EPR de Flamanville : la Cour des comptes dénonce des coûts hors de contrôle

EPR de Flamanville : la Cour des comptes dénonce des coûts hors de contrôle Initialement évalué à quelques milliards d'euros, le chantier de l'EPR de Flamanville a vu ses coûts décupler en raison de retards, d'ajustements techniques et de surcoûts financiers. La Cour des comptes pointe les dérives de ce projet emblématique.

Le chantier de l'EPR de Flamanville devait représenter un jalon clé dans la relance de la filière nucléaire française. Pourtant, après plus de douze ans de retard et une facture sept fois plus élevée que les estimations initiales, la Cour des comptes a publié un rapport accablant sur ce projet emblématique, mettant en lumière des dérives financières et opérationnelles.

Une facture qui s'envole

Initialement estimé à 3,3 milliards d'euros en 2006, le coût de l'EPR de Flamanville a bondi à 23,7 milliards d'euros, d'après le rapport de la Cour des comptes publié ce mardi, relayé par Le Figaro. Ce montant inclut non seulement les coûts de construction, mais également ceux liés à la première phase d'exploitation et aux frais financiers accumulés pendant les années de retard.

En 2020, la facture était évaluée à 19,1 milliards d'euros. Cette augmentation s'explique par l'inflation, les nouveaux retards et le renchérissement des coûts financiers. Selon la Cour, la construction seule représente désormais 15,6 milliards d'euros, auxquels s'ajoutent les frais liés à la préparation du premier arrêt pour remplacer le couvercle de la cuve, conformément aux exigences de l'Autorité de sûreté nucléaire.

L'institution souligne également l'impact des dépassements sur la rentabilité du projet. "À 2%, le programme n'est pas rentable", estime-t-elle dans son rapport, soulignant que pour atteindre 4% de rendement, il faudrait un prix de vente supérieur à 122 euros par mégawattheure.

Des retards et des défaillances multiples

Le chantier de Flamanville, lancé en 2007, a accumulé douze ans de retard, la mise en service effective n'ayant eu lieu qu'en décembre 2024. La Cour attribue ces retards à des défauts de conception initiaux et à une perte de compétences dans l'industrie nucléaire française après une longue période sans nouvelles commandes.

En dépit de ces difficultés, EDF justifie le projet en mettant en avant son rôle stratégique. "Les principaux enjeux du projet étaient de conserver les compétences de la filière nucléaire française et de préparer le déploiement de la technologie EPR en France et dans le monde", a déclaré EDF.

Un défi pour l'avenir du nucléaire français

L'expérience acquise à Flamanville est désormais présentée comme une étape clé pour optimiser les futurs réacteurs EPR 2. Le coût total de construction de six EPR 2 est actuellement estimé à 79,9 milliards d'euros, un montant réévalué par EDF en 2023.

"Le programme EPR2 reste marqué par un retard de conception, une absence de devis abouti et un plan de financement incertain", a souligné la Cour des comptes. L'institution recommande de sécuriser le financement avant toute décision d'investissement et de finaliser les études de conception détaillée.

EDF, qui table sur la standardisation et l'industrialisation des processus pour réduire les coûts et les délais des futurs réacteurs, insiste sur l'importance des perspectives à l'export. Cependant, la Cour appelle à une prudence accrue et recommande de "définir, avant l'engagement des projets internationaux, leurs niveaux de risques et de rentabilité attendue ainsi que leurs conditions de financement et s'y conforme".