L’insoutenable légèreté de la Google Car

La sécurité pourrait-elle devenir un facteur d’allègement des voitures ? Regardez la Google Car : celle-ci a l’air frêle, ne trouvez-vous pas ? Pas vraiment rassurant en cas de choc… Et si cette voiture était justement conçue pour ne plus avoir d’accident ?

Cette voiture serait alors à la fois sûre et légère, on pourrait même dire « légère parce que sûre ».
Dans les 30 dernières années, la tendance a été à l’embonpoint des voitures, notamment en raison d’une recherche légitime de sécurité : carrosseries comportant des zones d’absorption des chocs, airbags en pagaille, etc...
Une Peugeot 207 pesait plus de 1,1 tonne à la fin des années 2000 quand une 205 se situait aux alentours de 800 kg dans les années 80. Cette tendance est à présent stoppée, une 208 étant plus légère qu’une 207 de 50 à 100 kg environ. Cependant, le chemin à parcourir est encore long : d’après Nicolas Meilhan, Ingénieur-Conseil Energie et Transport chez Frost & Sullivan (1), la « voiture du futur » devrait peser moins de 500 kg.
Alléger une voiture, cela coûte encore cher du fait des matériaux employés : aciers à haute élasticité, aluminium, etc… Les constructeurs y parviendront probablement à moyen ou long terme. Nos constructeurs nationaux n’ont d’ailleurs pas été en reste, lors du dernier mondial, avec des concepts prometteurs destinés à consommer moins de 2 L/100km : Renault Eolab et Citroën C4 Cactus Airflow.

Cependant, il existe une voie complémentaire pour alléger les véhicules : la sécurité, cette fois comme facteur d’allègement. En effet, si l’accident de voiture devenait un événement « hautement improbable », les dispositifs de sécurité que l’on connaît aujourd’hui seraient moins nécessaires, ce qui permettrait de concevoir des automobiles plus simples et plus légères.

L’accident de voiture peut-il devenir « hautement improbable » ?

On distingue la sécurité active (on cherche en premier lieu à éviter l’accident) et la sécurité passive (on cherche ensuite à réduire la gravité de l’accident si celui-ci ne peut être évité).
Pour une automobile, la sécurité active s’est limitée jusqu’à présent à aider le conducteur à garder le contrôle de son véhicule (ABS pour le freinage, ESP pour la tenue de route). Les accidents de voiture restant relativement « fréquents », on a beaucoup travaillé sur la sécurité passive (zones de déformation, airbags). Pendant 30 ans, on a donc alourdi les voitures pour mieux protéger les occupants.
On peut dire aussi de ce qui précède que la sécurité active d’une voiture repose principalement sur le conducteur. Or, bien que la machine ne remplacera jamais l’être humain, ce qui est heureux, on sait faire des machines qui font beaucoup moins d’erreurs que lui (2). Un parallèle avec le ferroviaire est ici éclairant :
Compte tenu de l’extrême gravité d’un accident de train (collision, déraillement, etc…), la sécurité d’un train repose sur des automatismes tels que le freinage d’urgence si un train se rapproche trop de celui qui précède ou s’il arrive trop vite dans une courbe (3). En clair, des dispositifs de sécurité « prennent la main » en cas d’erreur de l’agent de conduite.
De ce fait, le train est aujourd’hui le moyen de transport le plus sûr, loin devant l’automobile.

Revenons à l’automobile : les technologies se développent actuellement pour que les véhicules corrigent eux-mêmes leur trajectoire en cas de changement intempestif de file, freinent automatiquement en cas de détection d’obstacle ou communiquent entre eux. La sécurité active prend alors une toute autre dimension puisque la voiture devient capable, elle-même, d’éviter l’accident, tout comme le train.
Il devient donc raisonnable d’envisager que le niveau de sécurité des voitures va se rapprocher, à terme, de celui des trains.
Ceci est d’abord prometteur pour la sauvegarde des vies humaines. Cela devrait aussi réduire les besoins en sécurité passive, et ainsi permettre de simplifier et d'alléger la conception des voitures, ce qui est bon pour l’écologie.
En conclusion, la voiture du futur (4) sera sûre et légère… ou ne sera pas (5)!


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(1) Voir à ce sujet les nombreux travaux et documents de Nicolas Meilhan sur Internet.
(2) D'après Renault, 90 % des accidents sont causés par des erreurs humaines.
(3) Il semble que le tronçon de 4 km précédant Saint Jacques de Compostelle était dépourvu de ce dispositif, ce qui a probablement rendu possible le déraillement du 24 juillet 2013.
(4) Renault estime à 2030 l'avènement de la voiture 100% autonome. La voiture "sans accident" est un préalable à la voiture autonome mais on peut penser qu'elle sera effective à peu près au même moment.
(5) L'avènement de la "voiture sans accident" pose deux questions :
  • la transition : comment gérer la coexistence de voitures capables d'éviter les accidents avec d'autres dépourvues de ces technologies (l'accident sera toujours possible durant cette transition).
  • la voiture "sans accident" s'imagine bien sur des infrastructures dédiées telles que les autoroutes, elle sera plus difficile à réaliser dans la circulation foisonnante des centres villes.