Le GEO : mode d'emploi concret
Le GEO n'a rien d'une promesse abstraite. Il se traduit par des gestes d'écriture concrets et immédiats.
Là où Google dominait chaque début de recherche, les LLM (ChatGPT, Claude, Gemini…) s’imposent désormais comme point de départ. Mais la véritable bascule n’est pas technologique, elle est expérientielle.
Les moteurs de recherche traditionnels répondent à une requête courte par une liste de liens à explorer. Les utilisateurs viennent y chercher des sources, des comparatifs, des options. À l’inverse, l’usage des LLM repose sur une logique conversationnelle, une question formulée en langage naturel, une réponse directe, contextualisée, parfois même personnalisée.
Du moteur de recherche à l’expérience conversationnelle
L’ère de l’inventaire
Pendant des années, Google et ses équivalents ont façonné nos réflexes numériques. Une recherche commençait par quelques mots-clés, suivis d’une liste de liens à explorer. L’utilisateur cherchait avant tout à dresser un inventaire; comparer les options, consulter plusieurs sources, recouper les avis. La logique était celle de la navigation, parfois fastidieuse, mais nécessaire pour aboutir à une décision éclairée.
L’ère de l’accompagnement
Avec les modèles de langage génératifs, la logique s’inverse. L’utilisateur ne veut plus d’une collection de résultats; il attend une réponse directe. La question est formulée en langage naturel, parfois complexe, et la réponse prend la forme d’une synthèse immédiatement exploitable. Ici, la valeur n’est pas dans l’accumulation, mais dans la clarté.
Le changement de posture
Ce glissement transforme radicalement l’expérience. Le moteur de recherche était un outil d’exploration, le LLM devient un partenaire de conversation. Dans le premier cas, l’utilisateur devait fouiller pour extraire la bonne information ; dans le second, il affine progressivement sa demande et se laisse guider par un échange qui se construit au fil du dialogue.
Une étude menée auprès d’étudiants américains par Rahul R. Divekar, Sophia Guerra, Lisette Gonzalez et Natasha Boos de Bentley University (Waltham, Massachusetts, USA) confirme ce constat; Google est perçu comme un outil d’inventaire et de comparaison de sources, tandis que ChatGPT est vécu comme un interlocuteur conversationnel.
Le GEO en pratique : écrire pour l’expérience conversationnelle
Structurer autrement
La structure reste la première clé. Mais là où le SEO classique consistait à aligner des H2 et à insérer des mots-clés, le GEO appelle une autre logique; organiser pour être compris et réutilisé par une IA.
- Les paragraphes doivent être courts, mais surtout orientés idée par idée. L’IA n’aime pas les blocs confus; elle « découpe » le texte pour le reformuler.
- Les titres intermédiaires (H2, H3) ne doivent pas seulement servir au lecteur humain; ils deviennent des ancres pour l’IA. Un bon sous-titre, c’est presque une mini-question à laquelle le paragraphe suivant apporte la réponse.
- Dans une tribune où une FAQ explicite n’a pas sa place, on peut pratiquer ce que j’appelle les FAQ implicites. Autrement dit, introduire des formulations qui simulent les questions que poserait un utilisateur à un LLM.
- «Pourquoi le GEO change-t-il la façon d’écrire une tribune ? Parce qu’il impose de penser en intentions, pas en mots-clés. »
- « Comment un contenu d’opinion peut-il remonter dans une réponse générative ? En donnant des exemples précis et contextualisés. »
Ces micro-formulations ne cassent pas le style éditorial, mais elles orientent subtilement le texte vers une logique conversationnelle, directement exploitable par un modèle génératif.
Montrer plutôt que répéter son expertise
Le GEO valorise l’autorité, mais pas de la même manière que le SEO. Dans un article d’opinion, on ne va pas insérer des backlinks ou bourrer de références. Ce qui compte, c’est de montrer son expertise dans le texte lui-même.
Concrètement, cela veut dire :
- Raconter des situations réelles, même de manière anonymisée : « Dans telle entreprise, j’ai observé que les contenus optimisés pour les moteurs restaient invisibles dans ChatGPT… »
- Faire parler l’expérience personnelle sans dire « je » en permanence : « On constate par exemple que… », « Dans la pratique, cela se traduit par… »
- Citer une donnée précise ou une tendance récente, plutôt qu’un vague constat. Les LLM aiment ce qui est contextualisé et daté; cela donne du relief et un signal de fraîcheur.
En résumé, dans un texte, on gagne plus à incarner son savoir-faire qu’à se contenter d’affirmer son expertise.
Anticiper les intentions réelles
La plus grande erreur en GEO, c’est de rester prisonnier du réflexe SEO; répéter des mots-clés pour « rassurer » un algorithme. Avec les LLM, cela ne fonctionne plus. Ce qui compte, c’est la capacité à répondre à des intentions formulées en langage naturel.
Prenons un exemple :
- En SEO, on aurait visé « Generative Engine Optimization définition ».
- En GEO, on doit imaginer la vraie demande d’un utilisateur : « Comment savoir si mon contenu est pris en compte par ChatGPT ? », ou « Quelles sont les meilleures pratiques pour optimiser un article web dans l’ère des IA génératives ? ».
Écrire pour ces intentions, c’est projeter le lecteur dans des situations concrètes. Cela peut se faire en intégrant de petits scénarios :
- « Un responsable communication qui veut tester sa visibilité peut simplement poser à un LLM : “quels experts parlent de GEO en France ?” »
- « Un pigiste qui publie une tribune peut demander : “quelles bonnes pratiques GEO s’appliquent aux articles d’opinion ?” »
Ce type de projection transforme le texte en guide implicite, immédiatement actionnable.
Introduire des signaux de confiance « lisibles » par l’IA
Les moteurs comme les LLM accordent de l’importance aux signaux de confiance. Dans les articles, ces signaux ne passent pas par des balises techniques, mais par le contenu lui-même :
- Clarté de l’attribution : le lecteur (et l’IA) doivent identifier qui parle, avec quel rôle, et quelle légitimité.
- Narration incarnée : un récit qui décrit une situation vécue a beaucoup plus de poids qu’un discours théorique.
- Citations et références : pas besoin d’une bibliographie, mais un clin d’œil à une étude ou à une tendance marquante suffit pour ancrer le texte.
Autrement dit, un texte qui respire la crédibilité humaine a plus de chances d’être repris et reformulé correctement par une IA.
Écrire comme si l’IA était déjà un lecteur
Enfin, le meilleur test pour un texte GEO est simple; poser son contenu à un LLM. On copie-colle quelques passages dans ChatGPT par exemple, on demande « résume-moi ce que dit cet auteur ». Si la reformulation est fidèle et claire, c’est que la structure est bonne. Si le résumé sort confus, le texte n’est pas encore GEO-compatible.
Le GEO : écrire pour Google… et pour les LLM
Le GEO n’efface pas le SEO. Les moteurs de recherche classiques existent toujours et continueront longtemps d’occuper une place centrale. Ce qui rend le Generative Engine Optimization passionnant, c’est qu’il s’inscrit dans la continuité du SEO tout en l’élargissant. Et le plus intéressant c’est l’émergence d’alternatives conversationnelles capables de remettre en cause la domination absolue de Google.
Les LLM se nourrissent des contenus issus des moteurs de recherche. Autrement dit, l’un ne vit pas sans l’autre. L’optimisation doit donc se penser comme une continuité. Un contenu bien structuré et crédible reste utile pour Google mais il devient également exploitable par un modèle génératif.
C’est là que se joue l’enjeu. Être pionnier, oui, mais de manière crédible. Le GEO ne doit pas être prétexte à publier n’importe quoi dans l’espoir d’apparaître dans les réponses des IA. Les modèles conversationnels, comme les moteurs avant eux, valorisent l’expertise, l’autorité et la fiabilité. Les entreprises et experts qui sauront conjuguer SEO classique et GEO conversationnel auront une longueur d’avance, car ils auront compris que ce n’est pas une rupture mais un élargissement du champ des possibles.