Ne laissons pas aux big tech le monopole de la donnée

Pour une petite société, entrer dans la compétition implique de devenir plus efficace et plus agile grâce aux données afin d’innover rapidement sans compromettre ses enjeux de sécurité ou de conformité.

Quand il s’agit de données utilisateur, les sociétés qui en sont riches ne cessent de s’enrichir. Le leader incontesté de la donnée consommateur, Facebook, dépassait 2,4 milliards d’utilisateurs actifs mensuels à l’été 2019, tandis que le leader de l’e-commerce occidental Amazon se vantait d’atteindre les 2,6 milliards de visiteurs rien en pour le mois de mars.

Non seulement ces deux leaders captent des données à chaque interaction de leurs utilisateurs, mais en plus ils ont bâti des technologies et les capacités techniques d’exploiter ces données de la manière la plus efficace possible. Les énormes économies d’échelles qu’ils réalisent ainsi ne sont pas qu’une question de technologie et d’humains, elles leur confèrent également des réserves de cash pour faire face aux coûts inévitables liés aux brèches de sécurité, mais aussi aux sanctions des régulateurs en cas de non-conformité. 

Ces ressources en données, tout en les maintenant largement en tête dans leur domaine respectif, leur permettent de diversifier leurs services et de se lancer dans de nouveaux domaines rapidement. Aujourd’hui, Amazon est un vendeur, un épicier, une pharmacie, et plus encore. 

La donnée permet aux grandes sociétés numériques de régner sans partage, alors que les plus petits compétiteurs restent dans l’ombre. Pour une petite société, entrer dans la compétition implique de devenir plus efficace et plus agile grâce aux données afin d’innover rapidement sans compromettre ses enjeux de sécurité ou de conformité.

Transformer la manière d’accéder aux données

Comment entrer dans la compétition pour les données ? Pour entamer cette conversion, il faut effectuer une revue complète des opérations de l’entreprise pour découvrir comment tirer parti des données liées aux interactions de ses clients.

Mais la donnée n’est qu’un matériel brut. Les entreprises doivent se demander ce qu’elles comptent faire des données qu’elles vont collecter : quels produits ou services elles vont pouvoir créer, comment elles vont transformer l’expérience utilisateur, et surtout comment elles peuvent tirer parti de la donnée brute pour nourrir l’innovation et créer de la valeur ajoutée durablement. 

Quelques années auparavant, la donnée était confinée dans des silos centralisés, contrainte à des mouvements lents et confrontée à une exposition croissante au risque. De nos jours, la donnée doit pouvoir circuler rapidement et de manière sécurisée et transversale entre les différents services.

Les entreprises doivent se doter d’une stratégie globale de la donnée. Et ce n’est pas aussi simple à dire qu’à faire. Nos études montrent que moins de 37% des entreprises perçoivent le lien entre les initiatives digitales et leur business, et seulement 25% pensent qu’elles exploitent efficacement leurs données. Dans un paysage économique où les données sont prééminentes dans les décisions au quotidien, voilà qui est alarmant ! 

Pour réussir, il n’y a pas de mystère : il faut s’assurer que tout tourne autour de la donnée. Si les équipes ne croient pas en la donnée et n’ont pas confiance entre elles, il sera impossible de devenir une entreprise de la donnée. Dans la méthode DevOps, il faut commencer par transformer l’organisation interne et l’unifier pour rendre la technologie efficace. DataOps est la méthode équivalente pour la donnée, elle permet de connecter les personnes aux données en évitant les points de frictions et les ralentissements.

S’assurer de la conformité, une protection indispensable

Chaque entreprise a une obligation légale et éthique de s’assurer de la conformité avec les régulations appropriées qui s’appliquent à elle. C’est d’ailleurs le seul moyen de se prémunir contre la toute-puissance des grandes sociétés de la donnée, qui semblent d’ailleurs hors de portée du cadre juridique.

Tout pourrait porter à croire que les big tech sont immunisées contre  la régulation. L’année dernière, il ne s’est pas écoulé une semaine sans qu’on nous informe d’une nouvelle fuite de données majeure. Chacune a coûté en moyenne 2 millions d’euros, sans parler des dégâts sur la réputation et l’organisation de l’entreprise. Des directeurs ont perdu leur emploi suite à des fuites majeures, et chaque matin les responsables sécurité se lèvent en redoutant que les données personnelles des clients ne se retrouvent dans les mains des hackers. 

Les grandes entreprises peuvent éventuellement être capables de gérer des sanctions financières et de les considérer comme un facteur de coût inhérent à l’activité, mais les plus petites n’ont pas ce luxe. A la place, elles doivent trouver un moyen de gérer la croissance de leurs volumes de données et leur manière parfois alambiquée d’être exploitée sans pour autant s’embourber. Pas étonnant que les entreprises s’échinent alors à analyser, et plus encore à quantifier, leur niveau d’exposition au risque. Même lorsque l’on est capable d’identifier, de sécuriser et de livrer de la donnée, il est extrêmement difficile de comprendre pleinement comment elle est utilisée à grande échelle, et plus encore de se prémunir contre les nouveaux risques qu’elle peut rencontrer.

Pourquoi limiter ses ambitions ?   

En réécrivant la physique des données par une approche dynamique, les entreprises peuvent s’assurer que la donnée sensible est sécurisée, et que la donnée utile est accessible aux personnes concernées, quand et où elles le souhaitent. 

Continuer à penser que la donnée est un enjeu uniquement pour les big tech est un aveu d’échec. Chaque entreprise peut et doit se considérer comme une entreprise de la donnée. Cela implique de fournir à chacun la donnée brute et les outils nécessaires pour transformer l’information en insight et idéalement en innovation, depuis l’ingénieur qui produit la donnée jusqu’au data scientist qui l’interprète et au développeur qui la teste et l’exploite.

Il n’y a pas de raison de laisser le monopole de la donnée aux big tech. Chacun peut devenir un challenger, il s’agit d’apprendre à libérer le potentiel interne, de faire circuler la donnée sans contraintes pour accélérer l’innovation.