Les assureurs sur Internet : de la volonté mais quels résultats ? Internet au cœur du dispositif cross-canal

Le Web tient une place de plus en plus centrale dans le dispositif cross-canal des assureurs. S'exprimant sur le sujet lors du forum de Benchmark Group, Nicolas Mortel (News Assurances Pro) a expliqué avoir étudié les modèles économiques à trois ans des activités Internet des assureurs. Son constat est sévère : "On ne prévoit pas qu'il soit possible d'atteindre la rentabilité dans le secteur de la vente en ligne d'assurance auto. La vente sur Internet est un investissement à perte pour les assureurs." Ceci même en excluant les investissements publicitaires, normaux pour installer une marque.

Chez MMA, Thierry Crahes explique ne pas opposer un canal à l'autre, car les souscriptions full-Web sont trop marginales. "Nous regardons la transformation globale et optimisons toute la chaîne de transformation. Avec cette approche, le retour sur investissement est très correct." Il s'agit alors surtout de bien équilibrer les investissements sur chaque canal.

Diane Larramendy, directrice marketing du comparateur LeLynx, propriété du britannique Confused.com, explique que le taux de transformation varie selon les assureurs entre 8 et 20 % en France, soit un taux inférieur à nos voisins européens. "Il s'agit du principal challenge pour les comparateurs comme pour les assureurs, qui doivent accompagner le consommateur davantage." LeLynx a d'ailleurs créé un site plus didactique et ouvert une hotline pour accompagner les internautes.

Le fondateur d'Assurland Stanislas Di Vittorio souligne pour sa part que les trois quarts des internautes comparant les assurances sur son site ne choisissent pas le prix le moins cher qui leur est proposé, mais opèrent un arbitrage entre le prix et la marque. "Beaucoup d'internautes conservent une réticence par rapport aux marques peu connues."


Sur la question des freins au développement des souscriptions en ligne qui proviendraient des réseaux d'agences, Nicolas Mortel évoque "un problème de fond politique" : les agences peuvent penser qu'elles vont perdre des clients au profit du site. En outre, les compagnies d'assurance seraient dans une situation de cumul de coûts, notamment d'acquisition de clients, entre les agents et le Web. "Enfin, les réseaux d'agents généraux ne sont pas structurés et dimensionnés pour traiter les devis Internet qui arrivent en agence". Le spécialiste précise que jusqu'à 50 % des devis Internet peuvent ne pas être traités par une agence.

Chez MMA, Thierry Crahes rétorque ne pas vouloir attendre que son réseau soit en ordre de marche pour investir sur le search et convaincre des clients sur Internet. "Sinon, c'est laisser la place à la Banque Postale !" Pour lui, le problème n'est pas la taille des agences, mais leur organisation. "Nous travaillons par exemple à mettre en place des mécanismes en cas de débordement, lorsque les agences ne peuvent plus traiter les devis Web."

Alexandre Morillon explique pour sa part que la Banque Postale étant un nouvel entrant, elle est confrontée à moins de barrières organisationnelles. En matière d'assurances, la Banque Postale s'est fixée pour objectifs d'une part la cohérence des offres selon les canaux, d'autre part la continuité de l'information à toutes les étapes et sur tous les canaux via une base de données partagée. Il ajoute privilégier les médias internes au groupe pour communiquer : "Nous avons essayé la communication externe, mais les résultats surperforment le marché lorsque nous nous adressons à nos propres clients. Nous privilégions donc la communication sur notre banque en ligne et sur notre réseau traditionnel." Son activité assurances, démarrée il y a trois mois, a déjà rapporté 10 000 nouveaux contrats, dont un tiers sont attribués à Internet.