Cryptomonnaies : l'impôt sur la fortune improductive fait polémique

Cryptomonnaies : l'impôt sur la fortune improductive fait polémique Les détenteurs de cryptomonnaies de plus de 1,3 million d'euros sont concernés par un amendement fiscal récemment adopté à l'Assemblée. Le texte suscite déjà de vives critiques dans le secteur.

Un amendement au projet de loi de finances 2026 a été voté à l'Assemblée nationale. Il transforme l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) en un "impôt sur la fortune improductive". Porté par Jean-Paul Mattei (MoDem), ce texte élargit l'assiette fiscale à de nouveaux actifs, dont les cryptomonnaies.

Un impôt étendu aux actifs numériques au-delà de 1,3 million d'euros

L'amendement adopté maintient le seuil d'imposition de l'IFI à 1,3 million d'euros de patrimoine net taxable, mais en modifie profondément la nature. Il supprime le barème progressif, le remplaçant par un taux unique de 1 %, et étend l'imposition à des biens jugés "improductifs" : biens immobiliers non exploités, objets de valeur, contrats d'assurance-vie… et actifs numériques.

Les détenteurs de cryptomonnaies ne sont pas exclus du champ de ce nouveau prélèvement, même s'ils conservent leurs actifs à long terme, sans les vendre. Jusqu'ici, seules les cessions à titre onéreux — comme la vente contre des euros — étaient imposables. Désormais, c'est la détention elle-même qui pourrait déclencher l'imposition.

Ce changement de philosophie fiscale fait suite à un élargissement du débat autour de la fiscalité du capital. L'objectif affiché : taxer les fortunes qui ne participent pas directement à l'économie réelle. Le vote intervient quelques jours après l'échec de la taxe Zucman, et peu après le dépôt d'une proposition de loi favorable à l'écosystème crypto, portée par le parti d'Éric Ciotti.

Vives critiques du secteur, Eric Larchevêque en première ligne

Dans le secteur des cryptomonnaies, les réactions ne se sont pas fait attendre. Cofondateur de Ledger, Eric Larchevêque a multiplié les prises de position critiques. Sur le réseau X, il dénonce une mesure visant à "punir la détention de valeur en dehors du système monétaire fiat".

Selon lui, cette évolution constitue "une erreur idéologique majeure, mais révélatrice d'un virage fiscal". Il estime que le message est clair : "La crypto est assimilée à une réserve improductive, non utile à l'économie réelle." Il s'alarme aussi des conséquences concrètes pour les contribuables concernés : "Sont ainsi notamment punis tous les épargnants qui souhaitent s'arrimer financièrement à l'or et au Bitcoin afin de protéger leur futur."

Outre le principe même de l'impôt, l'entrepreneur s'inquiète des obligations techniques qui pourraient en découler : déclaration de l'ensemble des portefeuilles (wallets), vente de crypto-actifs pour payer l'impôt, et risque de baisse future du seuil d'imposition. "Les fous du bus ont encore frappé", ironise-t-il.

En France, environ 10 % de la population détiendraient des cryptomonnaies, pour une valeur totale estimée à 20 milliards d'euros. Si le texte est confirmé par le Sénat, il pourrait modifier durablement la manière dont ces actifs sont perçus et traités par l'administration fiscale.