Ventes privées sur Internet : une zone de non droit ?

Les sites de ventes privées se multiplient sur Internet. Toutefois, ces sites semblent bénéficier d'un certain flou juridique. Qu'en est-il exactement ?

En matière de soldes, l'utilisation du mot en lui-même ne peut se faire que dans le cadre du strict respect des conditions des soldes, quelle que soit son utilisation, y compris dans le cadre d'une publicité ou de l'adresse d'un site Internet.

Les conditions sont relatives aux dates, qui sont fixées au niveau de chaque département par le Préfet après consultation des organisations professionnelles concernées. Elles sont d'une durée maximale de six semaines et au nombre de deux périodes par année civile.

L'article L310-3 alinéa 1 du Code de Commerce définit les soldes comme des "ventes accompagnées ou précédées de publicité, annoncées comme tendant, par une réduction de prix, à l'écoulement accéléré de marchandises en stock". Le commerçant doit avoir acquis les marchandises au moins un mois avant la date de démarrage des soldes et son stock ne peut être renouvelé. Enfin, il ne peut vendre à perte.

Les problèmes juridiques posés par les sites de vente privée
Or, les sites de ventes privées posent plusieurs problèmes juridiques. Il s'agit, par exemple, de la difficulté à définir un prix de référence.

Sont à ce titre punis les soldes en dehors des périodes autorisées, comme le fait, par exemple, d'envoyer des milliers de cartons d'invitation indiquant des remises importantes pour une période juste antérieure à celle légale (CCass., Ch. Crim., 19 février 2003) ; ou encore une campagne publicitaire organisée pour convaincre la clientèle que l'objectif de la société était de réaliser un écoulement accéléré des stocks par une réduction des prix, réalisée quinze jours avant la date d'ouverture des soldes (CCass., Ch. Crim., 13 janvier 2004).

De même, les dénominations de magasins ou dépôts d'usine font l'objet d'un encadrement par la loi, ces dénominations ne pouvant être utilisées que par les producteurs directs de ces produits, et pour les saisons antérieures.

Les liquidations, quant à elles, concernent les ventes tendant à l'écoulement accéléré de stock de marchandises suite à une décision de cessation, suspension saisonnière, ou de changement d'activité, ou encore de modifications substantielles des conditions d'exploitation. Elles doivent faire l'objet d'une déclaration préalable auprès des autorités concernées.

De façon générale, l'usage a admis la vente privée à une clientèle réservée, à condition que le nombre de cartons d'invitation soit limité, et que les termes utilisés par ce dernier ne reprennent pas l'emploi du mot "soldes" ou ses dérivés.

Vente privée sur Internet : une zone de non droit ?
L'application de ces ventes privées à Internet bénéficie, selon certains, d'une zone de non-droit.

En effet, le critère mis en exergue par la Jurisprudence citée plus haut réside dans la publicité utilisée. Or, le succès de ces sites de ventes privées ne réside pas forcément dans les méthodes de publicité utilisées, mais dans l'attente du consommateur et son sentiment d'appartenance à un club préférentiel.

De même, certains sites sont détenus par les producteurs directement, qui utilisent ces vitrines électroniques pour écouler des stocks de saisons précédentes, comme ils pourraient le faire, au travers de magasins d'usine, mais sous des enseignes virtuelles plus attractives pour le consommateur, et moins identifiables pour le producteur. Ces sites sont souvent le regroupement de plusieurs producteurs.

Il semble plus difficile de considérer que ces sites de ventes privées soient l'équivalent de liquidateurs, dans la mesure où les stocks rachetés ne font pas toujours l'objet d'une liquidation au sens de la loi et de l'article L310-1 du Code de Commerce, et où ils ne sont que très rarement déclarés préalablement, dans la mesure où la "liquidation" se trouve alors permanente et entre en contradiction avec ledit article, prévoyant la précision d'un lieu et une durée de deux mois.

Toutefois, il convient de rappeler qu'une vente qui ne serait ni précédée ni accompagnée de publicité ne serait pas assujettie à la définition des "soldes" prévue par le Code de Commerce.

Les sanctions encourues
Pour des soldes réalisés en dehors des périodes légales, ou sur des marchandises acquises depuis moins d'un mois, ou encore pour toute utilisation frauduleuse du terme "soldes", la personne morale organisatrice peut être punie d'une peine de 75.000 euros d'amende, outre des peines complémentaires, notamment de publicité.

Ainsi, évitant l'ensemble des écueils prévus ci-dessus, le site de ventes privées pourrait être qualifié de site de commerce électronique, comme toute autre activité assurée à distance et par voie électronique. A ce titre, il devra respecter le droit de la vente à distance ainsi que la loi de Confiance dans l'Economie Numérique du 21 juin 2004.

Enfin, le droit des données personnelles ne sera pas absent de ce contexte juridique. La collecte d'e-mails devra préciser le cadre de l'exploitation ultérieure des coordonnées du client potentiel, et respecter l'ensemble des formalités préalables auprès de la CNIL.