Budget : que se passera-t-il si le gouvernement est renversé sur le projet de loi de finances ?
La gauche et le Rassemblement national menacent le gouvernement Barnier d'une motion de censure s'il recourait au 49.3 pour faire passer le budget. Que se passerait-il alors ?
Le temps presse au Parlement pour adopter un budget avant le début de l'année 2025. Michel Barnier prendra-t-il le risque de recourir au 49.3 pour faire passer en force son projet de loi de finances ? Si c'était le cas, les députés du Nouveau Front Populaire lui ont promis une motion de censure. Si le Rassemblement national décidait de soutenir celle-ci, le gouvernement serait renversé. Que se passerait-il ensuite ?
Aux Etats-Unis, lorsque l'Etat se retrouve sans budget, les services publics cessent de fonctionner et les fonctionnaires ne sont plus payés : on parle de "shutdown". Mais en France, rien de tel n'est prévu. Tout d'abord, Emmanuel Macron devrait nommer un nouveau gouvernement, puisqu'il n'est pas autorisé à dissoudre l'Assemblée nationale une seconde fois dans l'année.
Le nouvel exécutif disposerait alors d'une fenêtre serrée : d'après l'article 45 de l'Assemblée, si un nouveau texte budgétaire était déposé au Parlement avant le 11 décembre, seule sa partie recettes devrait être adoptée avant la fin de l'année. Le volet dépenses ferait ensuite l'objet d'un nouveau débat en janvier 2025. Il existe un précédent à un tel scénario lors du budget 1963, retardé à la suite d'une dissolution de l'Assemblée décidée par Charles de Gaulle.
Un vide juridique ?
Si aucun nouveau projet de loi de finance n'est déposé avant le 11 décembre, le gouvernement aura encore une option jusqu'au 19 décembre : celle de demander au Parlement la reconduction des impôts tels que votés dans le budget 2024. Les dépenses seront alors fixées par décret, avec la contrainte de ne pas dépasser celles de l'année précédente. Toutefois, si le Parlement refuse de voter la reconduction des impôts, les institutions françaises se retrouveront dans un vide juridique. De même que si le gouvernement ne sollicite pas les parlementaires avant le 19 décembre.
Une dernière option est tout de même évoquée par les constitutionnalistes : celle que le Parlement vote les pleins pouvoirs à Emmanuel Macron, en vertu de l'article 16. Un vote qui reste plus qu'improbable au vu de la composition de l'Assemblée nationale.
En résumé, les scénarii varient en fonction de la date à laquelle une motion de censure pourrait être adoptée. Plus tard Michel Barnier déclencherait un 49.3, plus il exposerait le pays à une situation inextricable. Il est probable que le Premier ministre ne prenne pas le risque d'être renversé et laisse les débats se poursuivre au Parlement. Quitte à parier sur le fait que les discussions s'éternisent et que le texte ne soit pas voté dans les délais impartis de 70 jours. Auquel cas, en vertu de l'article 47, l'exécutif pourra faire adopter le budget par ordonnances.