Continuons à croire en OVHCloud et au cloud européen

L'épreuve que traverse OVHCloud ne doit pas remettre en cause sa vision stratégique. Mais elle est l'occasion d'une prise de conscience politique et technique salutaire selon le directeur général d'ITS Integra, une ESN qui est aussi Advanced Partner d'OVH.

L’incendie spectaculaire qui a détruit dans la nuit du 9 au 10 mars les datacenters strasbourgeois d’OVHCloud (doublé d’un nouvel incident dans la soirée du 19 mars) et son impact sur de très nombreux services en ligne ont marqué les esprits. Et pour cause : à travers ses différents centres, à Strasbourg et ailleurs, la société héberge les deux-tiers du web français…

On se doit d’abord d’assurer ses équipes de notre soutien, qui travaillent d’arrache-pied pour faire face à ce désastre via un plan ambitieux. Mais le grand élan de solidarité du secteur est déjà contrebalancé par les critiques ou sarcasmes qui annoncent la fin du rêve d’OVHCloud de s’inviter, en tant qu’acteur français et européen, dans la guerre des hyperscalers internationaux et ce, alors que les débats font rage autour du Cloud Act et du choix de l’hébergeur du futur Health Data Hub français.

Non au bashing

Évitons pourtant de sombrer dans le trop facile French (et European) bashing et encore moins dans la Schadenfreude à l’égard d’OVHCloud, cette joie malsaine de voir trébucher un acteur essentiel que certains ont caricaturé en grenouille qui voudrait être plus grosse que le bœuf. L’ambition affichée de l’opérateur de jouer dans la même ligue que ses concurrents américains (et chinois…) peut paraître élevée : ces grands acteurs ont déjà investi des dizaines de milliards de dollars dans leurs infrastructures. Mais constituer une alternative européenne crédible et être reconnu comme une solution sérieuse dans un mix cloud hybride reste un objectif légitime.

Les incidents sur les services cloud sont certes toujours très visibles, alors qu’on parle moins des pannes et indisponibilités totales ou partielles des services les plus consommés des grands acteurs américains : accès impossible aux mails et aux fichiers stockés dans le cloud, services visibles rendus indisponibles, problèmes de saturation , pertes de données clients… Aucun de ces dysfonctionnements n’a pourtant véritablement terni l’image de fournisseurs comme Microsoft ou AWS… ni ralenti leur croissance. Ils ont simplement réagi en améliorant et fiabilisant leurs services et en ajustant leur discours envers les clients.

La réplication de données et les plans de reprise d’activité (PRA), désormais érigés en bonnes pratiques, ne répondent pas à un manque de confiance dans la solidité des infrastructures, mais à une réalité qui ne date pas de l’ère du cloud public. Il est inconcevable aujourd’hui de ne pas disposer d’un PRA a minima pour ses données critiques, même si force est de constater que les entreprises (ou les organismes publics, notamment locaux) n’en sont toujours pas systématiquement équipées. L’accident de Strasbourg nous rappelle finalement que le cloud, de surcroît public, n’est pas magique et obéit peu ou prou aux mêmes règles que les cloud privés ou les fermes de serveurs physiques. Plutôt qu’une remise en question totale, voyons-y un nouveau déclencheur de prise de conscience.

Oui à l’accompagnement

Sans présager des causes de l’incendie d‘OVHCloud et d’éventuelles insuffisances des moyens anti-incendie - que les investigations en cours vont déterminer -, des améliorations doivent évidemment être apportées aux datacenters pour homogénéiser les installations et services de protection. Le concept même du cloud public est de proposer des services en auto-approvisionnement et c'est bien à l'utilisateur d’architecturer correctement son dispositif, de valider l’existence de backup externalisés, de mettre en place le PRA. À l’instar de ses grands concurrents, OVHCloud a adopté une stratégie pour aider des clients utilisateurs en recrutant des partenaires intégrateurs, MS(S)P, éditeurs et de conseil pour prendre en charge cet accompagnement et apporter plus de garanties d’un point de vue architecture plateformes, services managés, sécurisation sur-mesure, etc.

Je ne suis pas le seul à souhaiter à OVHCloud de se rétalir le plus rapidement possible et de continuer à œuvrer pour accomplir sa vision stratégique. Comme pour ses confrères non-européens, face aux AWS, Microsoft, Ali Baba et Google, le mot d’ordre doit être rebuild better, move on, avec toujours autant de conviction et d’enthousiasme. Montrer que l’on croit fermement en ce que l’on fait, malgré les déconvenues, est la meilleure réponse aux détracteurs ou aux sceptiques. Et le meilleur moyen de relever les plus grands challenges.