Stop au processus d’auto-victimisation

L ‘auto-victimisation est un processus psychique ou l’individu se positionne dans une place de victime. Victime de son entourage, victime de sa hiérarchie, de ses collègues… On peut tous, un jour ou l’autre, se positionner en victime alors que la voie de sortie est de comprendre là où l’on a été victime, là où doit cesser de l’être.

 « Je n’y arrive pas car j’ai été dénigré(e) dans mon enfance », «  Je n’aurai pas ce poste car je suis issu(e) d’une communauté discriminée », «  Mon Boss ne me donnera jamais de promotion car il me hait »… Toutes ces phrases ne sont pas fausses dans les faits, mais contraignantes dans le positionnement qu’elles donnent et disent de celui qui les prononce ou les pense. Car si l’on part du principe que l’on sera victime ou que l’on est victime avant d’avoir commencé la bataille, on a toutes les chances de s’y perdre. Effectivement, on peut manquer de confiance en soi car l’on a subi des dénigrements dans son enfance, on peut se sentir dénigré de par son origine ou son statut social, ce sont des réalités possibles. Mais les prendre comme point de départ de futurs échecs ou problèmes relationnels reste un choix que votre psychisme prend jour après jour.

Avoir conscience que l’on a été victime permet de sortir du statut de victime et de l’impuissance qui en découle. Mais spéculer sur le futur en posant comme hypothèse que l’on va être victime du système, d’un individu, ou expliquer toutes les conséquences négatives d’un quotidien par des variables extérieures est un processus handicapant et névrotique, vous posant en victime continuelle et induisant dans votre regard sur le monde que vous êtes impuissant face à ce qui s’y déroule. Il y a une différence entre un vrai statut de victime et celui qui se sent victime continuelle du système. La première chose à changer c’est votre regard sur le monde.

Retirez vos lunettes névrotiques

Vous aviez envie de partir plus tôt du bureau mais vous acceptez une surcharge de boulot tout en vous formulant que c’est comme ça, votre Boss ne vous aime pas. Vous acceptez les cris de votre femme ou de votre mari parce que vous vous dites qu’elle/il se calmera, que vous aimez la tranquillité.
Vous attribuez tous vos échecs à la vie en général, au contexte, à un sentiment de faire continuellement de mauvaises rencontres, ou d’être né sous une mauvaise étoile. Tous ces exemples non exhaustifs peuvent provenir de nombreuses problématiques de vie mais ont une variable commune celle d’être toujours du côté de l’attribution causale extérieure, à savoir : «  Je ne suis pas responsable, c’est la vie qu’il l’est ». Or, ce positionnement vous permet sûrement d’éviter la remise en question, mais vous rend plus observateur qu’acteur de votre vie. La subissant plutôt que la gérant.
D’autres, toujours dans ce processus d’auto victimisation, auront tendance à se sentir agressés par le monde entier, leur famille, leurs parents, leurs collègues, ou leur hiérarchie. Ils ne se remettent jamais en question car la blessure narcissique qui en découlerait serait trop lourde à porter. Ils préfèrent imputer tout conflit aux mauvais agissements de l’autre, permettant de se déculpabiliser soi-même. Retirer ces lunettes névrotiques c’est prendre conscience que, dans toutes situations, nos agissements peuvent impacter. Pourquoi sommes-nous dans une certaine situation ? Parce que nous y restons ! Certes, le contexte a son poids, tout comme l’environnement dans lequel on a grandi ou les traumas du passé, mais la vraie différence avec un individu qui ne subit pas sa vie, c’est sa faculté à agir sur son contexte, son environnement et son vécu.

Pourquoi l’auto-victimisation ?

La plupart des individus ayant ce positionnement psychique ont souvent un manque de confiance en eux, une perte d’estime à un moment ou à un autre de leur parcours. Ils se sentent souvent coupables de leurs échecs et mettent en place des explications causales extérieures à eux-mêmes afin d’échapper au sentiment de culpabilité face à l’échec de leur propre vie. Souvent, ils ont construit leur identité sur des failles : perte d’êtres chers, traumatismes, violences environnementales, et n’ont pas donné de sens à ces évènements vécus comme douloureux, à part « la malchance », « l’impuissance que la vie procure » ou autre.
Autre profil : des individus souvent en manque de confiance en leurs propres capacités, souvent très dociles dans leurs rapports au monde. Là, la faille repose sur la peur du rejet ou d’être vu comme un mauvais élément, notamment dans le cadre du travail. Identitairement, ils sont sensibles, très dans l’affect et n’arrivent pas à remettre leurs agissements en question ; pour eux, leur  docilité ou leur  gentillesse sont totalement issus de leur fragilité.
Se sentir victime de quelqu’un ou de quelque chose en revient à se mettre en lien avec la cause et à s’y structurer. Si vous pensez que l’on vous empêchera d’avancer, vous allez agir en le prenant en compte dans vos processus décisionnels, le lien sera donc là. Si vous spéculez que l’on n’aimera pas votre compte-rendu car l’on ne vous aime pas, votre ton de voix ou vos attitudes physiques seront empreints de cette peur implicite et votre spontanéité en sera entachée. Un lien se crée toujours lorsque l’on pense à une cause avant que la conséquence n’ait eu lieu. Toute personne qui se sent « victime de » se met en en lien « avec ».

Comment lutter

Pour sortir de cette spirale, le premier pas est de prendre conscience d’à quel point on observe le monde au travers de ce statut de victime. A quel point notre positionnement porte en lui les germes de cette auto victimisation. Par exemple, si vous êtes cadre et que vous pensez que vous n’aurez pas une promotion de par vos origines, vous avez toute chance de ne pas mener combat pour l’avoir. Ou de ne pas vous sentir en droit de la demander, voire de la réclamer. Vous prenez une place qui, au final, aurait pu ne pas être la vôtre. Cette place existe car vous l’acceptez avant même qu’on ne vous la donne.
Autre exemple, parlant et récurrent, dans la vie professionnelle : vous recevez un ordre de votre direction qui vous semble injuste et vous l’exécutez sans en questionner la source. Là aussi, ce positionnement est un choix qui vous met dans une place de victime. Vous auriez pu questionner finement la demande, obtenir de ne pas exécuter cet ordre ou tout de moins de vous en décaler. L’accepter sans aucun bruit c’est là aussi prendre une place de petit employé, qu’on ne vous impose pas, mais vos réactions vous poussent à vous y mettre d’emblée.
Que vous soyez dans ce type de processus ou que vous soyez témoin de ce genre de comportements, soyez toujours du côté de la prise de conscience du terrain sur lequel vous évoluez. Avant de questionner le contexte ou l’environnement, ayez toujours un œil sur ce qui émane de vous et à quel point vous pourriez agir différemment. La remise en question ne doit pas aboutir sur de la culpabilité mais sur le fait d’assumer ses actes afin d’agir sur ceux des autres. On ne comprend jamais mieux le monde que lorsque l’on en est à la fois acteur et observateur.