Et si on inventait le -1% carbone, une fiscalité récompensant la baisse des émissions de CO2 ?
Face à l'urgence climatique, misons sur une fiscalité incitative : valoriser les efforts de réduction de CO2 plutôt que punir, pour redonner sens, efficacité et leadership à l'action écologique.
La boussole d’un dirigeant, d'une entreprise, d'une organisation, d’un territoire, c’est de savoir garder son sang-froid quand le temps est à l’orage. La période actuelle nous met toutes et tous à l’épreuve. Notamment quand face au risque de guerre commerciale, l’Europe semble revoir à la baisse ses ambitions en matière d’enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) en simplifiant et en minorant les impératifs extra-financiers de sa directive CSRD via son projet Omnibus, afin de ne pas entraver sa compétitivité.
Pas de planète B
Et pourtant, dans ce maelström, la nécessité absolue de réduire nos émissions de CO2 demeure. Personne de sensé ne pourrait en douter. Le fameux précepte de 2014 de l’ex-Secrétaire général de l’ONU, le sud-coréen Ban-Ki Moon, « il n’y a pas de plan B, car il n’y a pas de planète B » continue à s’imposer à toutes et à tous. Et la litanie des records de chaleur établis mois après mois sur toute la planète vient nous le rappeler sinistrement.
Le temps n’étant pas - et c’est un euphémisme - aux accords internationaux, inutile de compter sur un hypothétique consensus sur l’établissement d'un prix mondial du carbone. On voit mal Washington, Moscou ou Pékin s’associer à une telle initiative en 2025.
Le temps passe, le climat n’attend pas. Il faut redonner la foi sur le terrain à ceux qui agissent ! Et des femmes et des hommes qui agissent sur le terrain, il y en a. Dans les territoires, en France et ailleurs, nous voyons fleurir des initiatives positives pour le climat portées par des entreprises dynamiques et par des pionniers finalement. C’est le cas par exemple de la fabrique des possibles à Marseille ou du développement des entreprises à mission dans le cadre de « start-ups France 2030 ».
En finir avec une fiscalité écologique punitive
Comment faire pour aller plus, au-delà de ces initiatives pionnières ? Le logiciel du passé, existant en Europe et notamment en France, nous a habitués à une fiscalité écologique punitive. Sans résultat très probant et parfois générateur de crise comme celle des gilets jaunes. Il est temps de voir les choses autrement et de proposer autre chose. Et si l’on passait d’une fiscalité punitive à une fiscalité écologique incitative, récompensant les bons élèves plutôt que sanctionnant les mauvais ? Et si l’on créait un système - mieux bordé et sécurisé que les droits à polluer ou les certificats d’énergie - permettant de gratifier celles et ceux qui réussissent réellement à réduire leurs émissions de CO2 ?
Réduire de 1% les impôts d’une entreprise qui baisserait ses émissions de CO2
On objectera que l’heure n’est pas à la générosité publique compte tenu de nos niveaux abyssaux d’endettement. Mais il s’agit là d’une question réellement vitale : les bilans publics sur les conséquences sanitaires des taux de pollution sont sans appel. Et l’on ne parle pas ici de distribuer des milliards, seulement de faire un peu mieux que couvrir les investissements nécessaires pour cette réduction des émissions de carbone. Pourquoi ne pas proposer de réduire de 1% les impôts d’une entreprise, grande, moyenne, petite et même très petite, voire d’un contribuable, qui réussirait à baisser ses émissions de CO2 ? 1%, ce n’est pas le bout du monde. Mais le symbole serait fort. Il constituerait un véritable changement de paradigme, de gestion par l’incitatif, en donnant du baume au cœur à ceux qui agissent et qui entraînent dans leur sillon une dynamique d’exemplarité. Qui, de l’agriculteur à l’industriel en passant par le particulier, serait contre quelques milliers, dizaines de milliers ou millions d’euros récompensant son efficacité énergétique et sa vertu émettrice ?
Redonner à la France et à l’Europe le leadership pour la planète
Un tel système permettrait de réconcilier Français et Européens avec l’écologie, le respect de l’environnement, la lutte contre le réchauffement climatique, en leur montrant que cela peut leur être bénéfique, à court, moyen et long terme, tant financièrement que pour leur santé et celle de leurs enfants. Relisons Sénèque : « Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles ». Osons donc inventer une fiscalité française et européenne qui récompensera la réduction des émissions de CO2. Elle pourrait faire école dans d’autres endroits du monde. Et redonner à l’Europe dans ce domaine un leadership mis à mal depuis le succès des accords de Paris de la COP21.