Marc Lolivier (Délégué général de la Fevad) Marc Lolivier (Fevad) : "Comment démasquer les faux particuliers du CtoC"

Les professionnels qui se font passer pour des particuliers sur les plates-formes CtoC feraient perdre 59 millions d'euros au fisc en 2008. La Fevad travaille avec Bercy pour mieux les détecter.

La Direction générale des impôts a élaboré un premier projet prévoyant de soumettre à l'impôt sur le revenu tous les particuliers réalisant, sur au moins 4 ventes, plus de 2 000 euros de recettes sur le Web. Est-ce une bonne idée ?

Marc Lolivier. Les professionnels qui se font passer pour des particuliers sur les plates-formes de vente entre internautes constituent une forme de paracommercialisme auquel nous nous intéressons depuis longtemps. Nous avons d'ailleurs créé une charte avec le ministère du Commerce et les principaux acteurs concernés pour lutter contre ce phénomène. Dans cette charte, les plates-formes s'engagent à encourager les professionnels à se déclarer comme tels.

Aujourd'hui, la question de fond est celle-ci : qu'est-ce qu'un professionnel ? C'est une question compliquée car dans la pratique, il n'y a pas de vérité absolue. Une réponse fondée sur un seuil, comme ce que proposait initialement la DGI, n'est à notre sens pas adaptée. D'abord parce qu'on arrive beaucoup trop vite à 2 000 euros en une année, même avec un nombre restreint de ventes. A ce rythme là, 30 % des vendeurs seraient des professionnels. De plus, sur quoi voudrait-on faire porter cet impôt ? Il s'agit de ventes et non de bénéfices. Mais à notre connaissance, cette idée ne figure plus dans le projet du gouvernement. Bercy désire discuter avec les acteurs du secteur, ce que nous comptons faire avec beaucoup d'enthousiasme.

Vous réfléchissez donc à une autre distinction entre particulier et professionnel...

Nous cherchons effectivement à déterminer des critères adaptés. En l'occurrence, les critères pour dire qu'un vendeur est un professionnel pourraient être liés à son intention : est-ce qu'il achète pour revendre ? Le nombre de transactions et leur montant doivent également être pris en compte. Il faut donc trouver des critères pertinents et retenir une bonne combinaison. Par exemple, le seul nombre de ventes de suffit pas, car tous les collectionneurs seraient considérés comme des professionnels. Pour construire cette définition, nous pourrons également nous appuyer sur une jurisprudence et ne pas oublier que cette régulation pourrait s'appliquer de façon identique aux petites annonces et aux vide greniers : on ne doit pas stigmatiser Internet.

Le projet de loi de finance rectificative du 19 novembre retiendra au moins un aspect du projet de Bercy : donner aux agents du fisc le droit de consulter les données compilées par les plate-formes. Qu'en pensez-vous ?

Instaurer une base juridique pour permettre à l'administration de demander aux sites ces données - volume et fréquence des ventes en particulier - est une bonne chose. Les plates-formes, qui n'ont rien à cacher, sont tout à fait disposées à mettre en place un système qui rende ceci possible, d'autant qu'elles n'ont aucun intérêt à laisser prospérer le paracommercialisme. Nous réfléchissons en outre à d'autres données qui pourraient utilement être communiquées au fisc.

Au-delà du dialogue avec les pouvoirs publics, nous sommes très conscients de notre responsabilité collective. Les plates-formes font donc preuve d'une réelle volonté pour uniformiser les critères d'identification des professionnels qu'elles emploient aujourd'hui.