Comment PayPal veut s'immiscer dans le quotidien des Français

Comment PayPal veut s'immiscer dans le quotidien des Français Face à la multiplication des acteurs du paiement en ligne, le géant américain compte accélérer dans l'Hexagone. Son objectif numéro 1 : augmenter la récurrence des achats sur son outil.

Dans la grande famille du paiement en ligne, PayPal fait office de grand-père. Depuis sa création en 1998, l'Américain a vu arriver une première vague de nouveaux acteurs positionnées sur l'e-commerce comme Square (2009) ou Stripe (2010). Puis est arrivée la deuxième vague avec les banques et leur solution de paiement mobile mais aussi les Gafa et leur wallet. Le marché français a connu le même scénario. En 2013, les principales banques françaises ont créé Paylib, une solution de paiement mobile qui permet comme PayPal de payer en ligne sans avoir à saisir les données de sa carte bancaire. De leur côté, les Gafa arrivent progressivement en France. Le premier a été Apple Pay en juillet 2016. Il devrait être suivi d'Android Pay et Samsung Pay dans les mois à venir.

Cette multiplication d'acteurs n'inquiète officiellement pas PayPal France. "Aujourd'hui, on ne voit pas d'initiatives bancaires qui ciblent autre chose que le marché domestique. Paylib est une solution mobile pour des paiements en France alors que PayPal permet aux marchands de s'ouvrir à l'international", souligne Caroline Thelier, directrice générale de PayPal France. Le géant américain compte plus de 210 millions de comptes actifs dans le monde et accepte tous les moyens de paiement locaux dans plus de 200 pays. Même s'il a toujours un statut de leader sur le marché, il lui reste encore de nombreux Français à conquérir. Ils sont "seulement" 7,5 millions à détenir un compte PayPal.  

"Nous pensons que le food fera autant de chiffre d'affaires en ligne que le voyage dans quelques années"

Pour les convaincre, le spécialiste du paiement a d'abord cherché à ajouter de nouvelles fonctionnalités à son portefeuille. En 2014, Caroline Thelier, alors head of product consumer chez PayPal France, a eu l'idée de développer une garantie de remboursement des frais de retour, peu importe la raison. "Il y a toujours 80% d'abandon de panier sur le web. Les frais de retour sont une vraie barrière à l'achat pour le consommateur. Cette offre de retour a permis de répondre à un vrai problème et de séduire de nouveaux clients", assure la dirigeante. Forte de son succès dans l'Hexagone, la garantie a été étendue à 30 marchés dans le monde. C'est aussi Caroline Thelier qui a lancé l'idée d'une autre fonctionnalité : l'assurance annulation voyage. Depuis début 2017, un utilisateur PayPal peut être remboursé par PayPal le montant du voyage, à hauteur de 300 euros pour une demande de remboursement par an. 

Cap sur l'alimentation et le voyage 

Cette incursion dans le voyage n'est pas anodine. PayPal veut accélérer dans ce secteur et vise des sites de référence. La filiale française a déjà convaincu Voyages SNCF International (les sites étrangers de Voyages-sncf.com) d'accepter PayPal et espère convaincre l'entité française de faire de même d'ici quelques mois. PayPal est également disponible sur l'application d'Air France mais pas encore sur la version web. Deuxième secteur d'avenir pour PayPal : l'alimentation. "Comme le voyage, le food est un secteur où les achats sont récurrents. En plus, c'est un moyen d'entrer dans le quotidien des gens", confie Caroline Thelier. "Les acteurs du food font seulement 2% de leur chiffre d'affaires en ligne en moyenne, mais leur ambition est d'atteindre les 10 à 15%, comme les grandes enseignes de mode. En termes d'achats en ligne, en valeur, nous pensons que le food sera l'équivalent du voyage dans les prochaines années", affirme-t-elle.

"C'est presque comme si on avait négligé le service de peer-to-peer en partant du principe qu'il était suffisamment connu"

Les clients Paypal font en moyenne 33 transactions dans l'année. Loin de la transaction quotidienne.... "Les consommateurs achètent au moins une fois tous les 15 jours au supermarché. Ils font donc potentiellement 25 transactions de plus par an. Plus on arrivera à des achats récurrents, plus on arrivera à faire entrer PayPal dans leur quotidien", insiste la dirigeante. Depuis mars dernier, PayPal est ainsi disponible sur SimplyMarket.fr, le site de courses alimentaires d'Auchan Retail. Pour compléter cette offensive, le géant se positionne désormais sur le paiement en magasin. Cependant, il ne le fera pas directement et préfère passer par les wallets. Il n'est pas encore disponible sur Apple Pay mais un partenariat est envisageable. "Il est désormais possible de payer avec PayPal dans l'App Store. On peut imaginer le développement de cette relation", glisse la responsable.

Booster le transfert d'argent entre particuliers 

Le spécialiste du paiement compte aussi développer son activité historique de transfert d'argent entre particuliers, un peu laissé à l'abandon. "C'est presque comme si on avait négligé le service de peer-to-peer en partant du principe qu'il était suffisamment connu", avoue Caroline Thelier. Le service n'était pas gratuit puisque PayPal prélevait une commission de 3,4% et 25 centimes de frais fixes à chaque transaction auprès du receveur. "L'arrivée de nouvelles initiatives autour du remboursement et de la collecte d'argent nous a fait ouvrir les yeux. Nous nous sommes rendus compte que nous avions de l'or entre les mains et que ne l'utilisions pas suffisamment", poursuit-elle. 

En Italie, entre 80 et 90% des sites Internet acceptent PayPal

Des start-up françaises comme Lydia et Pumpkin proposent le même service gratuitement. En octobre dernier, PayPal a rendu ce service gratuit en France, tant que le receveur se trouve dans l'espace économique européen. La filiale française assure que le passage en gratuit a boosté cette activité, sans donner de chiffres précis. "Aujourd'hui, nous cherchons à nous positionner sur des cas d'usage" pour développer la notoriété de Paypal, précise Caroline Thelier. Début 2017, PayPal a par exemple signé un partenariat avec Tricount, une application française qui permet de faire ses comptes entre amis. 

Ce focus sur le peer-to-peer est aussi une manière de booster son service de paiement en ligne. "Les porteurs de compte PayPal ont souvent de l'argent sur leur compte soit parce qu'ils ont reçu un remboursement d'un ami, soit qu'une marque leur a remboursé un produit qu'ils avaient renvoyé ou parce qu'ils ont vendu un bien sur Vestiaire Collective (une plateforme de dépôt-vente de luxe, ndlr)", illustre Caroline Thelier. "C'est intéressant pour les marchands de savoir que les consommateurs ont du solde dormant et qu'ils peuvent le dépenser en ligne", peut-elle argumenter auprès des commerçants qu'elle prospecte.

Malgré ces différents chantiers, PayPal France n'est pas encore au même niveau d'adoption que son voisin italien, où entre 80 et 90% des sites Internet acceptent PayPal. Il y est même possible de payer ses factures d'électricité, ses amendes et ses impôts avec le portefeuille électronique. L'Américain compte bien en faire autant en France.