Michael Baum (Founder.org) "Founder.org dispose de 100 millions de dollars pour réinvestir dans les start-up du programme"

Serial-entrepreneur de la Silicon Valley, CEO du programme de soutien à l'entrepreneuriat des jeunes Founder.org et amoureux de la France et des vignobles, Michael Baum se confie.

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Michael Baum, cofondateur et CEO de Founder.org. © Founder.org

JDN. Vous êtes le CEO de la fondation Founder.org, qui finance des étudiants-entrepreneurs. Pouvez-vous nous parler du programme ?

Michael Baum. Founder.org a été fondé en 2012 par plusieurs serial-entrepreneurs de la Silicon Valley pour aider à booster l'économie. Nous disposions de 40 ans de données aux Etats-Unis démontrant que les créations d'emploi proviennent dans 99% des cas de sociétés qui ont cinq ans ou moins, des jeunes pousses. Les grosses sociétés traditionnelles, elles, ont plutôt tendance à licencier...

Pour favoriser la création de start-up, nous finançons des étudiants qui lancent leur entreprises grâce à des écoles partenaires dans onze pays, parmi lesquels les Etats-Unis et de nombreux pays d'Europe centrale et de l'Est. Pour candidater, la start-up doit compter au moins un étudiant, alumni ou professeur d'une de ces écoles parmi les co-fondateurs. En France, par exemple, nous sommes en lien avec l'ESCP, l'école Polytechnique, HEC, l'Essec, l'école Centrale, l'Edhec ... Nous investissons 100 000 dollars dans chacune des jeunes pousses sélectionnées. 60 équipes ont déjà été sélectionnées par le programme. Et on recrute les 50 prochaines en ce moment même : les candidatures sont ouvertes jusqu'au 30 avril.

Tickets additionnels de 250 000 à 3 millions de dollars

Au-delà des 100 000 dollars attribués à chaque équipe sélectionnée, pouvez-vous réinvestir lors des tours de table suivant dans les start-up de Founder.org ?

Si les start-up lèvent de l'argent, nous avons en effet un fonds d'investissement qui nous permet de réinvestir dans les jeunes pousses. Nous avons déjà bouclé 22 investissements additionnels dans certaines des 60 sociétés de Founder.org, avec des tickets de 250 000 dollars à 3 millions.

Et des tickets plus importants, à terme, ce serait possible ?

Oui, car la fondation dispose d'un fonds de 100 millions de dollars. C'est notre différence avec d'autres programmes early stage. Nous avons assez de capital pour réinvestir des sommes importantes dans les sociétés qui se portent bien.

Quels sont les plus grands succès parmi les projets financés ?

C'est encore tôt pour le dire. Founder.org a été lancé il y a trois ans. Nous avons beaucoup de projets intéressants initiés pas les étudiants d'écoles dans le monde entier, mais il va leur falloir du temps pour les développer.

Pouvez-vous citer quelques-unes des jeunes pousses les plus prometteuses, selon vous ?

Unu, par exemple, est une start-up fondée à Berlin et qui a inventé un scooter électrique. C'est le Tesla de l'industrie du scooter. Sa recharge dure très longtemps et la batterie est tellement petite qu'elle peut être retirée du dessous du siège puis ramenée facilement dans son appartement ou son bureau pour la recharger en la branchant au mur : pas besoin de système de recharge dans la ville.

Je citerais aussi Konux, une autre start-up allemande basée à Munich qui a créé des capteurs industriels pour les robots, l'industrie... La société a choisi neuf données de mesure les plus courantes et les réunit sur une seule plateforme.

Volumental, basée à Stockholm, travaille quant à elle sur la "personnalisation de masse". La start-up permet aux utilisateurs qui entrent dans un magasin de chaussures de monter sur un device qui scanne automatiquement leurs pieds et identifie les chaussures qui leur iront le mieux. Volumental transmet aussi les données recueillies à des fabricants pour qu'ils puissent produire des chaussures sur mesure.

Quels sont les projets français que vous avez sélectionnés ?

Cette année, nous en avons choisi trois. Whojam, issue de l'ESCP, permet aux musiciens du monde entier de produire de la musique ensemble malgré la distance. CardioLogs, de l'école Polytechnique, aide les médecins généralistes à mesurer les battements du cœur de leurs patients sans être spécialisés en cardiologie. Enfin, Feetme, de Polytechnique également, a inventé des semelles dotées de capteurs à destination des diabétiques qui ont perdu toutes sensations dans leurs pieds. Feetme dit aux diabétiques combien de pression ils imposent à leurs pieds chaque jour et veut ainsi éviter les amputations de pieds que subissent 600 000 malades chaque année dans le monde.

Pensez-vous que la France est un endroit idéal pour lancer sa start-up ?

"En France, la culture entrepreneuriale est encore très peu ancrée"

C'est une question compliquée... Je suis moi-même chef d'entreprise en France et j'ai investi dans des start-up françaises donc j'ai ma petite idée là-dessus. Il y a beaucoup d'avantages lorsque l'on crée une entreprise en France : le niveau de créativité, d'éducation, l'état d'esprit tourné vers l'international... Mais il y a aussi des challenges. D'abord, la politique socialiste et le système de l'emploi, défavorable aux employeurs pour qui il est trop difficile de se séparer d'un employé qui ne convient pas. Ensuite, il est plus difficile de trouver des fonds en early-stage, quand le projet est encore très risqué, qu'aux Etats-Unis. Enfin, le troisième challenge est plus culturel : aux Etats-Unis, aujourd'hui, tous les étudiants qui sortent de l'université sont excités à l'idée de tester des nouveautés, de lancer leur entreprise, de travailler pour une start-up... En France, cette mentalité est très rare et les étudiants ont plus envie de travailler dans de grosses entreprises que de prendre des risques.

L'an dernier, vous avez racheté le château de Pommard, domaine viticole de Bourgogne. Pensez-vous que le secteur du vin est en passe d'être révolutionné par des start-up ?

C'est une industrie où il est difficile de convaincre les acteurs de tenter de nouvelles choses. La tradition pèse lourd. L'industrie du vin a un gros problème : un producteur vend sa bouteille à un distributeur pour 10 euros, par exemple. Elle sera revendue à un restaurant, un consommateur ou un magasin pour un prix qui peut grimper jusqu'à 100 euros ! Les producteurs ne reçoivent qu'un très faible pourcentage de la valeur économique. C'est aussi pour ça que les familles vinicoles sont étranglées. L'e-commerce peut permettre aux producteurs de vendre directement aux consommateurs. Au château de Pommard, on ne passe pas du tout par la distribution, on vend directement aux restaurants ou consommateurs. Autre problème rencontré par l'industrie : envoyer des bouteilles jusqu'en Chine, par exemple, est très compliqué. La logistique pourrait être améliorée. Il y a donc des pistes à explorer pour les start-up.

Quels sont les secteurs en passe d'être transformés par des start-up dans le monde entier ?

L'industrie aérospatiale, les transports (véhicules électriques, notamment), l'automatisation de l'industrie (capteurs, robotique, customisation de masse...), le secteur de l'alimentaire et de l'agriculture (notamment pour rapprocher les producteurs locaux des consommateurs, diminution des déchets...), l'énergie renouvelable, et de manière générale les start-up du Web innovent en permanence dans de nombreux domaines.

Vous avez créé six entreprises... A quand la septième ? Quel sera votre prochain projet ?

J'ai commencé à fonder des entreprises à 19 ans. Je m'amuse tellement avec Founder.org, à travailler avec ces jeunes équipes, à leur donner des conseils et à les aider à faire croître leurs projets dans le monde entier que je pense que c'est devenu le but principal de ma vie.

Un conseil pour de jeunes entrepreneurs ?

Choisissez bien votre équipe. Au final, tout repose sur les collaborateurs. Les meilleures équipes sont celles qui sont les plus diversifiées, avec divers backgrounds, connaissances, opinions...

Michael Baum est le fondateur et CEO de FOUNDER.org, une fondation travaillant avec les meilleurs élèves d'hautes écoles, d'universités et d'instituts de centre de recherche à travers le monde pour faire progresser l'entreprenariat scolaire. Son parcours de 25 ans en tant qu'entrepreneur lui a valu 6 startups, 5 acquisitions, ainsi que l'IPO of Splunk (SPLK). Ce diplômé en Informatique de l'Université de Drexel a obtenu son MBA à la Wharton School de l'Université de Pennsylvanie. Michael est aussi l'inventeur de plusieurs brevets en big data, en machine learning et en gestion de transactions financières. Passionné de vins français, Michael Baum est le nouveau propriétaire du Château de Pommard, qu'il a acquis en 2014.