Ruptures conventionnelles : vers une hausse du coût pour les entreprises dans le budget 2026

Ruptures conventionnelles : vers une hausse du coût pour les entreprises dans le budget 2026 Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale prévoit une augmentation de la contribution patronale sur les indemnités de rupture conventionnelle. Une mesure défendue comme une réponse aux dérives constatées par plusieurs études et jugée nécessaire pour contenir les dépenses de l'assurance-chômage.

L'exécutif entend modifier le régime des ruptures conventionnelles, dont le poids sur les finances publiques ne cesse d'augmenter depuis leur création en 2008.

Le coût croissant du dispositif dans le viseur du gouvernement

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale prévoit de relever la contribution spécifique due par l'employeur lors d'une rupture conventionnelle. Le taux passerait de 30 % à 40 % sur les indemnités versées au salarié, comme l'indique la première version du texte présentée à l'Assemblée. La mesure s'appliquerait également aux mises à la retraite. Objectif affiché : freiner le recours croissant à ce dispositif.

Créée en 2008, la rupture conventionnelle permet à un employeur et un salarié de se séparer à l'amiable tout en donnant accès à l'assurance-chômage. En 2024, 515 000 ruptures conventionnelles ont été enregistrées, soit deux fois plus qu'en 2010. Depuis 2021, entre 15 % et 18 % des CDI se terminent par ce mode de rupture, selon une note de l'Institut des politiques publiques (IPP) consultée par Le Monde.

Le coût pour l'assurance-chômage suit la même courbe. D'après l'Unédic, 9,4 milliards d'euros de prestations ont été versées en 2024 au titre des ruptures conventionnelles, représentant 26 % des dépenses d'allocation, contre 18 % dix ans plus tôt.

Jean-Pierre Farandou, ministre du Travail, a justifié cette réforme devant le Sénat en dénonçant un usage excessif du dispositif : " Il n'est pas normal de considérer que l'on peut se mettre au chômage pour aller voyager… ", a-t-il déclaré, précisant toutefois qu'il s'agissait de " cas individuels".

Des effets d'aubaine dénoncés, mais un impact limité sur les licenciements

Pour l'exécutif, la réforme vise aussi à corriger certains effets d'aubaine. Une étude de la Dares de 2013 révélait que 28 % des salariés ayant signé une rupture conventionnelle seraient restés dans l'entreprise si le dispositif n'avait pas existé. Par ailleurs, 40 % auraient démissionné, ce qui n'ouvre pas droit à l'assurance-chômage. Cette dynamique expliquerait en partie les 4 milliards d'euros d'indemnités annuelles qui auraient pu être évitées.

Astrid Panosyan-Bouvet, ministre du gouvernement Bayrou, avait déjà alerté en juillet sur des " démissions et des licenciements déguisés ". Selon l'IPP, les démissions ont chuté de 19 % après l'introduction de la rupture conventionnelle.

Pour autant, la note nuance l'ampleur du phénomène. Seuls 12 % des licenciements pour motif personnel auraient été remplacés par ce mode de séparation. Le nombre de recours aux prud'hommes n'a pas significativement diminué non plus. Par ailleurs, le mécanisme reste concentré sur certaines catégories de salariés : 19 % des cadres quittent leur poste via une rupture conventionnelle, contre 11 % des ouvriers ou employés. Ce différentiel contribue à alourdir les dépenses, les montants d'indemnisation étant plus élevés pour les salaires les plus élevés.

La réforme fait débat. Le gouvernement souhaite maintenir la mesure dans le texte final, mais la commission des affaires sociales de l'Assemblée l'a rejetée en première lecture. Son sort sera tranché lors de l'examen du projet de loi en séance, dans un contexte de déficit prévu à 17,5 milliards d'euros pour la Sécurité sociale en 2026.