Repenser la stratégie budgétaire média : une nécessité pour les annonceurs

L'allocation des budgets média est un enjeu crucial pour les annonceurs. Tour d'horizon des méthodes courantes et pistes d'optimisation pour une gestion budgétaire efficace

Dans l'écosystème dynamique du marketing digital, la définition des budgets médias représente un véritable casse-tête pour les annonceurs. Face à un paysage médiatique en perpétuelle mutation, les méthodes courantes de budgétisation, souvent un héritage de l'exercice de média planning dans les médias traditionnels, semblent perdre de leur pertinence, nécessitant une réévaluation profonde des approches adoptées, et une méthodologie rationnelle connectée au business. 

Tour d'horizon des pratiques actuelles et des pistes d'amélioration pour une gestion budgétaire plus performante et alignée avec les objectifs commerciaux.

L'Approche Traditionnelle : un modèle en question

La pratique dominante chez les annonceurs repose sur le schéma suivant: la direction financière (ou commerciale, selon l'organisation) projette l'exercice financier de l'année suivante et décline les objectifs commerciaux par canal. Ensuite, il est demandé aux directions média d'exprimer leur besoin en termes d'investissements nécessaires afin d'atteindre cet objectif commercial. Dès lors, les directeurs médias effectuent un exercice d'analyse rétrospective des indicateurs de performances, tels que le volume de session et de transaction par levier, le taux de conversion , ainsi que le coût par session et par acquisition client...etc et projettent ensuite l'évolution des coûts média selon une analyse de l'inflation. 

Cet exercice permet d'établir une base empirique pour estimer levier par levier l'investissement nécessaire et les KPIs associés. Même s'il peut être pertinent pour les médias traditionnels car il est plus difficile d'en mesure l'incrément business, à moins d'une approche économétrique, cet exercice présente des faiblesses intrinsèques considérables pour les médias digitaux. Il est vulnérable aux fluctuations externes - inflation, évolution des algorithmes des plateformes majeures comme Google et Meta, variations saisonnières - qui peuvent fausser les prévisions, et pire, parfois conduire à une sous performance majeure. Par ailleurs, cette méthode incite à une concentration excessive sur les sessions en tant que KPI principal, reléguant au second plan des indicateurs plus cruciaux comme le chiffre d'affaires.

Vers une stratégie budgétaire connectée au business

Il est impératif d'adopter une perspective plus holistique dans la sélection des KPIs, en mettant l'accent sur le chiffre d'affaires et la rentabilité en priorité mais d'autres indicateurs reflétant plus fidèlement l'impact réel des campagnes média sur la performance commerciale.

Parmi les méthodes courantes sur le marché, il existe l'approche basée sur le benchmark concurrentiel. Cette méthode vise à calibrer les investissements publicitaires en fonction de ceux des concurrents. Bien qu'utile pour maintenir une compétitivité sur le marché, elle requiert une analyse fine et continue du paysage concurrentiel pour être efficace et surtout elle peut être en déconnexion avec la réalité business de l'annonceur. En effet, si ce dernier évolue dans un secteur d'activité où il a une part de marché faible et se bat contre des leaders qui investissent massivement en média, il lui sera difficile de s'aligner sur leur stratégie. Néanmoins, si l'objectif est d'atteindre une croissance rapide et de booster considérablement sa part de marché, ce qui peut être le cas d'une Startup par exemple, la méthode de l'investissement pilotée à la part de marché pourrait mieux convenir. Mais attention, si cette dernière méthode promet des gains à court terme, elle implique également une prise de risque significative et une potentielle érosion des marges.

L'approche dynamique

Face à ces défis, il existe une approche dynamique, connectée au business de la marque et agile face aux fluctuations du marché publicitaire d'aujourd'hui. Cette approche exige une étroite collaboration entre plusieurs équipes: finance, digital, data, marketing, média... et un suivi rigoureux des performances. Elle consiste à considérer le média pour ce qu'il est réellement: un levier d'acquisition client. Car qu'il s'agisse de campagnes de notoriété, de considération ou de performance, l'objectif final est toujours le même: faire connaître la marque et ses offres afin d'acquérir de nouveaux clients et les fidéliser le plus longtemps possible. Mais pour offrir au média son plein potentiel, il convient d'adopter une approche budgétaire dynamique, qui permet d'accélérer l'investissement tant que la rentabilité est respectée.

Pour ce faire, il s'agit d'abord de définir le seuil de rentabilité ou de marge brute en prenant en compte les charges d'opérations (frais de livraison par exemple) et les coûts produits. Ensuite, en intégrant la contribution des canaux média payants sur les autres canaux organiques (SEO, Direct) ainsi que l'effet ROPO (research online, purchase offline), on peut ajuster au plus près le calcul du retour sur investissement. Il faut alors répondre à cette question clé: pour 1€ dépensé, combien faut-il générer de chiffre-d'affaires tout en respectant mon objectif de marge ? nous pourrons alors définir par exemple que pour 1€ dépensé en média, le chiffre d'affaires doit être de 5€. Dans cet exemple le MER (Media Efficiency Ratio) est de 20%, il convient ensuite d'appliquer ce pourcentage à la totalité du chiffre d'affaires annuel projeté pour estimer l'investissement média nécessaire. Cela établit une première base rationnel de calcul qu'il faut ensuite décliner par mois et par canal en suivant le même processus.

Cette méthodologie nécessite une distinction claire entre le ROI total, incluant tous les canaux, et le ROAS, qui se concentre uniquement sur les leviers payants. Bien que complexe, cette approche offre une perspective plus réaliste et adaptée aux défis actuels du marketing digital.

L'environnement du marketing digital exige des annonceurs une capacité d'adaptation et d'innovation constante dans la définition de leurs stratégies budgétaires. Les méthodes traditionnelles, bien que confortables, ne suffisent plus à garantir une performance optimale. En explorant de nouvelles approches et en redéfinissant les indicateurs de succès, les annonceurs peuvent mieux saisir les opportunités dans le paysage médiatique complexe et évolutif d'aujourd'hui et maximiser le retour sur investissement de leurs campagnes.