Avec Azure Stack Edge, Microsoft défie Amazon dans l'IA de proximité

Avec Azure Stack Edge, Microsoft défie Amazon dans l'IA de proximité L'éditeur de logiciels pourrait-il prendre l'ascendant sur AWS dans les services cloud d'IA déportés en frontière de réseau ? Le point sur une stratégie qui s'inscrit dans une longue histoire.

Dès 2016, Microsoft a pris le marché de court en lançant Azure Stack. Objectif du géant américain du logiciel : donner la possibilité à ses clients d'installer Azure chez eux. Pré-intégré à des racks de 4 à 16 serveurs signés HPE ou Dell EMC, le produit reprend les principaux services du cloud public, du provisioning de machines virtuelles et de ressources réseau ou de stockage jusqu'au serverless, et permet de les consommer à demande via un modèle de souscription. En 2019, Microsoft enrichit cette première offre d'une infrastructure hyperconvergée sous Windows ou Linux. Le Graal du cloud privé. Baptisée Azure Stack HCI, cette solution, jusqu'alors connue sous le nom de Windows Server Software Defined (et limitée à Windows) combine ainsi la virtualisation du calcul, du stockage et du réseau. Annoncé en parallèle, Azure Stack Edge complète l'édifice. Sans nul doute la solution la plus innovante de la gamme Stack, ce dernier s'articule autour d'un serveur optimisé pour exécuter localement des modèles de machine learning (ML) préalablement entraînés sur Azure. L'enjeu est évidemment de tendre vers un traitement temps réel en évitant les allers-retours vers le cloud.

Des processeurs FPGA

Sous la capot, le serveur embarque un processeur FPGA (pour Field Programmable Gate Array) type Intel Arria 10, taillé pour l'inférence de modèles. Les scénarios pris en charge : la reconnaissance d'images et les réseaux de neurones TensorFlow. En amont, les modèles peuvent être créés et entraînés par le biais d'Azure Machine Learning sur le cloud public de Microsoft, avant d'être déployés dans un container logiciel. Pour accueillir les données en provenance des systèmes IT ou objets connectés locaux, Stack Edge est équipé d'une unité de stockage de 12 terabytes. "Les data sets d'apprentissage complets pourront y être transférés si besoin pour reformer et améliorer le ML", complète-t-on chez Microsoft. L'appliance est en outre dotée d'une passerelle pour les réseaux cellulaires privés avec la capacité d'ingérer simultanément plusieurs flux IoT. Du coup, Stack Edge est capable de fonctionner pleinement en mode déconnecté.

"Azure Stack Edge fournit aux réseaux d'implantations des unités de calcul de proximité qui s'installent sur site"

"Azure Stack Edge fournit aux réseaux d'implantations des unités de calcul de proximité qui s'installent sur site", commente Xavier Perret, directeur Azure chez Microsoft France. "Ses domaines d'application sont nombreux. Il peut s'agir par exemple de détecter des anomalies ou faire de la maintenance prédictive sur un site industriel via la reconnaissance d'images (en provenance de caméras, ndlr) ou encore d'anticiper les impondérables dans la gestion des stocks ou la chaine logistique dans la vente de détail. Globalement, Azure Stack Edge cible les processus de production qui impliquent d'être pilotés en temps réel sans dépendre de la latence réseau."

Autre cas d'usage évoqué par Microsoft : l'exemple d'un centre de support client nécessitant la mise en œuvre d'un système de reconnaissance vocal sur site pour aiguiller les appels entrants.

Architecture d'Azure Stack Edge issue d'une présentation de l'ESN Neal Analytics © Neal Analytics

A la différence de Stack Hub et Stack HCI qui s'achètent sur étagère avant de pouvoir en consommer les services, Azure Stack Edge est full cloud. Présenté comme un service Azure à part entière, le serveur est entièrement managé par Microsoft et fait l'objet d'un pricing mensuel de 586,9 euros. Les clients peuvent le commander directement sur le portail Azure. Une fois installé et connecté localement, Stack Edge se pilote via la console du cloud de Microsoft. Conservant la pleine souveraineté de leurs données, les clients bénéficie de tout l'outillage Azure pour gérer les déploiements, le contrôle d'accès et orchestrer les charges de travail. Un pont est également disponible vers les API des services de stockage du cloud de Redmond, notamment vers Azure Blob Storage pour le stockage en blocs et vers Azure Files pour le stockage de fichiers. "En fonction des besoins locaux en traitement et de leur montée en puissance, il est possible de connecter plusieurs serveurs Stack Edge, et d'en ajouter ainsi au fur et à mesure pour créer un mini centres de données", précise-t-on chez Neal Analytics, ESN américaine experte en IA et data analytics, partenaire de l'éditeur.

Une offre moins chère

Pour la suite, Microsoft planche sur plusieurs évolutions. "Azure Stack Edge prendra bientôt en charge de nouvelles capacités de calcul, notamment les machines virtuelles et les cluster Kubernetes", confie Xavier Perret. "Nous comptons aussi d'enrichir cette offre de processeurs graphiques GPGPU de type Tesla Nvidia dessinés pour le calcul haute performance". Last but not least, le groupe de Satya Nadella est en train de concevoir une version renforcée d'Azure Stack Edge pour les missions déportées, sur des chantiers ou des sites industriels à risque notamment. Alimentée par batterie, elle pourra venir se nicher dans un sac. "Suite à des catastrophes naturelles par exemple, ses capacités en machine learning peuvent permettre de retrouver une personne disparue (via des algorithmes de vision par ordinateur, ndlr)", commente Dean Paron, directeur partenaire du management produit d'Azure Storage et Edge (voir la vidéo). Aucune date précise n'est pour l'heure communiquée concernant cette feuille de route.

Les serveurs Azure Stack Edge peuvent être agglomérés pour former un mini data center. © Microsoft

Face à Microsoft, Amazon Web Services (AWS) est pour l'heure le seul cloud à commercialiser un équivalent d'Azure Stack Edge. Baptisé Outpost, il a été lancé à l'occasion de son dernier événement client annuel, re:Invent, qui s'est tenu en décembre 2019. A l'instar de Stack Edge, cette solution se présente sous la forme d'une infrastructure serveur 100% managée.

AWS Outpost fait tourner l'orchestrateur Kubernetes d'Amazon (EKS) en plus de son environnement de container as a service (ECS). Mais également Amazon RDS côté base de données et Amazon EMR pour les traitements distribués. Ce dernier donne d'ailleurs la possibilité de choisir Apache Spark et sa librairie de machine learning MLlib.

Aux côtés de capacités de stockage Amazon EBS, Outpost affiche en portefeuille une grande variété d'instances EC2 parmi lesquelles des machines GPU (G4dn) taillées pour exécuter les modèles de ML. Toutes ces ressources informatiques font évidemment l'objet d'une tarification additionnelle basée sur la grille de prix d'AWS. Cette tarification à l'usage vient s'ajouter au coût initial d'Outpost qui est commercialisée sous la forme d'une souscription mensuelle (prix d'entrée : 8 000 dollars par mois) ou via un versement unique au moment de la commande (prix d'entrée : 270 644 dollars). Il n'y a pas photo : Azure Stack Edge est beaucoup moins cher.