E-commerçants : penser son site multilingue pour s'imposer à l'international

E-commerçants : penser son site multilingue pour s'imposer à l'international Alltricks, ManoMano, OOGarden et Perús partagent leur expérience en matière de sites multilingues pour s'imposer à l'international. Un apprentissage continu.

Membres de la grande famille des e-commerçants français, Alltricks, ManoMano, OOGarden et Perús partagent un autre point commun. Tous quatre proposent des déclinaisons de leur site francophone en différentes langues, dont l'anglais, l'allemand, l'espagnol, l'italien et le portugais. Pour conquérir l'international, le site multilingue est un incontournable. Mais avant de se lancer quelques questions méritent d'être soulevées : quel investissement ce projet représente-t-il ? Avec quels outils ? Quels sont les écueils à éviter et les paramètres à considérer ?

Spécialiste de l'aménagement extérieur depuis sa création en 2006, OOGarden (150 salariés, 80 millions d'euros de CA) a entamé la déclinaison de son site en allemand il y a trois ans.  "A l'époque, nous avons investi 70 000 euros uniquement pour la version allemande qui comprenait la traduction des fiches produits soit 6 000 références, retrace Sylvain Legoux, président et cofondateur d'OOGarden. C'est un investissement plutôt raisonnable. Aujourd'hui, les solutions sont de plus en plus performantes, et à l'avenir se lancer à l'international coûtera moins cher." L'e-commerçant, basé à Ambérieu-en-Bugey dans l'Ain, affiche outre-Rhin une croissance du chiffre d'affaires supérieure à 70% en 2018 et 2019. Une croissance qui s'explique par une meilleure disponibilité des produits bien plus que par le trafic.

Fraîchement rachetée par Décathlon, la startup Alltricks, spécialisée dans la distribution d'articles dédiés à la pratique du vélo, de la course à pied et des sports en plein air, réalise, 85% de son chiffre d'affaires en France et 15% à l'international. Si la politique à l'export remonte à 2014, les commandes effectuées sur le site français depuis l'Espagne et l'Italie s'observaient auparavant. A ce jour, le site d'Alltricks est disponible en six langues. "A notre niveau, les sites multilingues représentent des investissements en dizaines de milliers d'euros par an et par déclinaison. Le prix est indexé sur la volumétrie de mot unique que l'on fait traduire chaque année, mais celui-ci varie également en fonction de la taille du catalogue, précise Yohan Michel, directeur marketing d'Alltricks. Dans notre cas, nous répertorions plus de 200 000 références différentes. Certaines sont intemporelles et restent en ligne plusieurs années, d'autres apparaissent en fonction de la collection, suivant le renouvellement des marques". Alltricks compte près de 500 marques sur son site. 

De la traduction en interne…

Spécialiste du matériel de bricolage et jardinage, ManoMano choisit de développer en interne tous ses outils destinés à ses versions multilingues, y compris les traductions. "En allemand par exemple, la longueur des mots nous a contraint à repenser le design de la page afin qu'ils ne dépassent pas, explique Paul Picard, responsable business développement France, Royaume-Uni et Allemagne. Nous aidons également nos partenaires marchands à traduire leurs produits présents sur notre site." Mais la traduction en interne suppose de s'entourer des collaborateurs adéquats. Chez ManoMano, 25% des salariés ne sont pas français. "Nous avons choisi de piloter notre activité à l'international depuis la France, mais nous avons souhaité intégrer dans nos équipes des profils étrangers", souligne Paul Picard.

…au back office adapté

Le directeur marketing d'Alltricks s'attarde sur la difficulté de modifier le back office, pourtant indispensable dans le processus multilingue. "La préparation initiale est conséquente pour accueillir les traductions des différentes langues. Le premier pas peut représenter un effort selon les technologies utilisées mais une fois la première version effectuée, les déclinaisons suivantes sont plus simples à maîtriser." Si les développeurs sont intervenus pour imaginer le nouveau back office, Alltricks s'appuie sur les services d'un prestataire afin d'optimiser la qualité des traductions. Son nom ne sera pas dévoilé par souci de confidentialité : "Notre secteur reste concurrentiel et dans le cadre des sites mutilingues, nous rencontrons certaines difficultés en raison des termes techniques propres à notre marché. La traduction d'une 'fourche à vélo' de l'anglais vers l'espagnol par exemple, nécessite une dose d'intelligence supplémentaire pour affiner le sens, illustre Yohan Michel. Aucun outil de traduction n'est adapté à un marché comme le nôtre." A l'image de ManoMano, la stratégie d'Alltricks à l'export est conduite depuis le siège social, à proximité de Saint-Quentin-en-Yvelines, grâce à des salariés natifs d'Espagne, d'Italie, d'Allemagne, du Royaume-Uni et du Portugal. 

A Paris, la marque de mode responsable Perús, a bâti son site sous Shopify en anglais avant d'envisager une version française puis espagnole. "La plupart de nos clients sont français. Pour la traduction, nous utilisons une application appelée Langify. Ce n'est pas idéal car elle suppose quelques vérifications et des traductions complémentaires, commente Armand de Juniac, cofondateur de Perús. Nous aimerions que Shopify propose son propre outil de traduction intégré directement au back office pour éviter d'utiliser une application dissociée." 

Une fois la problématique des outils résolue, le site multilingue devra répondre à d'autres défis, et notamment d'adapter son offre aux marchés visés. 

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