélisation et les services premium, afin d'extirper un maximum de revenus de chaque utilisateur, maintenant que leur nombre a dépassé les 100 millions d'actifs grâce à la précédente phase de diversification tous azimuts. Ce sont deux manières très intéressantes pour une entreprise de services d'améliorer sa rentabilité : l'abonnement garantit des revenus récurrents et réduit les chances que l'utilisateur aille chez la concurrence, tandis que les fonctionnalités premium permettent d'augmenter le revenu moyen par course, donc d'améliorer les marges.
Interrogé sur cette stratégie, Sundeep Jain, le vice-président et directeur produit d'Uber, en précise les contours au JDN. "Nous résumons notre stratégie par le "go and get" (voyager et acheter, ndlr) : pouvoir aller n'importe où et acheter n'importe quoi depuis Uber. Nous voulons maximiser nos revenus sur les mobilités et la livraison. En mobilité, il ne s'agit pas seulement de VTC, mais aussi de transport public ou de location de voitures. Quant à la livraison, elle ne se résume pas aux repas, il s'agit aussi de courses, d'alcool ou même d'iPhones. Ce sont deux secteurs très vastes et nous pensons qu'ils créeront un chemin vers la rentabilité." Il serait temps d'y arriver, car Uber s'est engagé auprès de ses investisseurs à atteindre la rentabilité d'ici la fin de l'année.