Data mesh vs data fabric vs data virtualisation : comprendre leurs différences pour mieux les combiner

Data mesh vs data fabric vs data virtualisation : comprendre leurs différences pour mieux les combiner Face à la multiplication des sources de données, des architectures toujours plus sophistiquées émergent pour en garantir l'accès, la gouvernance et la valorisation de l'information.

Bases relationnelles, data lake, services cloud, applications métier... Les entreprises font face à une explosion d'informations dispersées sur des systèmes variés entraînant une fragmentation qui freine la réactivité, complique la gouvernance et dilue la confiance dans les données. Dans ce cadre, trois approches émergent. La data virtualisation propose une couche d'accès unifié, la data fabric tisse un réseau d'intégration intelligent, tandis que le data mesh promeut la mise en œuvre d'une responsabilité distribuée et d'une organisation orientée produit.

Data virtualisation : l'accès sans duplication

La data virtualisation crée une couche d'abstraction permettant de requêter, transformer et combiner des sources disparates sans en copier le contenu. Elle s'appuie sur des vues fédérées et des capacités de transformation à la volée, typiques de solutions comme Denodo, Tibco ou Alluxio. Ses avantages majeurs résident dans l'agilité qu'elle procure : pas besoin d'outil d'extraction, de transformation et de chargement (ETL), inventaire rapide des données en temps réel, réduction des coûts d'infrastructure et respect des sources originales. Néanmoins, cette approche nécessite d'être vigilant sur plusieurs points : la performance (les requêtes peuvent être ralenties selon la source) et la disponibilité des systèmes sollicités, ainsi qu'à la sécurité car chaque connexion ouverte ajoute un vecteur de risque.

La data virtualisation excelle dans les contextes de business intelligence en temps réel et de consolidation rapide sans duplication, mais aussi dans l'accès à des données variées, tout en évitant la surcharge liée à des projets d'ETL lourds.

Data fabric : tisser un réseau intelligent

Le concept de data fabric correspond à un design architectural complet, pensé pour orchestrer et gouverner les données sur des environnements hybrides, multi-cloud et edge. Il s'appuie sur une base de métadonnées actives et sécurisée intégrant des catalogues d'informations intelligents ainsi qu'une traçabilité des transformations de contenu de bout en bout (ou lineage). L'IA peut intervenir pour automatiser les tâches de maintenance de ces architectures à l'instar de ce que propose Oracle avec son Autonomous Database. La virtualisation des données en est par ailleurs un composant clé, offrant une vue unifiée. Mais ce tissu va bien plus loin. Il automatise les flux, sécurise, orchestre et analyse les données, tout en offrant un modèle de gouvernance centralisé.

Ce modèle s'adresse particulièrement aux très grandes entreprises disposant de systèmes complexes et hétérogènes. Il passe par le déploiement d'un portail en self-service pour assurer la découverte et la consommation de données. Cette architecture orientée data permet aussi de facto d'accélérer les projets d'IA tout en garantissant la conformité réglementaire. Toutefois, sa mise en œuvre est exigeante. Elle implique une architecture sophistiquée, des coûts élevés en infrastructures, sans oublier des compétences techniques avancées.

Data mesh : responsabiliser par domaine

Face à la data virtualisation et la data fabric qui restent des notions technologiques, le data mesh renvoie à un paradigme organisationnel pensé autour de l'idée que les données doivent être gérées comme des produits par les équipes métier. Formalisée par Zhamak Dehghani en 2019, cette approche est tirée de l'architecture orientée domaine et des microservices. Elle repose sur quatre principes : la propriété par domaine métier, le traitement des données en tant que produits (documentés, fiables), une plateforme en self‑service (qui s'adosse à une data fabric), et une gouvernance fédérée.

Le data mesh rapproche créateurs et consommateurs de données. Chaque équipe devient responsable de la qualité, du cycle de vie et de la diffusion de ses datas, ce qui améliore la réactivité et l'alignement avec les besoins business. Ce nouveau paradigme engendre un changement culturel profond. L'organisation doit adopter de nouvelles responsabilités au sein des équipes produit et mettre en place une gouvernance distribuée. Les retours d'expérience montrent que l'absence d'un pilotage fédéré ou le manque de compréhension interne peuvent faire échouer la démarche.

Des synergies

Ces trois approches forment un trio complémentaire : la data virtualisation fournit la vitesse et la flexibilité d'accès, la data fabric installe la structure, l'orchestration et la gouvernance automatisée de l'information, le data mesh organise la responsabilisation des équipes métier vis-à-vis de leurs propres données et de l'accès à ces dernières. Dans cette perspective, la data virtualisation et la data fabric jouent un rôle crucial dans l'adoption réussie d'un data mesh, en automatisant le catalogage, les transformations, la gouvernance et le linéage des données.

Dans le cas d'un réseau hospitalier par exemple, chaque hôpital (qui renvoie ici à un domaine) traite ses données patient en respectant la réglementation locale. Le data mesh garantit l'autonomie et la propriété des données par domaine. La data fabric assure la visibilité et la traçabilité au niveau global via un catalogue sémantique. Quant à la virtualisation, elle permet d'interroger les données sans les centraliser physiquement, tout en protégeant la confidentialité de chaque client.

Autre exemple : dans un groupe média, le data mesh confie à chaque équipe ou domaine (éditorial, pub, marketing) la responsabilité de ses données. La data fabric assure la gouvernance, la traçabilité et l'orchestration de l'information entre domaines via des métadonnées. Enfin, la data virtualisation permet aux collaborateurs, que ce soit dans les rédactions ou à la régie, d'interroger les données en temps réel sans duplication, favorisant la personnalisation et la réactivité éditoriale ou publicitaire.

Enjeux de mise en œuvre

Adopter ces paradigmes conduit à des défis multiples. Côté virtualisation, des problématiques de dimensionnement, de sécurité et de disponibilité émergent. La data fabric pose des questions d'architecture, de compétences en IA et d'engagement à long terme en termes de solutions technologiques. Quant au data mesh, il recouvre des interrogations en matière de transformation culturelle et de gouvernance. Certaines organisations trouvent pertinente une approche hybride : démarrer par le data mesh pour responsabiliser les équipes, y ajouter la data fabric pour automatiser les flux et la gouvernance, puis y greffer la virtualisation pour accélérer l'accès aux données sans duplication.