Crowdequity : SmartAngels pivote avec une plateforme de gestion des titres

Crowdequity : SmartAngels pivote avec une plateforme de gestion des titres En panne de croissance, la start-up française lancera d'ici la fin de l'année un outil consacré au non coté et à destination des sociétés de gestion.

Dans le secteur du crowdfunding, tous les feux ne sont pas au vert. Certes, la collecte de fonds a augmenté de 43,6% en 2017 en France pour atteindre 336 millions d'euros. Mais toutes les plateformes de financement participatif ne profitent pas à parts égales de cette croissance. C'est le cas du crowdequity, pratique qui consiste à prendre une participation dans une entreprise sous forme de capital, d'obligations ou de royalties, qui a enregistré un recul de 15% entre 2017 et 2016 (pour passer de 68,2 millions d'euros à 58 millions d'euros), selon le baromètre annuel de Financement Participatif France. Une tendance qui n'est pas prête de s'inverser. 

"Trouver de la croissance sera probablement assez compliqué dans les années qui viennent", estime Benoît Bazzochi, président de la plateforme de crowdequity SmartAngels. Il confie avoir connu "une croissance très faible de son chiffre d'affaires" en 2017 sans donner de chiffre précis. La collecte sur sa plateforme a même baissé : 11 millions récoltés en 2017 contre 12 millions en 2016. Deux raisons sont évoquées par le patron de la fintech : le manque d'appétence au risque des particuliers français et la réglementation en vigueur. "Notre statut de conseiller en investissement participatif nous impose de conseiller les investisseurs alors que ça pourrait être le rôle d'une banque. Nous revendiquons un simple statut de réception et transmission d'ordre, qu'on soit une vraie plateforme de marché", assène le dirigeant.

"Les fonds ont une vision claire au moment où ils investissent mais ne savent pas comment leur portefeuille évolue"

Pour renouer avec une croissance plus vigoureuse, la start-up planche depuis un an et demi sur une plateforme permettant de gérer les titres non cotés et toutes les informations qui y sont associées. "C'est le même système que quand vous achetez une action en bourse, vous l'avez dans votre portefeuille chez Boursorama ou Fortuneo", illustre Benoît Bazzochi. Alors que le processus s'opère encore sur un fichier excel voire des feuilles de papier dans l'univers du non coté.

Grâce à cette plateforme, une entreprise d'investissement pourra enregistrer ses titres en ligne et gérer son actionnariat plus simplement. Mais cet outil est surtout destiné aux sociétés de gestion (private equity, venture capital et capital développement), pour leur permettre de savoir quels titres elles détiennent exactement à un instant T. "Les fonds ont une vision claire au moment où ils investissent mais ne savent plus toujours comment leur portefeuille évolue par la suite", souligne le dirigeant.

C'est aussi un gain de temps pour les sociétés de gestion. "Aujourd'hui, un fonds demande à chaque entreprise un reporting qui prend la forme d'un fichier PDF ou excel envoyé par mail. Il doit ensuite intégrer toutes les information dans sa propre interface de reporting afin de le présenter aux investisseurs. C'est évidemment une perte de temps et, encore plus problématique, une source d'erreurs. Avec notre plateforme, l'entreprise et la société de gestion ont accès à toutes les informations nécessaires", explique le dirigeant.

La plateforme permet également aux fonds d'investissement d'avoir une vision à jour des tables de capitalisation des entreprises (ce qui détermine leurs valorisations) et de faire remonter un reporting destiné aux régulateurs mais aussi aux dépositaires des fonds car ces derniers ont besoin de toutes les informations liées à un titre pour certifier la détention des actifs.

10 à 20 clients fin 2018

SmartAngels teste la plateforme avec quelques participations de cinq sociétés de gestion dont les noms ne sont pas communiqués. Ces fonds comptent pour les plus petits entre 15 et 20 participations et pour les plus gros, entre 100 et 150 participations. La fintech commercialisera son service sous la forme d'un abonnement qui variera en fonction des options utilisées, que ce soit pour les sociétés de gestion ou pour les entreprises. "Nous ne voulons pas que le prix soit une barrière. Un actionnaire particulier ne va pas forcément payer pour un outil de reporting par exemple", fait remarquer Benoît Bazzochi. Le dirigeant espère onboarder entre 10 et 20 sociétés de gestion d'ici la fin de l'année. Avant une ouverture à tous début 2019. 

SmartAngels compte en faire une ligne de revenu importante. "Cela sera sans doute l'essentiel de notre chiffre d'affaires à terme. Cela ne veut pas dire, pour autant, que nous ne ferons plus de crowdfunding. Mais le jour où une entreprise fera une émission de titres, elle pourra le faire tout simplement là où elle gère ses titres", explique Benoît Bazzochi.

"La gestion de titres sera sans doute l'essentiel de notre chiffre d'affaires à terme"

SmartAngels prévoit des évolutions sur la plateforme. "Il y a des besoins spécifiques dans l'immobilier ou dans la dette privée. On peut imaginer traiter l'ensemble des actifs non cotés, pas seulement des titres d'entreprises. On a déjà des demandes dans ce sens", confie le dirigeant. La société espère également s'internationaliser pour les entreprise qui ont des actionnaires étrangers ou les sociétés de gestion françaises qui ont des participations en dehors de la France.

Autre évolution importante : la blockchain. Si la start-up a volontairement écarté la technologie pour ce projet au motif que l'entreprise est responsable de son registre de titres et qu'elle doit donc avoir la main dessus, elle a toutefois construit son architecture de façon à pouvoir intégrer la chaîne de blocs. Elle imagine en effet utiliser la technologie pour le delivery versus payment, une procédure qui implique que l'acheteur d'un titre le paie au moment où le titre lui est remis, et  pour le marché secondaire.