Stress : quels outils pour remplir les obligations à charge de l’employeur ?

Le gouvernement entend voir le stress pris en compte par les employeurs et choisit la voie de la négociation pour les entreprises de plus de 1 000 salariés. En-deçà de ce seuil, elles gardent la main sur le type de procédure qu’elles mettent en place.

En matière de stress, l'entreprise doit adopter une démarche préventive permettant de mesurer l'existence, mais surtout le niveau de stress, et d'adopter une série d'actions selon les niveaux détectés.   Ce plan d'actions devra être articulé avec le document unique d'évaluation des risques. L'obligation de prévention des risques est conçue de façon très large par le Code du travail. L'article L 4121-2 prévoit ainsi que la planification des risques doit intégrer « dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, tel qu'il est défini à l'article L. 1152-1 ».   La démarche doit commencer par un diagnostic de l'entreprise, qui s'appuiera sur l'analyse d'un ensemble d'indicateurs, permettant de repérer des situations à risque ou éventuellement d'identifier une situation déjà dégradée exigeant la mise en place d'une intervention.   Quels indicateurs retenir pour effectuer le diagnostic ?   Deux types d'indicateurs sont à prendre en compte : ceux liés au fonctionnement habituel de l'entreprise, et ceux liés à des changements organisationnels.   L'entreprise doit s'appuyer sur des indicateurs liés au fonctionnement habituel de l'entreprise. L'absentéisme peut ainsi révéler un dysfonctionnement s'il est élevé ou en augmentation. Dans le secteur privé, le taux d'absentéisme annoncé varie entre 5 % et 7 %.   Une distinction doit toutefois être faite entre le type d'absence (maladie, maladie professionnelle, accident du travail, accident de trajet, cas de suicides avérés) et une attention particulière doit être portée aux maladies pour lesquelles le stress est l'un des facteurs causal (TMS, hypertension, burnout, troubles psychiques attribués aux conditions de travail).   De même, le médecin du travail peut relever le nombre de salariés sous antidépresseur, et/ou anxiolytiques, de façon régulière/occasionnelle. Les moments d'absences peuvent également être distingués (vacances scolaires, lundi ou vendredi, voire mercredi...).   De la même façon, la durée du travail peut constituer un indicateur si, notamment pour la population des cadres en forfait jour, les jours de congés ne sont pas pris. Le risque d'une surcharge de travail est alors à prendre en compte. Le travail en horaires atypiques induit un décalage par rapport aux rythmes sociaux, qui peut être facteur de stress.    Enfin, l'existence de postes non pourvus peut également révéler l'existence d'une surcharge de travail. Le turn over, qui sera éventuellement décomposé par service pour une étude plus fine, avec l'analyse des motifs de départ, est un indicateur révélateur de malaise.   Un indicateur « incidents» rassemble les incidents, agressions physiques ou verbales, nombre de sanctions disciplinaires relevant de comportements fautifs. Cet indicateur peut également être alimenté par l'analyse des procès-verbaux signalant des problèmes de santé et sécurité, voire de violences, d'agressivité, de mésententes. Le nombre de grèves renseignera également sur le climat social.   L'entreprise doit aussi s'appuyer sur des indicateurs liés à des changements organisationnels. L'existence de plans sociaux dans le passé, ou en projet, l'introduction de nouvelles technologies, de nouveaux outils, la modification de l'organisation du travail, un rachat ou une fusion, un déménagement de l'entreprise… sont autant d'indicateurs mettant à jour une situation de déstabilisation.   Le diagnostic et après ?   Il est important qu'un consensus soit trouvé sur la ou les personnes désignée(s) pour réaliser le diagnostic, dans la mesure où celle(s)-ci sera(ont) amenée(s) à avoir accès à un l'ensemble des données nécessaires au diagnostic.   Ensuite, le résultat de ce diagnostic doit pouvoir faire l'objet d'une analyse en CHSCT (Comité d'Hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Si une démarche de prévention s'avère nécessaire, un groupe de travail doit être constitué aux fins de réaliser une analyse plus fine et de prévoir les actions à mettre en place. Ce groupe pourrait rassembler un représentant de l'employeur, des membres du CHSCT, la médecine du travail et un psychologue du travail.   Contrairement aux préconisations gouvernementales, la négociation ne constitue pas l'outil adéquat pour gérer un problème de stress dans l'entreprise. Le stress est, en effet, une notion d'ordre médical, qui met en jeu des différences interindividuelles, puisqu'il est avant tout question de ressenti, d'évaluation que fait chaque individu en fonction d'éléments de sa vie professionnelle, mais également de sa vie personnelle. C'est donc avant tout le personnel de la santé qui doit être associé à la démarche préventive.   Enfin, les actions à entreprendre feront l'objet d'un plan d'actions, engagement unilatéral de l'employeur. Une évaluation des résultats doit être réalisée. Cette démarche doit, bien entendu, s'inscrire dans la durée. L'efficacité des mesures entreprises sera mesurée grâce à la mesure de l'évolution de chacun des indicateurs choisis.