La monétisation du stress au travail par le compte pénibilité ne réglera pas la morbidité

Vues les conséquences médicales et sociales que le stress au travail fera subir aux économies du monde dans les années à venir en termes de dépendances et servitudes diverses pour nos enfants et petits enfants, on se demande si le compte pénibilité suffira à éviter ce qui va de plus en plus ressembler à une catastrophe sanitaire.

Ainsi, il semblerait bien que pour certaines activités professionnels, on ait accepté l’idée qu’elles puissent avec le temps rendre malade ou même favoriser la mort. C’est le principe du compte pénibilité. En effet ce compte n’est-il pas basé sur un calcul de points en fonction du stress subi.
Stress physique, stress chimique, stress physiologique, stress psychique, tout type de stress dont les effets pathologiques sur la santé sont non seulement connus mais aussi en augmentation.
On ne cherche donc pas à supprimer les différents stress au travail ou à les combattre, quel qu’ils soient, on se propose plutôt de les « monétiser ». Et pourtant quel intérêt  aura le salarié concerné par ce système, de partir plus tôt à la retraire ou de se « recycler », une fois, par exemple,  qu’il aura appris, après des années d’exposition à des inhalations  toxiques, son cancer du poumon.
Quel sera le futur de celui ou de celle qui, même en prenant sa retraite à soixante ans, après des années et des années de port de charges devra se contenter d’une paire de canne ou d’une chaise roulante pour finir sa vie. Et au-delà du problème humain, n’oublions pas le coût pour la société de telles pathologies !
Toutes les études montrent l’évolution régulière des maladies liées au travail, secteur par secteur.
Ainsi les maladies psychiatriques ont enregistré une "constante augmentation" depuis 10 ans selon l’Anses (1). Une telle progression dans le contexte de crise actuelle, risque d’engloutir le reste des économies des pays développés. Les progrès de la médecine pourtant efficaces et de plus en plus performants ne pourront faire face à la pléthore des maladies liées aux stress au travail. Et ces progrès médicaux et ces traitements ont déjà un coût !
Il faut s’orienter vers une toute autre politique. En ce qui concerne le stress physique, les activités gravement pathogènes  doivent évidemment être effectuées par des machines ou des robots. On s’étonne d’ailleurs de l’absence de volonté politique pour aller dans ce sens et du retard pris dans le développement de ces nouvelles technologies qui, plutôt que de prendre du travail à l’Homme devraient au contraire lui permettre de s’émanciper vers des taches plus nobles. Pour le stress psychique, il faut favoriser le développement  des marqueurs biologiques voir génétiques (2) car ce stress psychique est aussi pathogène que le stress physique mais échappe cependant au contrôle du compte pénibilité. Loin de favoriser un quelconque eugénisme ces marqueurs créditeront au contraire les entreprises dans leur action pour la santé, sa protection au travail voir son recouvrement quand la maladie s’est déjà installée.

De toute façon on ne pourra plus continuer à faire des bénéfices sur la santé des salariés et collaborateurs  d’une entreprise. D’une part l’économie et le coût des maladies supportés par la société à cause du stress en entreprise deviendra insoutenable et d’autre part les entreprises qui ne respecteront pas leur responsabilité vis-à-vis de la santé de leurs salariés et collaborateurs seront vite perdantes car victimes de boycottage de la part des consommateurs par les réseaux sociaux à l’exemple des ‘name and shame » qui existent déjà aux Etats-Unis. Nous serons bien loin du compte pénibilité et bien plus efficace aussi pour lutter contre le stress au travail vecteur de la plus part des pathologies du monde moderne.

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1) Le Point.fr - Publié le 04/10/2011 - Etudes qui s'appuient sur les données recueillies dans les 32 centres de consultation de pathologie professionnelle (CCPP) intégrés dans les CHU en France.
(2) Communication du CNRS Paris, 15 septembre 2011- Dépression : un marqueur sanguin pour détecter la prédisposition :  "Lorsque des rats sont soumis à un stress intense, seuls ceux présentant une altération durable de la structure des neurones dans certaines régions du cerveau développent des symptômes dépressifs à la suite d'un nouvel épisode stressant. Ce résultat vient d'être mis en évidence par l'équipe, dirigée par Jean-Jacques Benoliel du Centre de Recherche de l'Institut du Cerveau et de la Moelle Epinière (UPMC/Inserm/CNRS) à l'Hôpital de la Pitié-Salpêtrière. Leur étude a également permis de caractériser chez le rat un marqueur biologique fiable permettant de détecter la vulnérabilité à la dépression. Ces résultats viennent d'être publiés dans The Journal of Neuroscience. Ils ouvrent de nouvelles perspectives pour reconnaître et prévenir la prédisposition à la dépression dans une population à risque.