Amendements pour booster la commande publique auprès des start-up : un peu d'espoir mais beaucoup de limites
1,43%. Voici, selon le gouvernement, le faible pourcentage des commandes publiques captées par les start-up en 2023. Pour gonfler ce chiffre, deux amendements gouvernementaux ont été déposés fin mars dans le cadre du projet de loi de simplification de la vie économique. Adopté par le Sénat en octobre 2024, ce projet de loi est débattu à l'Assemblée nationale jusqu'au 11 avril. Le gouvernement a engagé une procédure accélérée.
Le premier amendement prévoit d'augmenter "le seuil de dispense de publicité et de mise en concurrence préalable pour les achats innovants à 143 000 euros", au lieu de 100 000 euros actuellement. Le second propose de réserver "15 % du montant total des lots d'un marché public portant sur des travaux, fournitures ou services innovants aux jeunes entreprises innovantes".
Pour rappel, l'appellation "jeunes entreprises innovantes" englobe les entreprises qui ont moins de huit ans d'existence, emploient moins de 250 personnes, possèdent un chiffre d'affaires inférieur à 50 millions d'euros (ou un bilan total inférieur à 43 millions d'euros) et réalisent des dépenses en R&D qui représentent au moins 20% de leurs charges.
Seuil européen
Sur le papier, ces deux amendements sont plutôt prometteurs. "Toute mesure qui permet d'aider les start-up à capter davantage de commandes publiques est forcément positif", indique Maya Noël, directrice générale de France Digitale. "On sait que c'est notamment grâce à la commande publique que des projets à forte valeur technologique se sont développés. Space X ne serait pas devenu l'entreprise qu'on connait sans son partenariat avec la Nasa".
Mais quand on creuse un peu, ces deux amendements ne répondent pas tout à fait aux attentes de l'écosystème. "Rehausser le seuil de dispense à 143 000 euros, c'est bien pour une start-up qui fait du SaaS. Mais pour une start-up spécialisée dans le hardware ou la deeptech, il s'agit d'un montant assez faible. Je pense que 300 000 euros aurait été plus approprié". A noter que le montant de 143 000 n'est pas anodin. En effet, l'Europe avait déjà fixé fin 2023 ce fameux seuil de dispense à 143 000 euros. L'amendement déposé par le gouvernement pourrait surtout avoir pour objectif de respecter les exigences européennes plutôt que d'aider vraiment les start-up à remporter davantage de marchés publics.
Pas d'obligation pour les 15%
Le deuxième amendement n'échappe pas non plus aux critiques. "C'est bien de vouloir réserver 15% des achats innovants aux start-up, mais cet amendement ne contient aucune obligation. C'est facultatif. On dépend de la volonté des acheteurs publics et ceux-ci n'ont pas tous le réflexe de solliciter des start-up", déplore Maya Noël. "Autre problème, la définition d'achat innovant (qui concerne donc les deux amendements, ndlr) est très complexe. L'acheteur public ne sait pas forcément si sa commande peut être qualifiée comme tel donc on a comme une petite barrière à l'entrée". En effet, la notion d'achat innovant ne possède pas de définition précise mais repose sur un faisceau d'indices (disponible ici).
Devant les limites de ces deux mesures, la directrice générale de France Digitale pousse pour une autre solution : "On aimerait un Small Business Act version Europe, qui permettrait d'instaurer une préférence à l'achat en faveur des start-up européennes en ce qui concerne les sujets technologiques à enjeu". On n'y est pas.