Benoît Sibaud
Président
APRIL (Association pour la Promotion et la Recherche en
Informatique Libre)
April.org
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« La loi sur le droit d'auteur votée à main levée par quelques
députés le 30 juin dernier est à ce jour la pire loi sur
le sujet jamais votée en Europe.
Les dispositifs de contrôle de l'usage des oeuvres numériques
(les fameuses "mesures techniques" ou DRM), imposés par les
producteurs et les éditeurs de logiciels dominants et protégés
par cette loi, sont une aberration d'un point de vue technique
car ils ne gêneront pas les contrefacteurs professionnels.
Ils sont en outre un danger pour la sécurité des systèmes
d'information et les libertés individuelles.
La loi DADVSI crée notamment :
une censure des auteurs de logiciel libre (article
7 bis A) : création d'une autorité administrative pouvant
interdire la publication d'un logiciel libre accédant à des
informations protégées, en négation du droit moral de divulgation
des auteurs de logiciels libres, droit reconnu d'ordre public
qui conditionne l'exercice de la liberté de création, liberté
fondamentale ; les utilisateurs de logiciels libres qui
passeront outre risqueront donc, pour les premiers, 3.750
euros d'amende, pour les seconds, six mois d'emprisonnement
et 30.000 euros d'amende ;
une responsabilité aggravée du fait d'autrui pour les internautes
(article 14 ter A), les auteurs et éditeurs de logiciels,
les fournisseurs d'accès et les éditeurs de services en ligne
(12 bis, 14 quater) et ce pour imposer des dispositifs de
filtrage et empêcher la circulation d'informations ou de moyens
techniques permettant de les contourner, au risque de porter
atteinte à la vie privée, à la liberté de communication et
à la liberté d'expression. L'article 14 ter A prévoit ainsi
une obligation pour les fournisseurs d'accès de mettre à disposition
de leurs abonnés des DRM et une obligation pour les internautes
de les installer ;
une atteinte à la libre concurrence (7 bis A), par
la mise en place de licences RAND sur les informations essentielles
à l'interopérabilité et la création d'une obligation de résultat
surréaliste en terme de contrôle d'usage pour les auteurs
et éditeurs de logiciels désireux de publier des lecteurs
interopérables d'oeuvres numérisées ;
une atteinte à la neutralité de la technique (12 bis)
en considérant qu'un logiciel communicant peut être "manifestement
destiné" à l'échange de données numériques protégées par le
droit d'auteur, et en punissant de trois ans de prison et
300.000 euros d'amende, toute personne qui concevrait, distribuerait
ou inciteraient à l'usage d'un tel logiciel.
Contrairement aux mensonges éhontés du gouvernement, des rapporteurs
et des porte-paroles de la majorité, la sécurité de développement
du logiciel libre n'est absolument pas garantie par cette
loi. Alors que les ténors de l'informatique s'investissent
de plus en plus dans le développement de projets logiciels
libres, que les administrations poussent majoritairement à
l'utilisation des technologies libres, je ne pense pas que
ce soit le moment de mettre gravement en danger l'industrie
européenne. »
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