Les aides et prêts publics suffisent rarement au financement d'un projet,
qu'il soit à l'étape de la création ou à celle du
développement. C'est d'autant plus le cas lorsqu'il s'appuie sur du contenu
technologique, comme dans les biotechnologies. Au-delà des fonds qu'il
est possible de lever auprès de ses proches, la "love money",
il faut pouvoir s'adresser à des financements privés. Mais lesquels ?
Tout dépend de l'état d'avancement du projet.
Des acteurs différents selon les phases du projet
|
|
Francis Bécard, président de Retis
|
|
"Mieux vaut lever trop de capitaux au
départ, quitte à prendre son temps, que l'inverse" |
"A l'amorçage, c'est-à-dire quand on dispose du concept
mais que l'on n'a pas encore démarré son activité, il est
compliqué de se financer, prévient Christophe Bernard. Il faudra
plutôt se tourner vers les business
angels." Les acteurs du capital risque ne viendront qu'après,
dans la phase de démarrage de l'activité. "On lèvera
entre 50 et 100.000 euros auprès d'un business angel alors que le ticket
d'entrée se situe plutôt autour d'un million d'euros pour le capital
risque, précise Francis Bécard. Ce sont des acteurs qui n'entrent
souvent qu'après deux ou trois tours de table et qui attendent de vrais
résultats, surtout depuis les difficultés qu'ils ont rencontrées
en 2001." Mais dans tous les cas, ne pas partir sous-capitalisé :
"mieux vaut lever trop de capitaux au départ, quitte à prendre
son temps, que l'inverse : les investisseurs sont méfiants lorsque
l'on revient les voir au bout d'un an au bord de l'asphyxie."
Enfin, lorsqu'il s'agit de financer l'expansion de son entreprise, c'est vers
l'ensemble des acteurs
du capital investissement qu'il faudra se tourner, fonds communs de placement
pour l'innovation (FCPI) et fonds d'investissement de proximité (FIP) en
tête. La question de l'appel
public à l'épargne peut aussi se poser mais la réponse
n'est pas systématiquement oui : "une entrée en Bourse
est lourde, en terme de communication financière notamment. Elle prend
un vrai sens si l'entreprise a besoin de faire parler d'elle ou si elle évolue
dans un environnement où être coté est la norme", assure
Christophe Bernard.
Les banques, quant à elles, sont assez frileuses
lorsqu'il s'agit de financer l'innovation. "Ce n'est
pas leur métier de placer de manière risquée
les économies de leurs clients, explique d'ailleurs
le président de Retis. Elles interviennent donc en
bas de bilan,
en financement du
fonds de roulement notamment, et non en capital."
Convaincre des investisseurs...
Avec la récente réforme de l'ISF - qui peut être acquittée
en investissant dans les FCPI ou les FIP - ce ne sont pas les fonds qui risquent
de manquer. Encore faut-il savoir séduire les investisseurs... et les rassurer.
"Le marketing de l'innovation est un exercice difficile, souligne Francis
Bécard. Pour mieux présenter son projet, il faut avoir au préalable
consulté plusieurs experts sur la cohérence et la faisabilité
de votre idée et avoir confronté leurs réponses." Paraître
confiant est essentiel pour convaincre, mais sans tomber dans les excès.
"Les investisseurs jugent aussi dans quelle mesure le porteur de projet est
capable d'affronter les difficultés."
Ne pas se lancer seul est aussi un argument fort aux yeux des bailleurs de
fonds : constituer une équipe polyvalente, avec
des profils complémentaires d'ingénieurs et
de managers, est un atout. "S'appuyer sur un 'serial
entrepreneur' peut aider à gagner la confiance des
fonds et des banques", fait remarquer Christophe Bernard.
Ce seront autant d'aides, plus tard, pour la gestion quotidienne
de l'entreprise.
... en se protégeant d'eux
Pour autant, il s'agit de ne pas oublier que les intérêts
des investisseurs ne sont pas toujours en phase avec ceux
du porteur de projet. La signature du pacte
d'actionnaires est une étape très sensible
pour laquelle les services d'un avocat sont plus que conseillés.
Un grand nombre de clauses peuvent receler autant de dangers
pour l'entrepreneur. Ainsi, inclure une clause de minorité
de blocage est essentielle si l'on ne détient pas
la majorité du capital.
Nul n'étant irremplaçable, surtout au bout
de deux ou trois ans, une telle clause peut également
éviter à l'entrepreneur d'être évincé
par décision du conseil. Des clauses sur les conditions
de sorties du capital sont aussi à regarder de près,
au risque sinon de voir son entreprise vendue à un
grand groupe concurrent. Enfin, un investisseur peut vouloir
inclure une clause lui permettant de récupérer de manière
prioritaire sa mise initiale, voire plus, en cas de cession.
Si le produit de la vente n'est pas élevé, l'entrepreneur
peut alors se retrouver les poches vides...